Maroc

Latifa Yaakoubi : “Notre bilan 2012-2024 a permis de mobiliser 148,2 MMDH”

Latifa Yaakoubi
Directrice générale de l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier

Dans cet entretien, Latifa Yaakoubi, directrice générale de l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (ANDZOA), revient sur les réalisations au niveau de la zone d’action de l’Agence, laquelle couvre près de 40% du territoire national.

Face à la nécessité de conduire un développement intégré au sein des zones oasiennes et de l’arganier, l’ANDZOA a été créée en février 2010, sous la tutelle du ministère de l’Agriculture. Plus d’une décennie après cette création, quel bilan dressez-vous pour cette zone d’action couvrant près de 40% du territoire national ?
Depuis sa création en 2010, sous la tutelle du ministère de l’Agriculture, l’ANDZOA s’est imposée comme un acteur clé du développement intégré des zones oasiennes et de l’arganier, lesquelles couvrent près de 40% du territoire national. Le bilan 2012-2024 est éloquent, tant en termes d’investissements que d’impacts territoriaux : plus de 148,2 MMDH ont été mobilisés à travers des projets et programmes financés à la fois par les budgets des départements ministériels et par les fonds propres de l’ANDZOA.

Ces derniers incluent, notamment, le Fonds de développement rural et des zones de montagne, ainsi que les contributions de bailleurs de fonds internationaux. Les investissements des départements ministériels et organismes publics ont atteint un total de 142,6 MMDH, tandis que les fonds directement mobilisés par l’ANDZOA s’élèvent à 5,6 MMDH. Ces ressources ont été stratégiquement réparties : près de 45,4 MMDH ont été consacrés à la résilience environnementale, à la gestion durable des ressources et à la préservation des écosystèmes.

Le développement économique, pour sa part, a bénéficié de 37,6 MMDH, destinés à renforcer la compétitivité territoriale, à créer de la valeur autour des filières locales et à soutenir l’emploi. Enfin, 65,2 MMDH ont été mobilisés pour améliorer l’accès aux services sociaux de base, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé, du désenclavement et des infrastructures de proximité.

Ces investissements ont permis de franchir des étapes décisives dans la transformation des territoires oasiens et de l’arganier. L’ANDZOA reste ainsi résolument engagée à consolider ces acquis, à relever les défis persistants et à inscrire durablement ces territoires dans une trajectoire de développement durable et inclusif.

Comment se portent les principaux indicateurs dans les zones d’intervention de l’ANDZOA ?
La stratégie mise en œuvre par l’ANDZOA depuis 2012 a permis de générer des résultats concrets, traduits par une amélioration significative des principaux indicateurs sociaux, économiques et environnementaux dans les zones concernées. Ces avancées sont le fruit d’une approche intégrée, reposant sur une articulation étroite entre les projets d’infrastructures, le renforcement des capacités locales et la valorisation des ressources territoriales.

Sur le plan social, l’amélioration des conditions de vie est manifeste. Le taux d’accès à l’eau potable est passé de 79,8% à 96,01%, et celui de l’électricité de 95,1% à 99,78%. Le désenclavement a également connu une progression notable, atteignant 86,81% en 2023 contre 72,3% en 2012. Ces chiffres traduisent une nette réduction des disparités territoriales, notamment en milieu rural. L’éducation a aussi bénéficié de cette dynamique : la scolarisation au primaire et au collège est désormais quasi généralisée, tandis que le taux d’accès au secondaire a bondi de 44,91% à 65,72%, renforçant ainsi la base du capital humain dans ces régions.

Du côté de la santé, bien que certains défis persistent, notamment en matière d’effectif du personnel médical, des efforts considérables ont été consentis. Le nombre d’établissements de soins de santé primaires est passé de 685 en 2013 à 760 en 2023, dont 85% en milieu rural, et le réseau hospitalier s’est étoffé avec 26 hôpitaux, comptant au total 3.553 lits, contre 23 établissements une décennie plus tôt.

Qu’en est-il des indicateurs économiques ?
Les performances économiques enregistrées témoignent, elles aussi, d’une dynamique de croissance soutenue. Le PIB des zones couvertes par l’ANDZOA a atteint 162,65 MMDH en 2023, en hausse de 66,3 MMDH par rapport à 2012. Cette croissance s’est traduite par une contribution au PIB national portée à 11,38%, contre 10,55% auparavant.

Dans le même temps, le PIB par habitant a connu une nette amélioration, progressant de 18.721 à 28.637 dirhams, ce qui a permis de réduire l’écart avec la moyenne nationale, désormais fixé à -25,85 % contre -32 % en 2012. Sur le plan environnemental, la sécurité hydrique s’est imposée comme une priorité transversale et stratégique.

