Maroc-France : Un partenariat d’exception
Entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, le successeur de François Hollande sera connu dimanche 7 mai, à l’issue du deuxième tour de l’élection présidentielle. Retour sur les faits marquants de la coopération maroco-française durant les cinq ans du mandat Hollande.
François Hollande s’apprête à quitter l’Élysée et passer le flambeau à son successeur. Hormis l’incident «Hammouchi», à l’origine de la suspension de la coopération judiciaire pendant près d’un an, les relations entre la France et le Maroc ont été globalement bonnes sous le mandat du président sortant. D’abord sur le plan politique, «la France a joué un grand rôle dans le vote de la dernière résolution du Conseil de sécurité sur la question du Sahara marocain. La position de la France n’a pas changé et a toujours soutenu le Maroc dans la défense de son intégrité territoriale», soutient Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales (IMRI). «La visite effectuée par le président Hollande à Tanger, en septembre 2015, a été le point d’orgue de la relation entre la France et le Maroc, avec des moments très forts d’amitié et de proximité entre les deux chefs d’État», souligne Manuel Bufala, conseiller à l’ambassade de France à Rabat.
Le roi Mohammed VI et le président français, avaient lancé, lors de cette visite, un appel pour une initiative commune et solidaire en faveur du climat, visant à pousser la communauté internationale à trouver des réponses adéquates et efficaces au problème du changement climatique. Cela s’est traduit par une parfaite coordination accompagnant l’organisation réussie de la COP21 à Paris (du 29 novembre au 11 décembre 2015), puis de la COP22 à Marrakech (du 7 au 18 novembre 2016). Sous le mandat de François Hollande, la France et le Maroc ont intensifié leurs efforts en vue de lutter contre le radicalisme. Citons, à ce titre, l’accord scellé en 2015 à Tanger portant sur la formation à Rabat d’une cinquantaine d’imams français. Cette initiative, dont l’objectif est de promouvoir l’Islam de juste milieu, a été très bien accueillie par l’Union des mosquées de France.
Le combat anti-terroriste figure aussi à la tête des priorités de la coopération bilatérale. Frappée à maintes reprises par des actes barbares (attentats de Charlie Hebdo et du Bataclan), la France a dû renforcer l’échange des renseignements avec les services sécuritaires marocains. À l’occasion de la visite du roi à Paris, une semaine après le drame du Bataclan, le président Hollande avait vivement remercié le Maroc pour «l’assistance efficace» qu’il a apportée à la France en l’aidant à repérer la présence, sur son territoire, d’Abdelhamid Abaaoud, le cerveau des attentats du 13 novembre à Paris. «En faisant vivre au quotidien un Islam ouvert et tolérant, le Maroc s’érige comme le meilleur rempart contre tous ceux qui dévoient cette religion en prenant les musulmans en otage ou en devenant leurs bourreaux. En ce sens, nous n’avons pas de meilleur allié que le Maroc, car le statut de Commandeur des Croyants de Sa Majesté le Roi permet de donner une représentation et une crédibilité à un islam trop souvent perverti, par ignorance ou par cynisme. Le Maroc est un élément clé de la solution à nos problèmes sécuritaires», avait d’ailleurs souligné Rachida Dati, l’ex-Garde des sceaux et maire du 7e arrondissement de Paris dans une tribune publiée en août 2016 dans le quotidien français, Les Echos.
Une machine économique bien huilée
Cela remonte même aux années du protectorat: la France et le Maroc entretiennent des liens économiques intenses. Premier partenaire commercial du Maroc, la France est le principal pourvoyeur d’investissements directs étrangers. Le royaume accueille à ce jour plus de 750 filiales d’entreprises françaises, générant un total de 120.000 emplois. Presque toutes les entreprises du CAC40 sont présentes au Maroc. Si l’ancien président, Nicolas Sarkozy, avait marqué son mandat par la conclusion de l’accord sur le mégaprojet du constructeur Renault-Nissan de Melloussa (près de Tanger), son successeur, François Hollande, a été le témoin d’un autre mégaprojet, toujours dans le secteur de l’industrie automobile, celui de l’usine du constructeur PSA Peugeot Citröen, nécessitant un investissement de 557 millions d’euros et dont les premières livraisons sont prévues en 2019.
L’engagement financier des agences françaises de développement n’est pas en reste. L’encours de l’Agence française de développement (AFD), mobilisée au Maroc, s’élève à plus de 2 milliards d’euros. Les milieux des affaires, de leur côté, saluent le renforcement de la présence des entreprises françaises dans des secteurs à forte valeur ajoutée technologique, notamment au cours des cinq dernières années. C’est le cas de l’industrie aéronautique avec l’arrivée des français Latécoere, Ateliers de la Haute Garonne, Segula Technologies, etc. D’autres projets sont par ailleurs en cours de finalisation, relevant notamment du secteur agroalimentaire qui bénéficie désormais d’un contrat-programme signé entre le secteur privé et l’État marocain, en marge de la 12e édition du Salon international de l’agriculture de Meknès (26 entreprises et organismes de France ont pris part au SIAM2017).
Le(a) nouveau(elle) locataire (trice) de l’Élysée sera connu (e) dimanche prochain à l’issue du second tour de l’élection présidentielle. Qu’en sera-t-il des relations entre le Maroc et la France ? Kerdoudi émet une seule réserve en lien avec l’impact sur la communauté marocaine en France dans le cas où Marine Le Pen gagnerait la course. «Les liens économiques, (que ce soit le tourisme, les échanges commerciaux, les IDE ou les transferts MRE), demeurent intacts indépendamment des changements politiques», conclut le président de l’IMRI.
De solides liens historiques et culturels
Emmanuel Macron l’a déclaré à nos confrères de Jeune Afrique: Le Maroc sera sa première destination en cas de victoire. L’ancien ministre des Finances, sous Hollande, veut «renforcer les liens économiques avec les pays d’Afrique du Nord». Du côté de l’ambassade de France à Rabat, on insiste sur la constance des liens d’amitié entre les deux pays, indépendamment des choix politiques. Preuve en est que la coopération n’a pas été affectée par l’arrivée du PJD au pouvoir ou encore par l’alternance entre Sarkozy et Hollande. «Notre partenariat d’exception est bâti sur des bases solides», souligne Manuel Bufala. Le domaine éducatif figure aussi parmi les principaux axes de coopération bilatérale. La France accueille chaque année 36.000 étudiants marocains, soit le plus grand contingent estudiantin en France (devant les Chinois au nombre de 28.000). Aussi, plus de 90.000 personnes apprennent la langue de Molière dans les instituts français éparpillés à travers les grandes villes marocaines. Last but not least, pas moins de 38.000 élèves suivent leur scolarité au réseau d’enseignement français au Maroc.