Edito. Sous observation

Le système financier affiche, fort heureusement, une bonne santé. Les indicateurs globaux sont rassurants, les stress tests confirment la résilience du secteur, et les principaux ratios restent solides. Si la stabilité est bien réelle, elle repose sur des dynamiques plus fragiles qu’il n’y paraît. Le crédit progresse, mais au prix d’un léger relâchement de la qualité.
La rentabilité bancaire est en hausse, certes, mais elle est portée en partie par des revenus de marché, donc plus exposés. L’euphorie boursière, elle, s’appuie sur des taux obligataires bas, une configuration difficilement tenable à long terme. Désormais, l’essentiel se joue moins dans les bilans que dans les comportements.
La vigilance affichée par la Banque centrale n’est pas feinte. Elle traduit une conscience aiguë de l’équilibre précaire sur lequel repose aujourd’hui le système financier. Derrière le regain d’enthousiasme des marchés et le retour des flux vers les OPCVM, se profile une épargne de plus en plus mobile, attirée par la liquidité immédiate. Le placement devient refuge, non plus projection. L’allocation des ressources obéit à une logique d’arbitrage rapide plutôt qu’à une stratégie de construction durable.
Dans ce contexte, la question du temps long revient avec insistance. Le dossier des retraites en est une illustration frappante. Malgré des orientations de réforme actées, la mise en œuvre se fait attendre. Le besoin de refonte est reconnu, les paramètres sont identifiés, mais la bascule institutionnelle tarde.
Ce décalage entre diagnostic partagé et action concrète nuit à la lisibilité du système. En somme, si la stabilité tient encore, elle est de plus en plus dépendante des leviers sensibles que sont la liquidité des marchés, les décisions de politique monétaire, la confiance des épargnants et le niveau de volatilité externe. Mais aucun de ces éléments ne constitue, à lui seul, une garantie durable.
Moulay Ahmed Belghiti / Les Inspirations ÉCO