Changement climatique : les autorités financières prennent le taureau par les cornes
Le secteur financier se dote d’une nouvelle vision pour répondre aux importants besoins de financement des projets verts et climatiques du pays à horizon 2050. Des besoins que la Banque mondiale estime à près de 78 milliards de dollars à terme.
C’est un rôle stratégique, voire cruciale, que joue le secteur financier dans l’accompagnement de la vision en matière de lutte contre le changement climatique. Un rôle qui va sans doute considérablement augmenter à l’avenir dans l’objectif de répondre aux importants besoins de financement des projets verts et climatiques.
Dans son rapport climat et développement au Maroc, la Banque mondiale a évalué les besoins d’investissement entre 2022 et 2050 à près de 78 milliards de dollars. Conscients de l’importance et de la place focale du financement green pour l’économie, le ministère des Finances, Bank Al Maghrib, l’Autorité marocaine du marché des capitaux et l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale se sont concertés et mobilisés pour développer une vision de place. La tutelle et les régulateurs entendent clairement mettre un coup d’accélérateur à la transition verte du secteur financier. Le positif est que nous n’y allons pas d’une feuille blanche.
Le Maroc peut, en effet, capitaliser sur les réalisations de la feuille de route adoptée en marge de la COP22 tenue à Marrakech en 2016. Celle-ci visait, pour rappel, l’alignement du secteur financier, dans toutes ses composantes, sur les enjeux du développement durable. C’est, là, un engagement fort pour contribuer à la mobilisation des capitaux privés fondamentaux pour la réussite de la transition verte du Maroc et pour lutter contre les effets du changement climatique.
Diagnostic sans appel
Pour élaborer cette vision, les autorités financières se sont reposées sur un diagnostic approfondi. Premier constat : les flux de financement climatique proviennent majoritairement du secteur public. Pire, les mesures d’atténuation ne sont majoritairement prépondérantes que pour la production d’énergies renouvelables.
Autre constat, «les actions d’adaptation, quant à elles, principalement assurées par le secteur public, attirent encore moins de financements privés, à l’exception du secteur de dessalement de l’eau de mer», relèvent-ils.
Et ce n’est pas tout : «L’éventail des instruments financiers verts au Maroc est assez complet sauf qu’il existe un décalage entre la demande et l’offre pour ces produits». Mais le plus inquiétant est que le diagnostic ait permis de détecter l’absence d’une définition de projets verts (taxonomie) et le manque de données de qualité à même d’assurer le développement des financements verts et d’informer la prise de décision des investisseurs.
Trois piliers stratégiques
Pour surmonter ces obstacles, une nouvelle stratégie a été élaborée. Construite autour de trois piliers d’intervention comprenant 9 axes, elle vise principalement l’identification des leviers permettant d’accélérer la mobilisation des financements privés en faveur du climat et le renforcement de la gestion des risques climatiques au sein du secteur financier.
Pour ce faire, les Finances et les régulateur financiers ont opté, dans le cadre de l’opérationnalisation de cette stratégie, pour une gouvernance adaptée impliquant les parties prenantes du secteur public et privé. Ses instances gouvernantes auront la lourde tâche de «répondre aux différents enjeux du déploiement de cette stratégie et de suivre l’avancement de manière proactive et concertée des actions identifiées».
Jules Gabas / Les Inspirations ÉCO