Pouvoir d’achat : l’inflation grippe la consommation des ménages
La consommation des ménages pèse près de 60% du PIB. En conséquence, la pression exercée par la hausse des prix sur leur pouvoir d’achat constitue une menace pour une économie encore convalescente. Au 1er trimestre 2022, les dépenses des ménages n’ont augmenté que de 0,8%. Et, le HCP ne se montre pas très optimiste pour le deuxième trimestre en raison du maintien de fortes pressions inflationnistes.
Les conséquences économiques de la guerre en Ukraine, bien visibles dans les stations-services et dans les souks, ont un effet plus dévastateur sur le moral des ménages que ne l’avait été le coronavirus. L’indice de confiance mesuré par le HCP a chuté à un plus bas historique, s’établissant à 53,7 points au 1er trimestre. Ce plongeon a entraîné une nette décélération du rythme de progression de la consommation des ménages. Seulement une hausse de 0,8% a été enregistrée au 1er trimestre selon le HCP.
Hormis le contexte particulier des trois derniers trimestres 2020, l’évolution trimestrielle de leurs dépenses n’avaient jamais été aussi faible au cours des dernières années. A très court terme, la croissance de la demande intérieure reposerait principalement sur les dépenses publiques. Les dépenses des ménages resteraient affectées par le maintien des fortes pressions inflationnistes, prévoit le Haut Commissariat au Plan. Ce contexte va freiner la reprise, sachant que la consommation des ménages représente près de 60% du PIB.
10 MMDH pour la subvention des prix des produits de base en trois mois
Le choc inflationniste est très important avec une hausse des prix à la consommation de 3,6% au 1er trimestre contre 0,1% sur la même période en 2021. L’inflation est principalement tirée par les prix des produits alimentaires : +5,3%. Les tarifs des produits non alimentaires, eux, ont augmenté de 2,5%.
Dans le deuxième groupe, l’inflation des prix des produits énergétiques et du transport sont les plus influents. La hausse des prix à la consommation va s’accélérer au cours des prochains mois à mesure que les entreprises répercutent sur leur prix de vente le renchérissement de leurs coûts de production. Bank Al-Maghrib prévoit une inflation de 4,7% en 2022.
Une sortie rapide du conflit russo-ukrainien et le reflux des tensions affectant les chaînes d’approvisionnement pourraient atténuer la pression sur le pouvoir d’achat des ménages. L’impact de la flambée des prix à l’international dans les comptes publics est déjà conséquent. En trois mois, la charge de compensation a explosé à 10 MMDH contre une facture de 3,8 MMDH au 1er trimestre 2021.
Les montants décaissés au titre des subventions des produits de base représentent près de 60% du budget pour l’ensemble de l’année, selon les données de la TGR. Il y a par ailleurs les soutiens indirects au pouvoir d’achat via notamment les aides accordées aux transporteurs pour faire face à la flambée des prix du carburant.
Compensation : 247 MMDH de soutien au pouvoir d’achat en dix ans
10 MMDH sur les 17 budgétisés pour la compensation en 2022 ont déjà été consommés après seulement trois mois. Les tensions inflationnistes post-covid, exacerbées par la guerre en Ukraine, vont faire voler en éclats les dépenses au titre des subventions.
Selon certaines estimations, il faudra au moins 10 milliards de DH supplémentaires. La charge de compensation pourrait frôler les 30 milliards de DH en 2022. Ce qui n’était plus arrivé depuis le démantèlement total de la subvention des produits pétroliers. En dix ans, entre 2012 et 2021, le soutien public au prix des produits de base s’est chiffré à 247 MMDH dont 176 MMDH sur la première moitié de la période, le gouvernement subventionnant encore à l’époque les prix du carburant.
Le contexte actuel rend plus complexe la poursuite de la réforme des subventions, le gouvernement ayant prévu de s’attaquer à la décompensation du sucre, de la farine nationale de blé tendre et du gaz butane à partir de 2022. Aussi sensible soit-elle, elle sera nécessaire pour élargir l’espace budgétaire pour financer la protection sociale.
Frank Fagnon / Les Inspirations ÉCO