Croissance : un jeu de yoyo délicat
Le rebond de l’économie a été bien plus véloce qu’anticipé. Le Produit intérieur brut a augmenté de 7,9% en 2021, selon les comptes nationaux publiés par le HCP après une récession de 7,2% en 2020. A l’origine de cette reprise vigoureuse, la consommation des ménages et l’investissement se retrouvent aujourd’hui sous pression face à la montée de l’incertitude et une inflation historiquement élevée. Cette année, la croissance se limiterait à environ 2%.
Le Maroc a frôlé 8% de croissance en 2021, selon les comptes nationaux publiés par le HCP. Après le plongeon de 7,2% en 2020, la reprise a été tout aussi impressionnante confirme l’institution, le PIB ayant rebondi de 7,9% selon les données actualisées. Le rebond a été prompt dans les secteurs primaire et secondaire grâce à une bonne campagne agricole et une nette amélioration de la conjoncture dans le BTP. Mais il est incomplet dans les industries manufacturières.
Dans le secteur tertiaire, les pertes de production n’ont été qu’en partie récupérées. La valeur ajoutée ressort en hausse de 6,4% après une correction de 7,9% en 2020. Après les perturbations ayant émaillé l’exercice 2020, notamment le confinement, 2021 n’en n’était pas exempt. Ce qui a encore fortement pesé sur les professionnels de l’hébergement et de la restauration.
L’activité y a progressé de 31,6% après une chute de 54,6% l’année précédente. La reprise est également partielle dans le Transport et entreposage. En revanche, l’activité s’est accélérée dans les services immobiliers et a pratiquement retrouvé son rythme pré-covid dans les activités financières et d’assurance.
Consommation des ménages et investissement, des moteurs sous pression
La consommation des ménages représente près de 60% du PIB et a joué encore un rôle moteur dans la reprise rapide de l’activité. Elle contribue pour pratiquement 2/3, soit 4,8 points à la croissance du PIB en 2021. Les dépenses des ménages ont augmenté de 8,2% à 755 MMDH. Aujourd’hui, elles se retrouvent sous tension sur fond d’accélération de l’inflation qui a atteint 5,9% sur un an en avril, tirée par la hausse de 9,1% des prix des produits alimentaires.
S’agissant des produits non alimentaires, leurs prix se sont également renchéris de 3,7% dont + 12,4% pour la rubrique Transport. Et selon les prospectivistes, la hausse des prix à la consommation va s’accélérer au cours des prochains mois à mesure que les entreprises répercutent le renchérissement de leurs coûts de production sur leur prix de vente. Du coup, l’inflation ressortirait en moyenne sur l’ensemble de l’année à 4,7%, soit son niveau le plus élevé depuis 1995.
La baisse des revenus des ménages ruraux, suite à un nouvel épisode de sécheresse, et plus globalement la montée de l’incertitude pourraient fortement freiner la consommation des ménages cette année. Au premier trimestre, la hausse s’est limitée à 0,8%. Derrière les dépenses des ménages, l’investissement a été aussi d’un franc soutien à la croissance, sa contribution s’élevant à 3,8 points.
A 347 MMDH, il s’est renforcé de 15% par rapport à 2020 et de 3% comparé à 2019. Mais le contexte est susceptible de modifier le comportement d’épargne et d’investissement des ménages et des entreprises privées. L’effort reposerait sur le secteur public avec des effets limités sur la croissance et l’emploi.
Franck Fagnon / Les Inspirations ÉCO