Affaire SAMIR.. Le gouvernement sévèrement critiqué
Des organisations politiques et associatives à Mohammedia reprochent au gouvernement sa «neutralité négative» dans le sauvetage de La SAMIR.
Ils appellent à «un soutien actif aux candidats de la reprise».
Il est 17h45, au modeste siège de la CDT-Mohammédia, dans le quartier El Alia, le Front local pour le suivi de La SAMIR (Front) organisait, le 17 avril, une conférence de presse pour faire le point sur la situation de l’entreprise et tirer «la sonnette d’alarme face aux pertes constatées depuis la fermeture de la raffinerie».
Les membres du Front, accompagnés des salariés de l’entreprise de raffinage accueillent les journalistes avec enthousiasme. Une présence interprétée comme une marque de soutien, dans le contexte difficile de cette crise qui dure depuis 2 ans et demie. Durant cette période, des soutiens n’ont pas été toujours au rendez-vous, de quoi désabuser les salariés.
Un des soutiens qui a manqué, durant cette période, est celui du gouvernement, selon le Front. «Vu l’importance stratégique du secteur de l’énergie, nous appelons l’État à la nationalisation du secteur, ou l’entrée de l’État comme actionnaire de La SAMIR sous forme de conversion de sa dette», propose Abdellatif Belahcen, coordinateur du Front. Pour ce dernier, faute d’une intervention de l’État, la ville et les salariés de La SAMIR continueront de broyer du noir.
Pertes et profits
Houcine El Yamani, secrétaire général du Syndicat national des industries du pétrole et gaz affilié à la CDT, a troqué sa casquette de syndicaliste et de salarié de La SAMIR pour brosser un tableau de la situation économique de la ville de Mohammédia suite à la fermeture de la raffinerie.
«La ville a perdu une valeur ajoutée de 1 milliard DH que générait La SAMIR sous forme de salaires et de prestations délivrées à la compagnie par les sociétés locales», estime El Yamani. À cela, s’ajoutent les pertes en termes de revenus fiscaux. Sur le plan social, tous les participants à cette rencontre parlent d’une «hécatombe».
3.500 emplois ont été perdus immédiatement, chez les sous-traitants, après l’arrêt de la raffinerie. «Le chômage des jeunes progresse à cause des pertes d’emploi dans la sous-traitance. 10% des habitants de la ville risquent de perdre leurs revenus. Ce chiffre représente les 900 salariés de La SAMIR et leurs familles», recense ce membre du Front. Et d’ajouter : «Nos revenus ont été réduits de 45%, à cause de l’arrêt des primes. Et 1.500 retraités sont sans couverture médicale». À cela s’ajoute, «la perte de 1.200 stages assurés annuellement au profit d’étudiants marocains au sein de La SAMIR», indique El Yamani. «Mohammédia, c’est La SAMIR. Sans cette unité, la ville perdra son âme», prévient-il.
Sur le plan économique, et selon les analyses du Front, «les Marocains ont déjà payé le prix du rachat de La SAMIR», annonce ce regroupement local. 22 milliards DH, c’est le montant qu’auraient payé les automobilistes suite à la libéralisation des prix, coïncidant avec la fermeture de La SAMIR.
Aujourd’hui, la raffinerie est valorisée à 21,5 milliards DH, selon les estimations réalisées par l’audit commandité par le Tribunal de commerce de Casablanca. «Le gouvernement refuse aujourd’hui d’intervenir dans ce dossier et fait preuve d’une neutralité négative. En même temps, les Marocains ont été saignés à blanc par les importateurs et les distributeurs. Les consommateurs ont déjà payé le prix, sans pouvoir reprendre cet actif national entre leurs mains», s’indigne El Yamani.
Contacté par Les Inspirations ÉCO, le Groupement des pétroliers au Maroc (GPM) est demeuré injoignable. Le Front lance un appel au gouvernement pour «une forte implication dans la phase de reprise». El Yamani considère que «l’acquisition de la raffinerie n’est pas une opération ordinaire, elle ne peut se faire qu’à travers un véritable soutien étatique au futur repreneur. Le gouvernement assiste comme simple spectateur et se cache derrière le processus judiciaire.
L’Exécutif semble être prêt à assumer les frais des obsèques de La SAMIR», implore-t-il. Et de conclure : «Nous demandons au gouvernement de mettre les choses au clair. Nous souhaitons savoir si le Maroc a toujours une ambition de développer une industrie du raffinage. En cas de réponse négative, nous pouvons dire adieu La SAMIR et se préparer à enterrer ce fleuron industriel national».
L’offre irakienne en cours de préparation avec BB Energy n’a pas encore été déposée, elle attendrait un signal du gouvernement…