“L’entreprise de presse a besoin de mobilisation”
Bahia Amrani. Présidente de la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ)
Bahia Amrani, directeur de publication de l’hebdomadaire Le Reporter, est la nouvelle présidente de la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ). Son mandat sera placé sous le signe de la relance de l’entreprise de presse et le repositionnement de son modèle économique. Bahia Amrani estime que le secteur vit une étape cruciale et que les challenges sont nombreux. Entretien.
Vous succédez à Noureddine Miftah après avoir été dans son bureau durant trois mandats. Est-ce donc la continuité ?
J’étais, en effet, membre du bureau exécutif de la FMEJ (Fédération des éditeurs de journaux) sous la présidence de Noureddine Miftah ainsi que sous celle de Khalil Hachimi et sous celle de Mounaïm Dilami. Ce sont les 3 présidents que nous avons eus depuis la création de la FMEJ, il y a 16 ans. Et pour avoir travaillé avec les 3, je peux vous dire que la continuité, en l’occurrence, ne veut pas dire grand-chose. Bien sûr, la FMEJ a des objectifs immuables. Ils sont inscrits dans ses statuts. Il y a une continuité certaine. Mais le contexte, lui, n’est pas immuable. Le secteur est en constante évolution avec une accélération ces dernières années qui nous met face à de nouveaux défis. Noureddine Miftah est un excellent juriste. Sous ses mandats, la FMEJ a été principalement active sur le terrain juridique pour accompagner la réforme du Code de la presse. Il s’est brillamment acquitté de cette tâche. Il s’est aussi beaucoup investi dans la mise à niveau du secteur…Certains chantiers restent ouverts par la force des choses. Nous y poursuivrons donc nos efforts mais aujourd’hui, il y a de nouvelles priorités…
Quelles sont ces priorités ?
Le secteur de la presse subit un double impact. Celui du ralentissement de l’économie. Bank Al-Maghrib vient de confirmer ce ralentissement à travers les chiffres du taux de croissance sur 3 ans et celui de la profonde transformation du paysage médiatique sous l’effet des nouvelles technologies. Le secteur souffre donc. Et la priorité des priorités est là. Les adhérents de la FMEJ sont des journalistes mais aussi des employeurs. Ils sont donc sur deux chantiers, celui de la presse et celui de l’entreprise de presse. La FMEJ compte 101 médias adhérents, dont 27 au Conseil fédéral et 13 au bureau exécutif, présidence comprise. Un bureau fort qui compte plusieurs figures connues de la presse. Les deux précédents présidents Mounaïm Dilami (Groupe EcoMédia) et Noureddine Miftah (Al Ayam), Fatema Zohra Ouriaghli, vice-présidente du Conseil national de la presse (groupe Finances news), Mohamed Selhami (Maroc Hebdo), Samir Chaouki (Les Inspirations ÉCO), Mohamed Haitami (Groupe Le Matin), Mohamed Najim (Goud) et de nouveaux arrivés au bureau comme Nabila Fathi (La Vie Éco), Maria Moukrim (Febrayer.com), Mokhtar Laghzioui (Al Ahdath Al Maghribia), Youssef Chmirou (Zamane), Mhamed Ababou (Afriquenews). La priorité est de nous mobiliser tous ensemble à la fois pour une presse sérieuse et pour une entreprise forte. C’était le thème de notre congrès. Or, aucune presse ne peut être véritablement sérieuse si elle n’en a pas les moyens. Aujourd’hui, plus que jamais, l’entreprise de presse a besoin de mobilisation. Des milliers d’emplois directs et indirects sont en jeu. Ceux des journaux et des entreprises de presse, mais aussi ceux des métiers qui y sont liés : les imprimeurs, les distributeurs, les agences de communication, les kiosques… Cela fait beaucoup de monde qui voit son avenir menacé. Nous nous répartirons les tâches. Nous arrêterons un programme qui sera notre feuille de route. Nous nous y mettrons dès après les fêtes de fin d’année, inchallah. Et nous espérons être aidés par tous ceux qui croient en notre sérieux et qui sont convaincus – ou que nous convaincrons – de l’utilité de la presse sérieuse pour contrecarrer les nombreuses déviations devenues aujourd’hui une véritable menace pour la société (intox, instrumentalisation, fake news…).
Le secteur de la presse a vécu une année 2018 très difficile. Quelles sont vos prévisions pour l’année 2019 ?
Nous avons bon espoir que la situation s’améliore. SM le roi tente de relancer l’économie, en secouant les secteurs, l’un après l’autre. De même que le ralentissement de l’économie a impacté notre secteur négativement, sa relance devrait l’impacter positivement. Nous l’espérons. Si nous n’avions aucun espoir, nous ne continuerions pas à nous battre, tous autant que nous sommes. Au sein de la FMEJ et au sein de nos entreprises.
Une équipe rajeunie, des défis majeurs
Le nouveau Bureau exécutif de la FMEJ se caractérise par l’élection de jeunes éditeurs qui font leur entrée au sein de l’instance dirigeante de la fédération, avec le renforcement de la composante féminine. Les nouveaux entrants que sont Nabila Fathi, Maria Moukrim, Mokhtar Laghzioui, Mhamed Ababou et Youssef Chmirou constituent la moitié du bureau. Le président sortant, Noureddine Miftah, reste au sein du bureau, ce qui assurera une continuité dans la gestion des dossiers en cours. Il faut aussi noter le retour du doyen Abdelmounaim Dilami, ainsi que le renouvellement du mandat de Fatima Zahra Ouriaghli, Samir Chaouki, Mohamed Selhami, Ahmed Najim et Mohamed Haitami. Les chantiers en cours de la FMEJ sont la mise en place d’un fonds de lecture, le renouvellement du contrat-programme en plus des dossiers chauds à étudier comme la fiscalité de l’entreprise de presse, le soutien à l’investissement en capital technique et la création d’un cadre réglementaire pour la protection des médias marocains face aux GAFA.