L’ANDZOA a placé la sécurisation des ressources en eau au cœur de ses priorités, traduisant cette orientation par des investissements de grande ampleur. Pas moins de 40 nouveaux barrages ont été mis en service, offrant une capacité de stockage supplémentaire de 1.038,85 millions de m³, tandis que huit autres sont actuellement en construction, pour un volume total de 1.668,64 millions de m³.

Parallèlement, la capacité des unités de dessalement de l’eau de mer a atteint 154,6 millions de m³ par an, complétée par un réseau de stations de traitement des eaux usées représentant une capacité globale d’épuration de 72,1 millions de m³ par an. Ces efforts renforcés participent à améliorer la résilience des territoires oasiens et de montagne face aux effets du changement climatique, tout en assurant une meilleure sécurité hydrique pour les populations locales.

Ces évolutions positives s’accompagnent d’une réduction significative du taux de pauvreté multidimensionnelle, qui est passé de 13,4% à 4,8%. Ce recul illustre les effets bénéfiques d’une politique de développement ciblée, structurée et coordonnée, capable d’amorcer un véritable changement de trajectoire pour ces territoires longtemps marginalisés.

L’approche par convention et la construction des partenariats ont été des dispositifs pour l’exécution de vos projets territoriaux. Selon vous, cette approche est-elle efficace face à la multiplicité des intervenants ?
L’approche par convention et la logique de partenariat constituent les fondements de l’action de l’ANDZOA depuis sa création. Bien que cette méthode implique une diversité d’acteurs institutionnels et territoriaux, elle s’est avérée particulièrement efficace, en tant que modèle de gouvernance collaborative, pour assurer la convergence des efforts autour du développement intégré des zones ciblées. L’ANDZOA joue un rôle de catalyseur en fédérant les partenaires et en garantissant la cohérence et la complémentarité des interventions dans son périmètre d’action.

À travers la signature de quelque 1.410 conventions de partenariat, l’Agence a mobilisé d’importantes ressources techniques et financières issues aussi bien des départements ministériels que des collectivités territoriales, d’ONG et de bailleurs de fonds internationaux.

Cette démarche permet non seulement une mutualisation des efforts, mais aussi un ancrage local fort des projets, grâce à l’implication directe des parties prenantes. Elle offre, par ailleurs, une grande souplesse dans la programmation et l’exécution des actions, favorisant ainsi l’alignement entre priorités nationales, sectorielles et besoins locaux. Si cette approche exige rigueur et coordination, elle s’est néanmoins révélée pertinente et efficiente, en s’appuyant sur une dynamique collective pour relever les défis complexes du développement durable.

Les zones oasiennes et de l’arganier demeurent spécifiques à plus d’un titre puisqu’elles englobent deux réserves de biosphère classées par l’Unesco : l’Arganeraie (RBA) et les Oasis du Sud du Maroc (RBOSM). Quels sont les principaux obstacles qui freinent encore leur développement intégré ?
Malgré leur richesse naturelle et patrimoniale, les zones oasiennes et de l’arganier font face à plusieurs freins structurels. Les effets du changement climatique (inondations, désertification, incendies, dégradation des sols, raréfaction des ressources hydriques) fragilisent profondément la durabilité de ces écosystèmes et compliquent l’implantation de projets pérennes.

Pour y faire face, l’ANDZOA déploie plusieurs programmes d’adaptation et de gestion des risques climatiques, parmi lesquels la construction de plus de 180 ouvrages de recharge artificielle des nappes phréatiques. Par ailleurs, 39 piézomètres équipés de systèmes de suivi à distance ont été installés. Il s’agit aussi de la réalisation de 125 ouvrages de collecte des eaux pluviales, pour une capacité totale d’environ 31.450 m³.

À cela s’ajoutent le Programme d’aménagement paysager et de valorisation des oasis marocaines, incluant la lutte contre les incendies, doté d’un budget de 842 MDH et le Programme régional de valorisation des zones de montagne de Drâa-Tafilalet (2022-2027), avec un budget global de 1,059 MMDH, dont 53,5 MDH apportés par l’ANDZOA.

Pour le Programme de durabilité des périmètres d’Arganiculture, il couvre 5.312 ha au profit de 3.510 bénéficiaires. Par ailleurs, un programme d’urgence a été lancé pour la réhabilitation des zones touchées par le séisme du 8 septembre 2023, dans les provinces de Taroudant et Ouarzazate, avec une enveloppe de 50 MDH bénéficiant à 17.194 habitants.

À ces défis climatiques s’ajoutent des insuffisances en matière d’infrastructures, qu’il s’agisse de connectivité ou de services sociaux de base, qui demeurent des freins majeurs au développement intégré de ces territoires. L’Agence reste mobilisée pour atténuer ces obstacles, en misant sur l’innovation, la planification participative et une mobilisation accrue des partenaires.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO



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