Parlement : une rentrée très studieuse
Au cœur des priorités législatives, figurent l’emploi, le droit de grève et la réforme des retraites. Cap sur les dossiers chauds qui seront au cœur des débats dans l’Hémicycle.
La rentrée parlementaire s’annonce sous pression pour les députés, avec plusieurs réformes structurantes à l’ordre du jour. Au moment où les deux chambres s’apprêtent à ouvrir leurs portes pour une nouvelle année législative, l’agenda est d’ores et déjà dessiné par une série de projets de loi et de réformes attendues, dans un contexte social tendu et avec une économie encore soumise aux pressions inflationnistes. Des défis qui mettent en lumière l’urgence de répondre à plusieurs attentes, notamment en matière de pouvoir d’achat, d’emploi et de protection sociale, à deux ans des prochaines législatives.
Droit de grève et réforme
L’agenda législatif, qui s’ouvre ce vendredi, ne laisse aucune place à l’inertie. En tête des priorités, des réformes cruciales pour le cadre social et juridique, à commencer par le projet de loi organique sur le droit de grève. Ce texte, attendu depuis des années, fait aujourd’hui l’objet de négociations entre le gouvernement, les syndicats et le patronat. Sa mise en œuvre est perçue comme un tournant dans les relations sociales, et sera scrutée avec attention.
«L’agenda législatif est bousculé par l’urgence de réformer les outils de dialogue social pour assurer une paix sociale durable», souligne Rachid Hammouni, président du groupe parlementaire du PPS.
Autre chantier de taille : la réforme des régimes de retraite, qui concerne de près des millions de Marocains. Le vieillissement de la population, couplé à une démographie en transition, impose une réforme d’ampleur, sous peine d’assister à l’effondrement du système actuel à moyen terme. Ce projet, qui s’annonce aussi technique que sensible, sera l’objet de débats acharnés, en particulier entre les défenseurs d’une vision conservatrice soucieux de préserver les acquis sociaux, et les libéraux, qui plaident en faveur d’une plus grande flexibilité dans la gestion des fonds de pension.
Loi de finances
Le projet de Loi de finances 2025 occupe également une place centrale dans les débats. Le gouvernement, qui fait face à une conjoncture marquée par une inflation persistante, par la hausse des prix des matières premières et par des tensions sur les marchés financiers, devra faire preuve de prudence dans ses orientations budgétaires.
Objectif affiché : maintenir l’équilibre entre la nécessité de soutenir la demande intérieure et la soutenabilité des finances publiques. Il ne s’agit pas uniquement de répondre aux impératifs économiques immédiats, mais également de préparer le terrain pour les élections législatives de 2026.
En effet, le Parlement doit adopter des réformes qui auront un impact direct sur le quotidien des citoyens, en particulier dans des domaines aussi sensibles que l’emploi, l’investissement et la création d’entreprises.
Comme le rappelle Noureddine Mediane, président du groupe Istiqlalien à la Chambre des Représentants, «le Parlement doit non seulement légiférer, mais aussi accompagner les réformes structurelles par un débat transparent et ouvert».
Stress hydrique
En parallèle des réformes sociales et économiques, le Parlement devra également se pencher sur les défis structurels, en tête desquels figure le stress hydrique aigu que traverse le Royaume. Face à une sécheresse persistante, les experts s’accordent à dire que les solutions mises en œuvre jusqu’à présent s’avèrent, à bien des égards, insuffisantes.
Ces retards accumulés dans l’exécution de la politique de l’eau ont été d’ailleurs pointés du doigt lors du discours royal, à l’occasion de la Fête du Trône, ajoutant une pression supplémentaire sur le gouvernement et les élus pour accélérer la cadence. La question de la sécurité alimentaire, directement liée à la disponibilité de l’eau, sera également au centre des préoccupations.
La rareté des ressources hydriques affecte gravement les rendements agricoles, ce qui pourrait mettre en danger l’autosuffisance du pays et accentuer, comme l’a rappelé lors de sa dernière sortie le gouverneur de Bank Al-Maghrib, sa dépendance vis-à-vis des importations. En ce sens, cette rentrée parlementaire se veut l’occasion pour le gouvernement de présenter un plan d’action ambitieux pour répondre à ces défis environnementaux.
Au-delà des frontières nationales, le Parlement est également attendu sur le terrain diplomatique. Le soutien de la communauté internationale à l’Initiative marocaine d’autonomie pour le Sahara marocain a pris une nouvelle ampleur ces derniers mois, en particulier avec le soutien officiel de la France, et le Parlement se doit d’accompagner cette dynamique par une diplomatie parlementaire proactive. Avec un agenda aussi chargé, la rentrée parlementaire 2024 est placée sous le signe de l’urgence.
Entre réformes sociales, pressions économiques et défis environnementaux, le gouvernement et le Parlement devront travailler de concert pour répondre aux attentes de la population tout en naviguant dans un contexte international tendu.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO