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Mobilité des fonctionnaires : Une réforme mort-née ?

La réforme controversée de la mobilité des fonctionnaires est au point mort. Presque deux ans après l’adoption du décret instaurant cette mesure, une évaluation s’impose pour déterminer les causes de son échec et réviser le système.

Décidée en 2015, la réforme portant sur la mobilité des fonctionnaires peine à être mise en œuvre. L’application du décret y afférent est au point mort malgré les mesures mises en place dès 2016, notamment la bourse des fonctionnaires qui devait être composée de profils mis par certaines administrations à la disposition d’autres départements de la fonction publique. La mise en œuvre d’une politique réussie de redéploiement nécessite l’évaluation par chaque administration de ses ressources humaines pour définir les compétences dont elle n’a plus besoin et, le cas échéant, bénéficier de nouveaux profils provenant d’autres départements.

L’offre inexistante
Hélas, la procédure n’a pas fonctionné en dépit de l’optimisme ayant accompagné son lancement. L’échec de la concrétisation de la mobilité nécessite une évaluation pour déterminer les véritables freins à cette réforme redoutée par les fonctionnaires. Contrairement aux attentes, peu d’administrations ont porté un intérêt au nouveau dispositif. Celles qui ont adhéré au processus ont plutôt axé leurs dossiers sur leurs besoins en fonctionnaires alors que la condition sine qua non pour la réussite d’une telle mesure est tributaire non seulement de la demande, mais surtout de l’offre. Aussi, la commission nationale, composée des ministères de la Fonction publique, des Finances, de l’Intérieur ainsi que des départements concernés, qui devait se pencher sur l’offre et la demande de l’ensemble des départements ministériels n’a-t-elle pu entamer sa mission pour décider des premiers transferts.

Où se localise le blocage ?
Le manque de volonté des administrations est pointé du doigt. Les responsables dans les différentes administrations brandissent la carte sociale pour éviter la mutation de leurs fonctionnaires. Mais, le mécanisme de mobilité qui s’inscrit dans le cadre du grand chantier de la régionalisation avancée et de la déconcentration administrative ne pourra jamais voir le jour à cause de ce raisonnement, d’après les initiateurs de cette réforme qui est visiblement mort-née. Les administrations sont appelées à se séparer des fonctionnaires dont le profil ne sert plus leur développement et de recruter de nouvelles compétences correspondant à leurs activités. Les demandes doivent être pointues pour rehausser le rendement de l’administration.

Un système à réviser
Il apparaît clairement que le système devra être révisé par l’actuel gouvernement pour pouvoir atteindre les objectifs escomptés en dissipant les craintes des fonctionnaires et en prenant en considération, outre l’intérêt général, celui du fonctionnaire (incitations, promotion du parcours professionnel, enrichissement de l’expérience…). D’après le décret de la mobilité, les fonctionnaires peuvent être réaffectés d’une administration à une autre ou d’une collectivité territoriale à une autre. La porte est ouverte aussi pour les transferts entre administration publique et collectivité territoriale. Cette mesure vise à satisfaire les besoins de certaines administrations sans procéder systématiquement à de nouveaux recrutements et de corriger, le cas échéant, les déséquilibres constatés sur les plans aussi bien régional que sectoriel.

Disparités régionales
Au niveau national, le Maroc compte près de 583.000 fonctionnaires civils, soit environ 26 fonctionnaires de l’État pour 1.000 habitants. Un taux de 90% du personnel civil de l’État est réparti sur sept départements dont l’Éducation nationale et la formation professionnelle (49,4 %), l’Intérieur (20,5 %) et la Santé (8,4 %). Sur le plan territorial, les disparités en termes de répartition des fonctionnaires sont palpables. Certaines régions sont mieux pourvues en ressources humaines que d’autres. 60% du personnel civil se concentrent dans quatre régions avec près de 351.000 fonctionnaires. La Région Rabat-Salé-Kénitra arrive en tête avec 21,9%, suivie de Casablanca-Settat (15,8%). Quant à la Région Tanger-Tétouan-Al Hoceima qui devrait être un nouveau pôle économique, elle accueille 9% des fonctionnaires uniquement. La région la moins dotée en personnel civil est celle de Dakhla-Oued Ed-Dahab avec un taux de 0,7%. 


Les syndicats aux aguets

Certaines administrations redoutent la confrontation avec les syndicats qui désapprouvent cette réforme. Dès l’adoption du décret y afférent, les syndicalistes ont affiché leur rejet de cette mesure. Les fonctionnaires craignent des mutations discrétionnaires d’autant plus que le redéploiement à l’initiative de l’administration ne nécessite pas l’accord du fonctionnaire concerné. La mobilité suscite une grande appréhension de la part des partenaires sociaux qui appellent à la révision du nouveau cadre juridique ayant trait au redéploiement des fonctionnaires en vue de non seulement préserver les droits des salariés, mais aussi améliorer la qualité du service public. Le département de tutelle, a dès le départ, balayé d’un revers de la main toutes les critiques en précisant qu’outre une commission nationale pour l’étude en profondeur de l’offre et la demande des administrations, une commission paritaire sera chargée d’examiner les dossiers. Mais, force est de reconnaître que la conciliation de l’intérêt de l’administration avec celui du fonctionnaire est une équation difficile à résoudre. 



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