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«La réforme des retraites ne doit pas attendre»

Mohamed Moubdii : Ministre chargé de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration

Le gouvernement est, on ne peut plus, déterminé à mettre en œuvre la réforme de la retraite avant la fin de son mandat, en dépit de la grève générale observée mercredi dernier. C’est ce que tient à préciser le ministre de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration, Mohamed Moubdii. Sur le plan politique, il espère le maintien de la même coalition gouvernementale au prochain mandat et prône l’annulation de la liste nationale des jeunes et même celle des femmes.

Les Inspirations ÉCO : Les syndicats se félicitent de la réussite de la grève générale du 24 février. De votre part, vous en minimisez la portée.D’où vient cette divergence de vues ?
Mohamed Moubdii : Peu importe le taux de participation, le service minimum a été assuré et aucun débordement n’a été enregistré. Les chiffres dont dispose le gouvernement, sur le taux de participation à la grève du 24 février, sont beaucoup moins élevés que ceux avancés par les syndicats. Globalement, le gouvernement se félicite du climat dans lequel s’est déroulée cette grève qui est inéluctablement un pas supplémentaire dans le socle démocratique. L’ambiance de la grève était empreinte d’un grand esprit de responsabilité et de respect. Il s’agit d’un message fort à l’égard des instances internationales. Néanmoins, je tiens à souligner que cette grève n’a apporté aucune solution. Je regrette par ailleurs qu’elle ait eu lieu, car elle n’est pas justifiée. Le dossier de la retraite, en souffrance depuis plusieurs années, mérite le consensus et un échange beaucoup plus responsable que celui qui prévaut à l’heure actuelle. Ce gouvernement a pris la responsabilité d’entamer la réforme qui s’avère dure et pénible. Nous n’avons jamais été à l’origine du déficit de la Caisse de retraite que nous tendons à réformer. Si on avance au rythme actuel, les réserves de cette Caisse vont s’épuiser en 2022.

Que répondez-vous aux centrales syndicales qui vous reprochent votre approche unilatérale dans l’élaboration de la réforme de la retraite ?
Avec ce gouvernement, huit rencontres ont été tenues avec les syndicats et nous avons constamment souhaité recevoir des propositions et des alternatives de leur part. Le dossier a été discuté en profondeur et nous avons même sollicité l’avis du Conseil économique, social et environnemental. Le gouvernement s’est aussi référé à toutes les études réalisées sur le dossier. Un projet de loi a été, par la suite, proposé. Toute réforme nécessite des sacrifices. Les syndicats veulent que la réforme de la retraite soit accompagnée d’un autre package relatif aux points qui sont restés en suspens dans le cadre de l’accord du 26 avril 2011. Nous sommes d’accord sur ce principe. Toutefois, nous ne pouvons traiter ces points d’emblée. Certains dossiers sont plus urgents que d’autres et à leur tête, la réforme de la retraite. Tout report aggravera la situation.

Pensez-vous qu’en dépit du bras de fer avec les syndicats et le blocage au sein du Parlement, la réforme se fera avant la fin de ce mandat ?
Oui, la réforme de la retraite se fera avant la fin de ce mandat. La loi organise les relations entre les instances. Je reste confiant.

Mais, vous n’avez pas la majorité numérique au sein de la Chambre des conseillers. Comment allez-vous gérer cette situation ?
Le gouvernement a soumis ce texte au Parlement qui peut enrichir le texte et l’amender. Les syndicats sont représentés à la Chambre des conseillers et peuvent faire leurs propositions au sein de cette institution.

Malgré la tension entre le gouvernement et les centrales syndicales, le dialogue social reprendra-t-il ?
Le gouvernement est ouvert à dialoguer avec les syndicats, mais la réforme de la retraite ne doit pas attendre. Chaque jour de retard a un lourd impact financier et rend la réforme de plus en plus difficile. Si rien n’est fait, des décisions beaucoup plus pénibles que la réforme proposée, seront prises en vertu de la loi. C’est ce que le gouvernement tend à éviter.

