Nomination aux hautes fonctions : Une commission d’enquête parlementaire en vue
Le gouvernement est accusé de privilégier les intérêts partisans dans les nominations aux hautes fonctions. Le groupe parlementaire du PAM à la Chambre des représentants entend demander la formation d’une commission d’enquête parlementaire à ce sujet.
Le gouvernement est souvent interpellé par les parlementaires des deux chambres sur les nominations aux hautes fonctions. L’Exécutif est pointé du doigt par l’opposition qui critique le clientélisme partisan lors des nominations. Il faut dire que depuis l’adoption du nouveau cadre juridique relatif aux nominations aux fonctions supérieures en 2012, on a de plus en plus tendance à politiser l’administration en nommant des cadres appartenant aux partis politiques de la majorité gouvernementale. Une situation vertement critiquée de part et d’autre car on estime que le fonctionnaire doit être neutre et impartial, même si l’administration est un organe d’exécution des orientations stratégiques du gouvernement. Combien représentent les nominations partisanes de l’ensemble des 967 nominations aux hautes fonctions depuis 2012 ? Difficile de répondre à cette question. Le groupe parlementaire du parti du tracteur à la chambre basse entend demander la formation d’une commission d’enquête parlementaire pour ce dossier et espère être soutenu par toutes les composantes politiques de l’institution législative.
Égalité des chances
Le ministre de la Réforme de l’administration et de la fonction publique estime qu’en cas de constitution de la commission d’enquête parlementaire, les députés devront s’intéresser aux compétences des hauts fonctionnaires, et non à leur appartenance politique. Mohamed Benabdelkader (photo) a souligné, à plusieurs reprises, qu’il ne fallait pas «exclure les compétences relevant des partis politiques des recrutements aux fonctions supérieures». Mais il ne faut pas non plus les privilégier. À compétences égales avec des «concurrents» appartenant à des partis politiques de la majorité gouvernementale, de nombreux fonctionnaires apolitiques se sentent aujourd’hui exclus de la procédure de nomination aux hautes fonctions. Pourtant, les dispositions constitutionnelles sont on ne peut plus claires. L’article 92 de la Constitution met l’accent sur les critères d’égalité des chances, de mérite, de compétences et de transparence. Le décret de nomination aux fonctions supérieures doit être révisé pour bien définir les critères et les unifier entre les départements ministériels. Cela fait des mois que Benabdelkader a annoncé que le gouvernement planchait sur cette révision qui tarde à voir le bout du tunnel. Le responsable gouvernemental reconnaît que les critères ayant trait aux compétences scientifiques pour le recrutement dans les hautes fonctions ne sont pas unifiés entre les départements. Parfois, on a l’impression que les conditions exigées pour certains postes sont taillées sur-mesure pour privilégier un profil particulier. Ainsi, la réforme s’impose pour faire valoir les principes d’objectivité et de transparence dans les recrutements.
S’inspirer du privé
D’aucuns plaident pour la création d’une commission indépendante des nominations dans les hautes fonctions comme ce qui se fait sous d’autres cieux. Celle-ci sera chargée de soumettre au gouvernement une liste des profils pour les postes à pourvoir. Parmi les pistes recommandées par le forum national sur la haute fonction figure l’élaboration d’un descriptif des compétences pour chaque type de haute fonction, de sorte à rationaliser la gestion des ressources humaines et atteindre l’efficacité souhaitée dans la gestion publique. Le gouvernement est appelé à élaborer un guide pour définir minutieusement les missions et les rôles des hauts fonctionnaires dans les divers secteurs relevant de l’administration publique. Il est aussi proposé de s’inspirer du secteur privé dans la démarche de recrutement des fonctionnaires en vue d’opter pour des choix ciblés de compétences en interne et en externe. Par ailleurs, outre la révision du système de sélection des hauts fonctionnaires, la réforme en vue tend à opérer des transformations dans la gestion en instaurant un nouveau système de contractualisation. Une charte contractuelle devra être mise en place pour fixer un référentiel unifié précisant les principes et les règles encadrant l’action des responsables publics, leurs missions, leurs droits et leurs devoirs ainsi que les règles déontologiques professionnelles.
L’ambition féminine se heurte au plafond de verre
Sur les 967 nominations aux hautes fonctions depuis 2012, les femmes représentent uniquement 12,09%. On est loin de la parité escomptée. Cette situation n’est pas due, selon le ministre de la Réforme de l’administration et de la Fonction publique, à l’exclusion car dans le système juridique et constitutionnel, «il n’existe aucun mécanisme d’exclusion». Le plafond de verre est difficile à briser en dépit des efforts déployés. Le taux de féminisation des postes de responsabilité et emplois supérieurs dans la fonction publique ne dépasse pas 22,2% en 2016. Ce chiffre dégringole à 15,28% dans les emplois supérieurs, selon une étude réalisée par l’observatoire de l’emploi public relevant du ministère de la Réforme de l’administration et de la fonction publique. Au niveau central, le taux de féminisation des postes d’emploi est plus élevé que celui des services déconcentrés. Les administrations centrales comptent, en effet, 31% de femmes dans les postes de responsabilité contre uniquement 18% sur le plan déconcentré.