Finance participative : Quel marché interbancaire ?
Si aujourd’hui les mécanismes de la gestion de la liquidité des banques participatives sont connus de part la pratique dans d’autres pays, ceux qui vont être adoptés au Maroc ne sont toujours pas connus. La question fiscale est aussi à traiter.
La gestion de la liquidité est la question qui taraude l’esprit des futures banques participatives marocaines. Encore non-opérationnelles, celles-ci lancent déjà la réflexion sur le marché interbancaire qui doit être mis en place et les mécanismes et outils pour assurer son fonctionnement, à l’occasion d’un événement organisé jeudi par l’ESCA. Les différents intervenants, dirigeants respectifs d’Assafaa Bank (Attijariwafa bank), Umnia Bank (CIH), Bank Al Tamwil wal Inmaa (BMCE) et Bank Al Yousr (BCP) avec le modérateur qui n’est autre que Ali Idrissi Alami, associé fondateur d’Optima Finance Consulting, ont donc passé en revue les différentes solutions qui se pratiquent dans différents pays tout en soulignant, que le Maroc, étant le dernier pays musulman à adopter la finance islamique, devrait profiter des expériences des autres où cette finance se pratique depuis plusieurs décennies. Les outils utilisés, notamment pour se refinancer sont nombreux.
Les intervenants en ont cité le Qard hassan, prêt sans intérêt utilisé pour combler les déficits de financement à court terme, la Moudaraba au quotidien. Il est aussi question des contrats de financement interbancaire via la Moucharaka ou encore la Mourabaha.
Toutefois, pour que ces contrats soit valables comme moyen de refinancement des banques, «il faut que le Conseil supérieur des Ouléma (CSO) donne son avis sur ces moyens». Il est par ailleurs prévu dans la loi l’existence des comptes d’investissement interbancaires. Le mécanisme de Salam, contrat de vente avec livraison différée de la marchandise, a été également évoqué par les intervenants comme une solution de refinancement. Quant au contrat Tawaroq (contrats de vente de sous-jacents pour disposer de liquidité) Abdessamad Issami, président du directoire d’Umnia Bank a précisé qu’il a été formellement interdit par le Comité sharia du CSO.
Mais ce qui est sûr c’est qu’au moment du démarrage, la situation qui régnera est celle de la surliquidité, et la question qui se posera est le placement de ce surplus pour générer des revenus. L’émission des sukuk souverains pour créer un historique pour la courbe des taux est très attendue, car elle constituera le premier véhicule de placement. Mais il ne sera pas suffisant, étant donné que l’État n’a besoin que de 70 MMDH pour toute l’année et qui seront levés de différentes manières (émission à l’international, prêts bilatéraux, Bons de Trésor sur le marché local et éventuellement les sukuk).
Les directeurs s’attendent à ce que des émetteurs privés ne tardent pas pour émettre leurs propres sukuk et permettre d’asseoir une profondeur de marché. Les OPCVM sharia compliant ou encore les OPCI sont aussi des véhicules intéressants, bien que pour l’heure, la fiscalité de ces trois véhicules n’est pas encore fixée. Idrissi Alami a tenu enfin à souligner que malgré l’existence de ces différentes solutions la question de la gestion du risque de la liquidité des banques islamiques n’est pas réglée une bonne fois pour toute, même dans les pays où cette finance est très avancée.