La réforme de l’administration constitue un chantier principal de votre département. De son côté, le citoyen ne sent pas une amélioration en la matière. Comment expliquez-vous cette situation ?
La réforme a trait à des pratiques ancrées depuis de longues années. La volonté de réformer fait face à une résistance. La réforme ne se résume pas à un acte ou un texte, mais est plutôt relative aux comportements, à la déontologie et à l’éducation. Elle nécessite l’engagement de tous. Je pense qu’aujourd’hui, la situation est très différente, par rapport à une décennie auparavant. S’agissant de la corruption, tout le monde doit adhérer au processus de son éradication. Il faut du temps.

Où en est la réforme du statut de la fonction publique qui tarde à voir le jour ?
La première mouture relative à la révision du statut de la fonction publique est finalisée. Elle sera présentée incessamment au chef de gouvernement avant sa présentation au Conseil supérieur de la fonction publique. Le texte sera, par la suite, déposé au Secrétariat général du gouvernement et mis dans le circuit législatif. Le projet comporte plusieurs nouveautés et s’adapte avec les dispositions de la Constitution. Il traite plusieurs questions, comme la promotion qui devra se faire à travers la formation continue et qui donne un signal fort à l’approche genre.

Le recrutement par contrat sera-t-il appliqué au cours de cette année ?
Le décret sera adopté dans deux à trois semaines. Nous optons pour la contractualisation pour permettre à l’administration une souplesse au niveau du recrutement. Les fonctionnaires seront recrutés pour une tâche donnée. Sans l’amélioration de son rendement, l’administration ne peut pas être efficace et apte à mettre en exécution toute politique. Je tiens, par ailleurs, à souligner que c’est la manière dont le capital humain est géré, réparti et évalué qui pose actuellement problème. Si on se compare aux taux internationaux, certains secteurs souffrent de manque de fonctionnaires comme la santé, l’enseignement et l’ingénierie. Mais, en parallèle, une abondance est enregistrée dans le secteur public, car les fonctionnaires ne sont pas encadrés et recrutés pour une tâche donnée. Même l’évaluation doit être revue. La note attribuée au fonctionnaire, chaque année dans le cadre de l’évaluation, n’a aucun sens. Les problèmes doivent être traités avec rigueur. Plusieurs problèmes seront résolus dans le cadre de la réforme du statut de la fonction publique. Il faut dire que la procédure de la réforme est très longue. Pour atteindre le changement escompté, il faut la continuité. Il s’avère nécessaire de passer le flambeau à quelqu’un qui soit imbibé de la même ambition. C’est pour cette raison que la coalition gouvernementale actuelle doit continuer avec ses composantes.

Vous aspirez au maintien de la même coalition, lors du prochain mandat, malgré les divergences entre certaines de ses composantes ?
Le gouvernement actuel a réussi beaucoup de chantiers et a gagné la confiance des citoyens. Le bilan doit être défendu par toutes ses composantes. Certaines initiatives viennent à peine de germer. Il faut que nous restions pour les faire épanouir. Au Mouvement populaire, nous sommes très satisfaits de cette coalition et nous espérons continuer ensemble.

Au niveau des textes électoraux, la liste nationale fait l’objet de polémique…
Je suis contre la liste des jeunes. C’est une rente politique. Les jeunes doivent avoir la légitimité électorale à travers leur élection par les citoyens. L’expérience a démontré que la liste était basée plutôt sur le copinage et le clientélisme. La liste nationale constitue pour moi une trahison vis-à-vis des citoyens. Cinq ou six jeunes députés, seulement de différents partis politiques, ont pu accomplir un bon travail au cours de ce mandat. Les jeunes doivent être encouragés par leurs partis politiques. Même la liste nationale dédiée à la femme doit être annulée. Elle a, en effet, joué son rôle et il est temps maintenant de passer à une autre étape. La femme a pu démontrer qu’elle est aussi compétente que l’homme à gérer et légiférer. Il est temps qu’elle soit élue directement par les électeurs. On peut même penser à une mesure de transition. À titre d’exemple, dans une circonscription de quatre sièges, on attribue un siège à la femme. De cette manière, les femmes députées seront issues des différentes régions du Maroc. C’est un avis personnel que je défendrai au sein des instances du Mouvement populaire.


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