Maroc

«Les zones rurales ont été négligées»

Ahmed Benabadji, consultant en stratégie et co-fondateur d’Open-Villages

Ahmed Benabadji a lancé Open Villages, une initiative qui consiste à accompagner les populations rurales dans le développement de leurs régions. Le but étant de permettre aux habitants des villages de devenir autonomes. Après une première expérience dans le Haut Atlas, cinq villages bénéficient actuellement de cette initiative et 100 autres villages sont en lice.

Les Inspirations ÉCO : Parlez-nous de cette initiative…
Ahmed Benabadji : Open Villages est une initiative collective bien qu’elle ait été, à la base, une idée familiale. Ce projet est né de la volonté d’apporter un soutien à Tizi n’Oucheg, un village dans le Haut Atlas. La démarche que nous avons suivie a consisté à voyager dans le monde entier pour étudier les projets solidaires en Afrique, en Asie et en Amérique Latine. Nous avons fini par importer ce concept original et nous avons commencé par le déployer ici Au Maroc. Après une première expérience, cent villages se sont inscrits afin de bénéficier de cette initiative.

Concrètement, comment se déroule le processus?
Nous commençont par sélectionner une région ou un village dans le besoin. Nous procédons ensuite par répertorier de manière exhaustive toutes les ressources. Cela peut aller du relief jusqu’aux plantes médicinales ou sauvages. À titre d’exemple, nous avons remarqué que la mûre sauvage n’est pas exploitée au village Tizi n’Oucheg. Nous avons donc monté un projet qui a permis au villageois, au bout de la deuxième année seulement, de produire 3.000 pots de confiture à base de ce fruit. Ensuite, nous étudions les besoins des villageois et discutons ensemble des actions que nous pouvons mener. L’objectif est de mettre en forme, ensemble, une vision de l’avenir du village et mettre en place un plan d’actions. Notre démarche consiste à encourager les villages à devenir autonomes et non d’apporter des fonds sans que cela puisse permettre aux villages d’être indépendants et autonomes.

Vos projets durent combien de temps ?
Deux ans. Au terme de cette période, il faut que le village soit complètement autonome. La réussite d’un projet Open Villages est donc tributaire de la capacité du village à devenir capable d’affronter les aléas de son environnement. Plusieurs projets peuvent être menés en simultané. Au village cité, nous avons aussi lancé un projet de fabrication de tapis à base de déchets d’une usine de cuir casablancaise. Ce projet, à la fois écologique, économique et solidaire est un exemple de ces régions reculées mais dotées d’un grand potentiel de développement. Actuellement, cinq villages ont rejoint l’initiative et cent sont en lice pour nous rejoindre.

D’où est venue l’idée de lancer cette initiative ?
Dans un voyage autour du monde d’un an, que j’ai effectué en famille, nous avons étudié plusieurs expériences où l’approche Open Villages a été une réussite. Ces expériences aussi diverses que créatives ont permis à plusieurs villages en Asie et en Amérique latine  d’évoluer. Nous avons évalué plusieurs autres projets et jugé les critères généraux de réussite et d’échec. Nous avons donc appliqué cette méthode à notre contexte marocain. Souvent, les habitants des villages que nous approchons, ne disposent pas de ce regard extérieur qui leur permet de valoriser, à juste titre, le potentiel de leur région. C’est pour cela que l’un des plus importants outils d’Open Villages est la réalisation d’un Mapping des ressources naturelles et humaines de chaque village.

Vous avez bénéficié donc du partage de connaissances de ces projets mondiaux ?
Oui. Au retour au Maroc, nous avons, nous aussi, tenu à partager ce que nous avons appris de ces projets de développement. C’est le premier niveau d’Open Villages. Le deuxième niveau consiste à accompagner les villages pour devenir autonomes comme je l’ai expliqué.

Est-ce que les besoins de la population rurale sont les mêmes partout au Maroc ?
Je dirais qu’ils sont les mêmes partout dans le monde, à des degrés différents. De ce point de vue, le Maroc n’est pas différent des autres régions. Les zones rurales ont été négligées et ont souffert d’un mode de développement qui a privilégié les villes. Ce qui a causé, entre autres, un grand manque en matière d’infrastructures et d’éducation.

Selon vous, comment faire sortir le monde rural de sa situation actuelle ?
Il faut que les solutions apportées soient adaptées localement. Il ne faut pas oublier que le taux de l’exode rural est alarmant au Maroc. En dix ans, deux millions de villageois ont rejoint les villes. C’est trois fois le nombre des habitants de la ville d’Agadir. Nous ne sommes pas en mesure de construire une ville de la même taille en dix ans.

Quelle est votre appréciation de la COP22 à laquelle vous avez participée ?
Cet événement a deux grands avantages. Le premier c’est l’opérationnalisation des décisions prises à Paris (COP21) et à ce propos, il faut encore du temps avant de constater des mesures concrètes et si celles-ci seront à la hauteur de l’engagement pris par la communauté internationale. L’avenir nous le dira. Le deuxième intérêt de la COP22 est la prise en compte générale de la nécessité d’une action urgente pour préserver l’environnement et un changement dans notre manière d’utiliser les ressources naturelles. 



Parlement : Moudawana et retraites, les dossiers chauds de la rentrée


Recevez les actualités économiques récentes sur votre WhatsApp Suivez les dernières actualités de LESECO.ma sur Google Actualités

Rejoignez LesEco.ma et recevez nos newsletters




Bouton retour en haut de la page