Les pharmaciens rattrapés par les droits de timbre
Le seuil de 2 MDH de chiffre d’affaires par an étant supprimé, les officines devront déclarer et s’acquitter des droits de timbres selon une fréquence mensuelle, à l’instar des autres contribuables qui gèrent des transactions en espèces. Incapables de répercuter cette charge fiscale sur les prix réglementés des médicaments, la Fédération des pharmaciens réclame une exonération pure et simple des droits de timbre.
C’est une mesure qui risque de faire des remous chez les contribuables concernés. En effet, selon le nouveau dispositif introduit par la Loi de finances 2018, les entreprises qui gèrent des transactions réglées en espèces devront effectuer leur déclaration et payer les droits de timbre chaque fin de mois et non plus une fois tous les trimestres. Mieux encore, l’obligation de la déclaration mensuelle n’est plus limitée aux seuls contribuables dont le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 2 MDH. Désormais, toutes les entreprises se faisant régler en espèces, quel que soit leur chiffre d’affaires, sont donc concernées par cette mesure et devraient, en principe, effectuer leur déclaration au plus tard ce mercredi 31 janvier, sachant que les droits de timbre perçus sur les opérations payées en liquide sont fixés à hauteur de 0,25%. Cette mesure ne fait pas l’unanimité chez les contribuables. Elle n’a pas été du goût des pharmaciens que se sont d’ailleurs mobilisés pour faire entendre leurs voix. La Fédération nationale des syndicats des pharmaciens du Maroc (FNSPM) vient d’adresser une lettre dans ce sens au chef du gouvernement, Saâdeddine El Othmani, lui demandant «une suspension du recouvrement de cette taxe en attendant l’introduction d’un amendement à la Loi de finances 2018 officialisant l’exonération des médicaments du paiement des droits de timbre». L’argument avancé par la FNSPM s’appuie sur les spécificités intrinsèques aux officines. «Notre métier se distingue des autres professions libérales, des points de commerce et de la grande distribution, dans la mesure où nous ne pouvons pas répercuter cette taxe sur les patients, dont la majorité se trouve dans une situation sanitaire et psychique ne pouvant plus supporter une charge additionnelle au prix des médicaments», peut-on lire dans la correspondance adressée au chef de l’Exécutif. Cette mesure, prévient le président de la FNSPM, Abdelhamid Nacer, risque de semer la zizanie au sein des pharmacies.
La FNSPM n’en est pas à sa première démarche de sensibilisation à ce sujet. Elle avait déjà amorcé une tentative en 2015 auprès de l’administration fiscale, sollicitant une exonération pure et simple des médicaments des droits de timbre. La FNSPM veut que l’on trouve une solution adaptée à ce «problème», en conformité avec la politique des prix des médicaments. Pour défendre leur cause, les pharmaciens brandissent la carte de la tarification fixée par une commission interministérielle dans une logique de facilitation d’accès aux médicaments en faveur de patients défavorisés, tout en maintenant l’équilibre du budget de l’AMO. Autre argument avancé, le fait que la TVA appliquée sur les médicaments depuis 2009 serait «mal perçue» par les patients et que tout rajout de taxe pourrait être considéré comme «une imposition de la maladie». En réponse à cette requête, la Direction générale des impôts (DGI) s’était contentée de clarifier les dispositions du Code général des impôts en la matière. Pour que le droit de timbre soit exigible, souligne la DGI, il faut un écrit ou tout titre qui constate une libération ou une décharge de sommes payées en espèces, quelle que soit la forme de cet écrit (facture, reçu, billet, quittance, etc). C’est le cas des factures délivrées par les commerçants, des reçus de loyers, des billets de transport public de voyageurs, des quittances de paiement d’eau, d’électricité et de téléphone, etc. «Tous ces actes sont soumis au droit de timbre des quittances, car ils constituent une quittance, une libération ou décharge de sommes payées en espèces», avait précisé l’administration fiscale. Les quittances de sommes payées par chèque, par virement ou par mandat, sont quant à elles exonérées des droits de timbre. Une dérogation qui vise surtout à encourager l’usage de moyens de paiements qui favorisent la transparence et la traçabilité des transactions commerciales.