PLF 2026 : viande, bois, médicaments… les nouvelles règles fiscales prévues

Derrière les équilibres financiers et les ajustements techniques du Projet de loi de finances 2026 , il s’agit de démontrer qu’il demeure possible d’allier réforme structurelle, équité sociale et rigueur budgétaire. Entre modernisation de l’appareil fiscal, rationalisation des instruments de l’État et protection du tissu productif national, quels sont les grands apports du PLF 2026 ?
C’est un Projet de loi de finances 2026 (PLF 2026) qui s’inscrit dans une trajectoire de continuité tout en recherchant un nouvel équilibre entre relance, équité sociale et consolidation budgétaire. Dans un contexte mondial marqué par les tensions hydriques, l’instabilité des marchés et les défis de la transition énergétique, la réforme fiscale marocaine compose avec deux enjeux majeurs : l’adaptation et la souveraineté productive.
Au-delà du seul équilibre des comptes publics, la recomposition du dispositif fiscal et douanier est tournée vers deux objectifs majeurs : protéger le tissu productif national et renforcer la transparence des échanges économiques.
Pour une relance productive
L’un des volets saillants du projet réside dans les mesures douanières, conçues comme un levier d’action immédiate sur les circuits de production et de consommation. La filière des viandes rouges illustre ce pragmatisme. Confronté à une sécheresse persistante ayant bouleversé l’équilibre de l’offre en bétail, le gouvernement avait déjà suspendu en 2025 les droits d’importation et la TVA sur 150.000 têtes de bovins. Ce contingent, presque entièrement épuisé dès août 2025, sera désormais doublé à 300.000 têtes.
Le PLF 2026 consacre également une réforme plus structurelle de la gouvernance douanière. Comme le dispositif de contrôle fait défaut, notamment en termes d’informations précises sur les lieux de stockage ou de transformation des marchandises importées, désormais, toute entreprise devra communiquer à l’administration les adresses effectives de ses sites logistiques, sous peine de sanction.
Cette mesure instaure une traçabilité accrue et une responsabilisation des acteurs privés. Cette même logique de modernisation irrigue la réforme de l’article 35 du Code des douanes, autorisant dorénavant l’usage de drones et de caméras dans les opérations de surveillance.
Dans le même esprit, l’intégration de la technologie Blockchain dans le processus de dédouanement représente une innovation majeure. Elle permettra aux importateurs volontaires d’assurer la traçabilité et l’authenticité des documents commerciaux, tout en bénéficiant d’un dédouanement accéléré. En reliant les fournisseurs étrangers au système informatique de l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII), la mesure vise à réduire les délais, mais aussi à instaurer une confiance numérique entre les partenaires commerciaux.
Une politique tarifaire «équitable»
La lutte contre l’informel, constante des politiques publiques depuis plus d’une décennie, se voit également renforcée. Les zones d’accélération industrielle, vitrines de l’investissement productif, ont révélé certaines pratiques frauduleuses, notamment la présence de marchandises non déclarées ou étrangères à l’activité autorisée. Ces comportements sont désormais érigés en délit de deuxième classe afin de défendre la loyauté de la concurrence et d’assainir le climat des affaires.
Sur le front tarifaire, la réforme du droit d’importation dessine une cartographie contrastée entre protection et ouverture. Plusieurs hausses visent à consolider la production nationale face à la concurrence étrangère. C’est le cas des étoffes de bonneterie jacquard, des monofilaments utilisés dans la fabrication des balais, ou encore des machines à laver et congélateurs domestiques, dont les droits d’importation grimpent, respectivement, à 30%, 17,5% et 17,5%.
À l’inverse, certaines réductions ciblées illustrent une approche différenciée de la compétitivité. Les intrants agricoles comme les acaricides, les nématicides et les molluscicides voient leurs droits réduits à 2,5%, tout comme les profilés d’aluminium ou les composants de machines à laver semi-automatiques.
L’industrie pharmaceutique fait également l’objet d’un réaménagement attentif. Après les ajustements opérés en 2023 et 2025, le chapitre 30 du tarif douanier sera à nouveau révisé afin de garantir l’approvisionnement continu du marché en médicaments, tout en soutenant la production nationale.
Cependant, l’attention portée au secteur énergétique se manifeste à travers le report de la mise en œuvre du marquage fiscal sur certains combustibles. Initialement prévu pour 2026, ce dispositif ne s’appliquera qu’en 2028, afin de laisser aux opérateurs le temps d’adapter leurs infrastructures. Le champ du marquage sera toutefois élargi au carburéacteur, au propane et au butane liquéfiés, dans un souci de traçabilité accrue des flux énergétiques.
Afin de soutenir les filières locales de transformation tout en corrigeant les distorsions tarifaires entre produits finis et matières premières, une réduction de la taxe sur le bois importé, de 12% à 6% pour certaines catégories de bois brut et lattes assemblées, est prévue. Quant aux autres impôts et taxes, tels que l’impôt sur le revenu ou encore l’impôt sur les sociétés, le PLF s’inscrit dans la continuité des réformes entamées.
Ainsi, la stratégie fiscale s’articule autour de quatre axes complémentaires. Il s’agit de l’intégration renforcée du secteur informel dans l’économie structurée, afin d’élargir l’assiette fiscale et de garantir une concurrence loyale, de l’amélioration de l’environnement des affaires et de la compétitivité des entreprises, de l’adaptation et l’harmonisation du système fiscal et, enfin, de la consolidation de la cohésion sociale.
Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO