Livres : “Paroles de coachs du Maroc 2024”, tout ce que vous avez voulu savoir sur le coaching
La réédition de l’ouvrage collectif de professionnels marocains offre aux coachs une mine de réflexions et d’expériences partagées. Pour les non-coachs, il est une porte ouverte sur le métier et sa pratique, loin des idées reçues et des caricatures.
Le 28 novembre, une conférence à Casablanca a présenté l’ouvrage collectif «Paroles de coachs du Maroc 2024», paru chez Maha Éditions. Il a été rédigé sous la direction de Mouhcine Ayouche, coach, écrivain et co-fondateur de la Haute académie marocaine de coaching (HAMAC©). Il s’agit d’une réédition et mise à jour de l’édition de 2017. Deux des co-auteurs étaient présents : Sophia Bencherifi, coach et directrice générale de BMH Coach, et Omar Oukrid, coach, membre du CODIR et directeur de pôle à la CGEM. La rencontre était modérée par Nabila Bakkass, journaliste du groupe Le Matin.
Ancrer le coaching au Maroc
Mouhcine Ayouche a rappelé que les auteurs s’étaient vu imposer que leurs textes doivent comporter un minimum d’environ 20% de valeur ajoutée personnelle, tirée de leur expérience pratique dans le Royaume. Il ne s’agit donc pas du genre d’articles que l’on pourra trouver un peu partout sur la planète, même si, bien sûr, les règles du coaching sont, ou devraient, être similaires partout. Ces règles ne sont pas tout, et, tout au long de la soirée, Ayouche a insisté longuement sur le fait que ce métier repose avant tout et surtout sur une relation humaine, et que l’humain est à chaque fois unique.
En revanche, il importe, pour être un bon coach, de bien fixer les limites du métier. Un coach n’est en aucun cas un thérapeute ni un conseil juridique ou autre. «Si les médecins relèvent d’Hippocrate, les coachs sont sous le signe de Socrate», résume-t-il d’un trait. Le coach, selon Mouhcine Ayouche, aide son client à trouver en lui-même les moyens d’atteindre un objectif de vie précis. Mais il n’est pas là pour dicter une conduite, encore moins guérir une souffrance profonde.
Dans ce dernier cas, un professionnel se doit d’orienter la personne vers un psychologue ou tout médecin adéquat. À l’invitation de la modératice, Mouhcine Ayouche a explicité les circonstances d’un de ses billets d’humeur, repris dans le livre. Un jour, il s’était mis en colère en entendant une émission de radio où l’animatrice tentait de faire du coaching en direct. Une relation personnelle, comme celle-ci, ne peut en aucun cas se conduire devant des millions d’auditeurs extérieurs, a-t-il écrit, tempérant sa passion sous son humour coutumier et en verlan.
Changement de culture professionnelle
Omar Oukrid, directeur de pôle à la CGEM et coach lui-même, est revenu sur les changements intervenus ces dernières années, qui ont notamment justifié la mise à jour de «Paroles de coachs du Maroc 2024». Il en constate d’irréversibles dans la demande des coachés. Il y a une quinzaine d’années, les demandes étaient en général d’apprendre à diriger une réunion, à gérer son stress face à une situation professionnelle. Il s’agissait d’adapter son comportement pour être en phase avec son travail. Désormais, souligne Oukrid, la question couramment posée est de savoir comme être l’aise, se sentir bien dans son travail. L’idée sous-jacente étant que l’on produit mieux si l’on se sent bien — ce qui est un fait. Il s’agit donc d’équilibrer vie professionnelle, personnelle et familiale. C’est un véritable recentrage de la culture du travail. La crise sanitaire a joué un rôle dans cette prise de conscience, qui replace l’humain au centre de l’approche.
Transformation digitale et bénévolat
Sophia Bencherifi, directrice générale de BMH Coach, a remarqué pour sa part que la transformation digitale touche aussi les métiers du coaching. Les clients se sentent à l’aise avec un accompagnement à distance. La période du Covid a aussi joué un rôle important pour cet aspect, car la discipline était auparavant très méfiante vis-à-vis des outils du distanciel.
Bencherifi a alors remarqué que les personnes qui la consultaient se sentaient plus à l’aise, plus confortables que d’habitude par le simple fait de ce que les séances se déroulaient à leurs domiciles. Supprimant les transports, la démarche offre un impact positif pour l’écologie, estime-t-elle, ainsi qu’un gain de temps précieux. Un équilibre peut être trouvé entre digital et présentiel, car le langage non verbal compte énormément dans ce type d’échanges. De plus, cela a permis de démocratiser le coût du coaching, ouvrant un accès à un nouveau public.
Sur ce point, Mouhcine Ayouche a tenu à préciser qu’il y a des solutions possibles pour tous les publics et les niveaux de revenus. Beaucoup de coachs mènent des sessions bénévoles dans certains cas. Là encore, il tient à rappeler les règles qui font le sérieux de son activité. Prenant l’exemple du tremblement de terre de l’an dernier dans la région d’Al-Haouz, Ayouche a tonné qu’«il n’est pas question de coacher les sinistrés !». Leurs besoins, urgents, ne relèvent pas du coaching.
En revanche, beaucoup de missions d’accompagnement ont été faites, et parfois offertes, auprès des secouristes, notamment des associations à but non lucratif. Leurs bénévoles, eux, peuvent avoir besoin d’un coach pour organiser leurs priorités, gérer leur stress et, en conséquence, mieux secourir la population en détresse.
Murtada Calamy / Les Inspirations ÉCO