Parlement : Vers une session extraordinaire ?
Alors que les deux chambres du Parlement sont en train de clôturer leurs dernières sessions ordinaires qui correspondent à la fin de la législature en cours, plusieurs lois organiques sont en train d’être validées par le gouvernement. La convocation d’une session extraordinaire est désormais à l’ordre du jour afin de se conformer aux dispositions de la Constitution, même si le contexte électoral actuel n’est pas des plus opportuns pour des textes à caractère stratégique.
La Chambre des conseillers va clôturer, ce vendredi, sa session ordinaire pour la dernière année de la législature en cours. Elle rejoint ainsi la Chambre des représentants qui a déjà procédé, mercredi dernier, à la clôture de la sienne, ce qui consacre enfin la fin des sessions ordinaires du Parlement pour la législature 2011-2016 qui arrive à terme au mois d’octobre prochain. La prochaine session ordinaire, dite budgétaire, qui interviendra en octobre prochain, marquera, en effet, le début d’une nouvelle législature à la suite des élections législatives du 7 octobre prochain.
C’est donc le moment pour les parlementaires de se dire adieu après cinq années de travail, au cours desquelles plusieurs lois organiques ont été adoptées conformément aux dispositions de la Constitution de 2011 qui dispose, en son article 86, que «les projets de lois organiques prévus par la présente Constitution doivent avoir été soumis pour approbation au Parlement dans un délai n’excédant pas la durée de la première législature suivant la promulgation de ladite Constitution». Sur la vingtaine de textes, prévus par la loi fondamentale et qui tombent sur le coup de ce cas de figure, pas moins de 18 lois organiques ont été adoptées.
Il ne reste plus que quelques textes, notamment deux projets de lois organiques portant sur la mise en œuvre du caractère officiel de l’amazigh et le Conseil national des langues et de la culture marocaine, ainsi que la loi organique sur la grève. Les deux premiers textes ont été adoptés, mercredi en Conseil de gouvernement et devront passer le cap du Conseil des ministres avant leur dépôt au Parlement. Pour ce qui est de la loi organique sur la grève, il sera incessamment soumis à l’adoption du gouvernement qui a mis en place une commission interministériel avant de suivre la même procédure.
Course contre la montre
Comme on le voit, c’est une véritable course contre la montre à laquelle se livre le gouvernement afin d’être dans les temps, c’est-à-dire soumettre les derniers textes au Parlement avant la fin de son mandat.
Du côté de l’Exécutif et en dépit du temps limité qui court et la portée stratégique de certaines lois, comme celle sur le droit de grève, qui annonce de chaudes empoignades, on rassure que tout sera fait dans le temps. Quid alors de l’adoption de ces textes au Parlement ? C’est là, la grosse interrogation de l’heure. Alors que les deux chambres du Parlement sont en train de clôturer leurs dernières sessions au titre de la législature, la convocation d’une session extraordinaire pour adopter les derniers textes a refait surface au sein de l’Hémicycle.
Selon certains parlementaires, c’est même inévitable au vu du travail qui reste à faire. C’est d’ailleurs pour cette raison que plusieurs commissions au niveau des deux chambres ont programmé des séances après la clôture de la session afin de se pencher sur des projets ou propositions de loi qui restent en attente. Les parlementaires n’écartent plus cette éventualité même si, officiellement, rien n’est encore décidé.
En ce sens, c’est l’article 66 de la Constitution qui stipule que «le Parlement peut être réuni en session extraordinaire, soit par décret, soit à la demande du tiers des membres de la Chambre des représentants ou de la majorité de ceux de la Chambre des conseillers». De même, les sessions extraordinaires du Parlement se tiennent sur la base d’un ordre du jour déterminé et lorsque l’ordre du jour est épuisé, la session est close par décret. Si les parlementaires n’écartent pas le recours à cette procédure, la date pour la convocation de la session extraordinaire est aussi sujette à débat.
Certains estiment qu’il serait opportun que la session se tienne dans les prochains jours pour qu’enfin les parlementaires se consacrent à la préparation des élections alors que d’autres mettent en avant que rien ne presse et qu’elle pourrait bien se tenir en septembre prochain. Le deuxième scénario paraît le plus probable puisque, même en cas de convocation de la session, il faudrait bien que le gouvernement soumette les textes en instance.
Contexte électoral
La balle est donc dans le camp de l’Exécutif qui dispose de toute la latitude pour convoquer ou non une session extraordinaire du Parlement. Le gouvernement est certes sous la pression des dispositions de la Constitution mais aussi du temps, mais les textes ne lui imposent guerre l’adoption parlementaire avant la fin de la législature. Juridiquement, et selon les termes de la Constitution, il a l’obligation de soumettre les lois organiques à l’approbation du Parlement.
En dépit de cette latitude, la convocation d’une session extraordinaire dans un contexte électorale avec une campagne qui a démarré bien avant l’heure, lie le gouvernement et le Parlement. À juste titre, le souverain a d’ailleurs tenu à rappeler à l’ordre les deux institutions, à l’occasion de l’ouverture, en octobre 2015, de la première session de la cinquième année législative de la neuvième législature. «Le travail qui vous attend pendant cette année pour parachever la mise en place des institutions ne peut tolérer la perte de temps occasionnée par les conflits marginaux», avait souligné Mohammed VI qui a d’ailleurs «jugé nécessaire de rappeler au gouvernement et au Parlement la nécessité de se conformer aux dispositions de l’article 86 de la Constitution, qui fixe le terme de cette législature comme dernier délai pour soumettre les projets de lois organiques à l’approbation du Parlement».
Depuis, le gouvernement et le Parlement ont mis le paquet pour faire adopter les derniers textes qui restent et c’est ce qui plaide en faveur de la convocation d’une session extraordinaire afin de finaliser le travail. Autrement, et comme nous l’a confié un parlementaire, «cette neuvième législature qui se termine et qui est la première après l’adoption de la nouvelle Constitution de 2011, aura un fort goût d’inachevé tant pour le gouvernement que pour le Parlement».