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Entreprise et responsabilité sociale : El Khalfi dresse un tableau peu reluisant

6 des 9 millions de salariés du privé s’inscrivent en dehors de toute couverture sociale. Le règlement en justice d’un différend commercial prend 530 jours au Maroc, alors qu’il est de 70 jours à Singapour.

A2S a organisé, vendredi dernier à l’INPT Rabat, une conférence autour du thème «La jeunesse, l’entrepreneuriat et l’action civique». Mustapha El Khalfi, ministre de la Communication, s’est exprimé sur le sujet devant un parterre d’étudiants. Le sujet est important, ayant trait à l’entreprise et à l’action sociale. Un concept et une composante de plus en plus importante dans la vie de l’entreprise. Toutefois, la réalité sur le terrain renseigne plutôt sur un manque de considération quant à la responsabilité sociale dans le monde de l’entreprise. Parmi les 9 millions de salariés du privé, les affiliés à la couverture sociale représentent environ un tiers, tandis que les deux autres tiers s’inscrivent en dehors de toute couverture. Cela pose, selon le ministre, un vrai problème sociétal, l’entreprise citoyenne se devant de respecter le droit inaliénable et garanti par la loi à la couverture.

Un autre indicateur témoigne du gouffre séparant l’entreprise de son environnement immédiat. Chaque année, le nombre de grèves s’élève à plus de 1.000. Quant aux différends individuels, ils dépassent les 24.000 dossiers. La hausse de ces chiffres révèle, selon El Khalfi, l’absence de médiation sociale. Les tensions au sein de l’entreprise sont également préoccupantes, et ce à plus d’un titre. Un tableau peu reluisant brossé par le porte-parole du gouvernement qui met le doigt sur une problématique des plus pesantes sur l’économie. En effet, tout investisseur étranger ne perd pas de vue un certain nombre d’indicateurs qui émanent du climat dans lequel l’entreprise évolue (compétitivité, Doing Business, corruption, networking readiness). S’ajoutent à cela les classements des organismes de notation standards qui indiquent les horizons liés à l’investissement.

Si l’on prend en considération tous ces indicateurs, la situation du Maroc n’est ni bonne, ni mauvaise: elle est moyenne, tranche le ministre. Le risque de faire marche arrière plane donc toujours sur le climat des affaires au Maroc, et appelle à plus de vigilance. Et ce ne sont pas les exemples qui manquent. Le règlement en justice d’un différend commercial prend 530 jours au Maroc, tandis qu’il est de 70 jours à Singapour. Le taux de retour d’un investisseur au Maroc est de moins de 2%, presque nul. Certes, les IDE ont augmenté au cours des 10 dernières années. Cependant, en dehors des indicateurs, c’est la stabilité qui aide le Maroc à se positionner, a décrété le ministre. Globalement, le World Government Index, un indicateur de la BM qui englobe une multitude d’indicateurs, classe le Maroc comme destination d’avenir.

El Khalfi a par ailleurs énuméré les quatre dimensions liées à l’entrepreneuriat qu’il faut prendre en ligne de compte, à savoir les dimensions légale, institutionnelle, économique et technologique. Celles-ci se se trouvent réunies dans une dimension politique globale. La dimension légale est primordiale pour encourager l’esprit entrepreneurial. El Khalfi s’est inspiré à cet effet de la production audiovisuelle qui a connu un vrai «boom» après la réforme des cahiers des charges et le bannissement du gré à gré.

Dans le même sillage, la réforme de la loi organique des Finances et le décret des marchés publics, qui garantit désormais 15% à la préférence nationale, sont deux exemples de l’importance des lois dans l’encouragement des jeunes à entreprendre. L’entreprise innovante doit aussi avoir droit de cité, à l’image du Small Business Act, qui est à l’origine de l’épanouissement économique des startups aux USA.

Dans cette configuration, le système législatif marocain est encore jeune et souffre de lacunes. Quid du financement qui rétrécit comme une peau de chagrin pour l’entreprise, contrairement aux ménages? Les banques sont peu enclines à accompagner de nouvelles créations d’entreprises, étant donné que la marge de risque est très étroite, selon les règles en vigueur. La fiscalité est également un grand facteur de promotion de l’initiative auto-entrepreneuriale. Toutefois, il s’avère qu’investir dans la Bourse est moins contraignant puisque la fiscalité est de seulement 10%. Plus encore, le poids de la fiscalité, explique le ministre, pousse l’entreprise à aller vers la spéculation, chose contraire à l’esprit de l’entreprise citoyenne.


 

Les jeunes préfèrent le fonctionnariat
La composante institutionnelle dans le domaine de l’entreprise est tout aussi importante que la fiscalité ou l’accès au financement. Or, comme le souligne Mustapha El Khalfi, le Conseil de la concurrence, garant du respect de la compétitivité, est récent dans sa nouvelle configuration. Il en déduit que la problématique de l’entreprise réside dans l’étroitesse du système institutionnel qui lui garantit un climat de concurrence saine. Il s’agit là d’un système institutionnel en devenir. C’est la raison pour laquelle les jeunes optent pour le fonctionnariat, face aux problématiques multiples que connaît l’entreprise. L’innovation est aussi confrontée à la propriété intellectuelle et industrielle. Au moment où le potentiel est grand, l’initiative sociale en vue de la promotion de la culture de l’entreprise est limitée. Or, il n’y a pas d’avenir pour une société sans initiative entrepreneuriale.


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