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Lutte contre la corruption : «Une responsabilité politique de l’État»

Abdesselam Aboudrar : Président de l’Instance de prévention de la corruption

La lutte contre la corruption revient sur les devants de la scène. Le gouvernement présente aujourd’hui sa stratégie. À la veille de cette sortie, Mohamed Moubdii a été interpellé par une salve de questions au Parlement sur ce sujet. Dans cette interview, Abdesselam Aboudrar, président de l’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC), revient sur les défis pour réussir ce chantier, notamment les prérogatives de la future Instance nationale de la probité et de lutte contre la corruption et le projet de loi sur l’accès à l’information.

Les ÉCO : Quels sont les projets et objectifs de l’ICPC pour l’année 2016 ?
Abdesselam Aboudrar : De par la Constitution (Article 179), l’ICPC gère une période transitoire préparant l’entrée en vigueur de la nouvelle Instance nationale de la probité, la prévention et la lutte contre la corruption (Loi n°113.12). L’ICPC prépare donc les documents qui permettront à l’Instance nationale de probité (INP) d’entamer ses travaux dans les meilleures conditions, de même qu’elle continue d’assumer les missions qui lui sont assignées en matière de prévention : études, propositions, sensibilisation, actions conjointes avec les partenaires, réception et traitement des plaintes.

Est-ce qu’une date est fixée pour l’installation des membres de l’Instance nationale de la probité et de lutte contre la corruption ?
L’installation se fera aussitôt que les instances dirigeantes de la nouvelle institution seront nommées, c’est à dire le président, le secrétaire général et le Conseil composé de 12 membres.

La stratégie de lutte contre la corruption a été annoncée en fin de mandat du gouvernement. Y a-t-il des garanties pour qu’elle soit reconduite par le prochain Exécutif ?
Suite aux recommandations de l’ICPC en 2009, le gouvernement avait lancé en 2013 le processus d’élaboration de la stratégie nationale de lutte contre la corruption basé sur une approche participative avec la contribution de tous les acteurs concernés (départements ministériels, institutions nationales, secteur privé et la société civile). À cet effet, la stratégie nationale de lutte contre la corruption (2015-2021) adoptée récemment, à l’instar des autres stratégies sectorielles (Plan émergence, Plan Maroc vert…), constitue une responsabilité politique de l’État marocain, eu égard à ses engagements internationaux. Par ailleurs, la nouvelle instance constitutionnelle (INP) qui est une autorité indépendante, devra veiller à la pérennité de l’action publique en la matière.

L’ICPC aura pour mission de coordonner et d’évaluer cette stratégie. Avez-vous le soutien politique, les moyens financiers et humains pour jouer ces deux rôles ?
L’ICPC n’existera plus. La mission de suivi et d’évaluation des politiques publiques en matière de probité, de prévention et de lutte contre la corruption constitue une prérogative principale de l’Instance nationale de probité au vu de l’article 17 de la loi n°113.12, ce qui n’exclut pas le suivi et l’évaluation de la stratégie qui est attribuée à une commission nationale qui sera créée à cette fin. L’INP siègera au sein de cette commission qu’il faudra doter de moyens humains et financiers nécessaires pour s’acquitter de ces deux missions.

Quel est le niveau de coopération entre l’ICPC et les inspections des ministères ?
Depuis sa création, l’ICPC a adopté une politique de partenariat national visant un rapprochement avec l’ensemble des acteurs institutionnels et sociétaux pour mener des actions communes. À cet égard, l’ICPC a signé des conventions de coopération avec les inspections générales de ministères portant entre autres sur la formation continue, l’élaboration des codes déontologiques, les procédures de traitement des plaintes.

Le projet de loi pour l’accès à l’information permettra-t-il, dans sa version actuelle, d’offrir des moyens de lutte contre la corruption ?
Le droit d’accès à l’information (DAI) est un prérequis fondamental pour le système national d’intégrité dont la finalité est la promotion de la transparence, de la probité, de la participation, de la bonne gouvernance et de la reddition des comptes. Par ailleurs, nous considérons que le DAI est un pilier essentiel dans l’action de prévention et de lutte contre la corruption. Cependant, le projet de de loi tel que soumis au Parlement ne répond pas aux normes et standards internationaux, en particulier quant aux aspects relatifs aux champs d’applications (personnes) et aux exceptions, l’exclusion de la publication des rapports des organes d’inspection et de contrôles, l’indépendance de l’instance chargée du DAI ainsi que l’insuffisance des moyens dédiés à sa mise en œuvre. 



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