Sport : Hooliganisme dans les stades, l’autre défi du supportérisme

Organisé en prélude à la prochaine Coupe d’Afrique des Nations, le Forum régional pour la promotion de l’encouragement sportif s’est affirmé comme un espace de réflexion collective. Les travaux ont débouché sur une série de recommandations destinées à mieux encadrer l’engagement des supporters, contenir les débordements et promouvoir une culture sportive porteuse de valeurs citoyennes.
Quelques jours seulement après sa réouverture, le stade Mohammed V de Casablanca a été la cible de dégradations. Les images de sièges arrachés, de sanitaires saccagés et de grillages détruits ont suscité l’indignation, ravivant le débat sur les limites de la ferveur populaire.
Pourtant, ces actes regrettables ne sauraient occulter la remarquable exemplarité dont les supporters marocains ont su faire preuve lors des deux dernières Coupes du monde, en Russie, puis au Qatar, où leur engagement sans faille avait accompagné l’équipe nationale jusqu’à une historique demi-finale.
Cette double réalité souligne l’urgence d’un travail de fond pour canaliser l’énergie des tribunes sans en altérer la vitalité. C’est dans cet esprit que les Assises régionales pour l’encouragement sportif se sont tenues le 25 avril à Casablanca, réunissant autorités locales, journalistes, légendes du football national comme Noureddine Naybet et Mustapha Haddaoui, ainsi que des spécialistes de la sociologie du sport.
L’événement, organisé à l’approche de la prochaine Coupe d’Afrique des Nations, se veut davantage comme un espace de réflexion collective.
Promouvoir un supportérisme positif
Au cœur des échanges, le rôle du supporter a été abordé sous plusieurs angles, dépassant l’image du simple spectateur. Mohamed Souhail, figure majeure de la scène footbalistique des années 1980, a rappelé que «le football est un terrain d’observation sociologique privilégié», insistant sur la nécessité de comprendre les dynamiques de foule pour mieux les encadrer.
L’ancien international Mustapha El Haddaoui, a salué, pour sa part, «la capacité des supporters à formuler des critiques souvent constructives», signe que l’encouragement ne se limite pas à un soutien aveugle, mais participe d’un dialogue exigeant entre tribunes et terrains. En ce sens, la nécessité d’une structuration plus poussée de cette relation a été largement débattue par l’ensemble des participants.
Parmi les recommandations fortes, la création d’un Pôle Relation avec les Supporters (PRS) a été proposée, afin de renforcer les canaux de communication et d’anticiper les risques de débordement. Plusieurs intervenants ont souligné que l’absence de campagnes de sensibilisation ciblées permettrait de mieux encadrer les supporters.
Lutter contre les actes de vandalisme
Pour les autorités locales, l’enjeu est avant tout sécuritaire. La mairesse de Casablanca, Nabila Rmili, a mis en avant l’initiative «Casa Nqia», visant à impliquer directement les supporters dans les actions de préservation de l’espace public.
Elle a plaidé pour la création de commissions décentralisées capables de relayer ce type d’initiatives sur le terrain, en inscrivant la culture sportive dans une dynamique de responsabilité citoyenne. Les débats ont aussi révélé une attente forte concernant l’implication des groupes ultras dans les cercles de décision. Loin d’être perçus comme de simples fauteurs de troubles, ces groupes sont aujourd’hui reconnus pour leur capacité à structurer le soutien et à porter les couleurs des disciplines collectives.
Cette reconnaissance passe néanmoins par une responsabilisation accrue, appuyée par des mécanismes institutionnels clairs. Un autre pan de la discussion a porté sur les conséquences juridiques du vandalisme dans les enceintes sportives.
«Il est essentiel de sensibiliser les jeunes aux conséquences pénales de leurs actes, car l’inscription d’une infraction dans un casier judiciaire peut peser lourdement sur leur avenir professionnel, un aspect souvent méconnu du grand public», rappelle Abdessalam Bouhouch, procureur général du Roi auprès la Cour de Casablanca.
Dans cette perspective, les Assises ont misé sur une dynamique résolument positive, faisant de la valorisation du soutien des supporters un levier de promotion culturelle et d’attractivité internationale pour le Maroc. Plus qu’un simple exercice de communication, il s’agit désormais de transformer la passion populaire en un véritable capital collectif, au service «du sport et du pays».
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO