Affaire Sika AG : les leçons d’une “première” juridique
Après l’adoption de nouveaux textes relatifs à la concurrence et en attendant la refonte du cadre légal actuel, conformément aux instructions royales, le Conseil de la concurrence affiche son intransigeance dans le plein exercice de ses pouvoirs de contrôle et de sanction et veille au respect de la conformité. L’entreprise Sika AG est l’un des premiers à en faire les frais, avec une sanction pécuniaire de 11.670.215 DH, pour non-respect de l’obligation de notification.
L’information a fait le tour de la presse et de toutes les données communiquées à propos de ce dossier, nombreux sont ceux qui ont notamment retenu la «grosse» facture que l’entreprise Sika AG se trouve acculées à régler conformément à la décision prise par le Conseil de la concurrence à son encontre. Rappelons-nous, en début de semaine dernière, le Conseil annonçait avoir décidé d’infliger une sanction pécuniaire à l’égard de Sika AG, pour non-respect de l’obligation de notification.
En fait, le leader mondial de la fabrication et de la commercialisation de produits chimiques de construction n’a pas rempli les formalités d’information légales concernant son opération de concentration économique portant sur sa prise de contrôle exclusif de la société Financière Dry Mix Solutions.
Plus précisément, il s’agit de l’acquisition par la société Sika AG de 100% du capital et des droits de vote de la société Financière Dry Mix Solutions SAS. Suite à cela, le Conseil de la concurrence a a ainsi décidé à l’unanimité, le 28 avril dernier, d’infliger à Sika AG une sanction pécuniaire de 11.670.215 dirhams. Une démarche qui trouve son essence dans les dispositions de l’article 19 de la loi 104-12, est-il souligné auprès du gendarme du marché.
La société Sika AG a accepté le paiement de cette sanction pécuniaire qui sera versée au budget de l’Etat. Par sa décision n°134/D/2021 du 06 décembre 2021, le Conseil de la concurrence s’est saisi d’office et a ouvert une instruction concernant la réalisation par la société «Sika AG» en 2019 d’une opération de concentration économique sans notification préalable au Conseil de la concurrence et accord de ce dernier, en infraction des articles 12 et 14 de la loi 104-12.
Mais encore ?
Maintenant, en quoi le fait de ne pas informer le Conseil de la concurrence représente-t-il un risque pour le marché? Et, pourquoi une sanction aussi lourde est-elle imposée à l’opérateur pour avoir négligé de notifier sa transaction audit Conseil, diront certains? La réponse réside justement dans le corpus de la fameuse loi 104-12. D’après ce texte, les entreprises prenant part à une concentration notifiable auprès du Conseil de la Concurrence sont soumises à deux obligations, à savoir notifier l’opération au Conseil (article 12 de la Loi 104-12) et suspendre la réalisation de l’opération jusqu’à l’obtention de l’autorisation du Conseil de la Concurrence (article 14 de la Loi 104-12).
«Il s’agit de la première décision de ce genre rendue par le Conseil de la Concurrence et qu’elle constitue un signal fort aux entreprises qui réaliseraient des opérations de concentration sans avoir procéder à une notification devant le Conseil de la Concurrence et avoir obtenu préalablement son autorisation», soulignait à ce propos le juriste Saad El Mernissi, conseiller juridique associé du Cabinet Figes Mernissi, dans une déclaration accordée à l’agence MAP.
Ce qu’il faut savoir, c’est que l’absence de notification, tout comme la réalisation anticipée de l’opération, sont communément regroupées sous le terme gun jumping. D’après le référentiel légal instauré par la loi 104-12, notamment son article 19, ces entreprises et sont sanctionnées par une amende pouvant atteindre 5% du chiffre d’affaires de l’entreprise responsable de la notification.
M.K et S.N / Les Inspirations ÉCO