«Je refuse de glorifier la médiocrité»

Après des années de fidélité au cinéma, le cinéma le lui rend bien, puisque sa chronique FBM à Medi 1 Radio passe en format TV à partir de ce vendredi sur Medi 1 TV. Une aubaine ou un piège, Bilal Marmid nous parle à cœur ouvert de son amour inconditionnel pour le 7e Art, de son parcours, de ses projets et surtout de ses envies de voir un cinéma marocain gagner en maturité. Parlons peu mais parlons cinéma…
Il hait le consensuel, il n’a pas la langue dans sa poche et tous les réalisateurs le redoutent, mais l’admirent. Passer au micro de Bilal Marmid se mérite et laisse des traces. Journaliste, passionné de cinéma et surtout un des meilleurs et des seuls véritables critiques de cinéma au Maroc, Bilal Marmid est un produit de Medi 1 Radio. La chaîne a investi en ce cinéphile et a vu en lui un potentiel énorme, celui de devenir critique cinéma. Le fait est que contrairement à ce que la plupart des gens pensent, on ne s’improvise pas journaliste, encore moins spécialiste de la culture et du cinéma ! Il y a 12 ans, il bénéficie d’une réelle formation à l’étranger sur l’analyse d’image et l’analyse filmique ainsi que la possibilité de couvrir des plus grands festivals, de Berlin à Venise en passant par Cannes ou encore les Oscars. «Ce ne sont pas de simples festivals. Ce sont de véritables écoles !», avoue le journaliste culture qui devient petit à petit et de façon tout à fait naturelle tout en étant cadré, l’un des meilleurs critiques cinéma, si ce n’est le seul au Maroc. Par formation et par vocation comme il se plaît à le dire, Bilal Marmid ne se fait pas que des amis dans le milieu.
Et pour cause : il dit ce qu’il pense ! «Mon second degré ne passe pas toujours bien auprès des autres. Je ne dis pas que ma façon est la meilleure ou que je détiens la science infuse. Tout ce que je sais, c’est que je refuse de glorifier la médiocrité ou d’attaquer ce qui n’est pas médiocre», continue l’animateur avant d’ajouter : «Je ne ramène pas des invités pour les tacler. Ma philosophie, c’est parlons peu, mais parlons vrai». Et c’est une politique qui a marché ces dernières années puisque Bilal a 1.000 chroniques à son actif, a interviewé les plus grands et a terrifié la majorité avec son sens de l’analyse poussée, qui n’épargne personne. Ce qui se fait aisément ailleurs, mais qu’on a encore du mal à accepter au pays. Ailleurs, un cinéaste, même le meilleur peut se voir critiquer, c’est ce qui le poussera à se surpasser à chaque fois pour passer le cap de la critique. Ici, l’animateur avoue avoir fait face à des réalisateurs qui le boudent. «Après il faut avouer que la plupart d’entre eux reviennent lorsqu’il y a une actualité. C’est dire si ça marche…», s’amuse le journaliste lauréat de l’ISIC à l’humour incisif mais toujours pour le bien de tous ! «On a des cinéastes confirmés, on les connaît tous. Mais on en a plein, des anciens, qui ont appris sur le tas, qui ont «plongé» dans le milieu et qui sont devenus des décideurs dans le domaine de la production. Tu deviens crédible de par ton ancienneté. Et je déteste cela», confie Bilal Marmid qui n’a pas foi en la célébrité ou la crédibilité par l’ancienneté.
Seul le talent compte. «Il n’y a jamais eu un réel suivi dans le cinéma au Maroc… On a toujours traité tous les réalisateurs de la même façon, et je trouve ça médiocre. On ne peut pas mettre tout le monde dans le même box. Si on veut éduquer les gens, il faut critiquer, pousser la critique pour avancer… ». Celui qui s’inspire des réalisateurs comme Lars Van Trier ou encore le cinéma scandinave en général, le cinéma coréen et japonais ou encore des pointures comme Audiard, Haneke ou Tarentino, ne peut pas se contenter de peu. Pour lui, le cinéma fait voyager. «On ne se sent pas dans un film quand on voit du Lars Van Trier. J’arrive rarement à être transporté, même si les films sont techniquement bons. Il avait dit d’ailleurs que le cinéma est comme un caillou dans la chaussure. Il a tout compris», explique le critique cinéma qui regarde plus de 350 films par an, qui vit cinéma, mange cinéma et dort cinéma depuis son enfance à Safi où il n’avait qu’une seule obsession : avoir trois dirhams dans sa poche pour aller voir un film. «Aujourd’hui, on a toute une nouvelle génération qui ne sait pas à quoi ressemble une salle de cinéma ! », s’indigne- t-il. Et c’est pour cela que Bilal Marmid se bat honnêtement et modestement pour que la culture éduque, pour que la critique construise.
Avec son nouveau format à la télévision, le critique cinéma touchera certainement plus de gens, plus de jeunes… Et c’est tant mieux ! À la base, cette émission est un concept visuel. Les gens, à la radio, voulaient «voir mes mimiques et la réaction des invités. Les vidéos ont toujours eu beaucoup de succès. Ce n’est qu’une suite logique, je pense. Ma seule envie, c’est de respecter mon public et de me respecter moi-même. Je ferai le maximum pour que cela marche…Je pense qu’il faudra du temps pour digérer le concept et l’intégrer».