Maroc

Marché du travail/NMd : les gains potentiels de l’insertion des femmes

Afin d’approcher les gains économiques potentiels que pourrait induire l’accroissement du taux d’activité des femmes selon les recommandations du NMD, l’analyse du genre de la contribution de l’utilisation de la main d’œuvre féminine s’est basée sur cinq scénarios. À noter que le cinquième fait ressortir un gain de plus de 5% par an en moyenne, en termes de croissance du PIB par habitant entre 2022 et 2035. 

Plus de 5% en moyenne chaque année. C’est le gain potentiel que le Maroc peut gagner entre 2022 et 2035 en matière de PIB par habitant grâce au renforcement du taux d’insertion des femmes sur le marché du travail, à la lumière des recommandations du Nouveau modèle de développement (NMD). C’est du moins ce qui est ressorti de l’analyse genre de la contribution de l’utilisation de la main-d’œuvre féminine à l’amélioration du niveau de vie sous l’effet cumulé du relèvement des taux d’activité des femmes et des gains de productivité.

Initiée par le ministère de l’Économie et des finances, à travers la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) en partenariat avec l’ONU Femmes, avec l’appui de l’Agence française de développement (AFD) et de l’Union Européenne, cette étude rétrospective et prospective vise à appréhender les gains potentiels, en termes d’amélioration du niveau de vie, inhérents à la hausse de l’activité féminine.

À noter que cette question a été ciblée par le NMD, qui projette un niveau situé à 45% à l’horizon 2035 contre 19,9% en 2020. Cependant, la concrétisation de ce taux est tributaire de l’activation de plusieurs leviers d’action recommandés par le rapport sur le NMD au service de la promotion de l’autonomisation économique des femmes et du renforcement de leur capital humain.

Au total, l’étude s’est appuyée sur un cadre d’analyse fondé sur la décomposition du PIB par habitant en deux effets : le premier, lié à la productivité, correspond à l’efficacité avec laquelle les facteurs de production sont conjointement mobilisés dans le processus de production. Le second, correspondant à l’effet d’utilisation de la main d’œuvre, renseigne quant à lui sur l’intensité avec laquelle la main-d’œuvre est mobilisée dans le processus de production.

Les simulations fondées sur cinq scénarios

Cette composante du PIB par habitant (effet d’utilisation de la main-d’œuvre) a fait l’objet, dans le cadre de l’étude, d’une analyse approfondie sous le prisme du genre et selon l’âge et ce, pour en cerner les contributions à la création de la richesse à l’échelle nationale au titre de la période 2011-2019. Une attention particulière a été accordée aux manifestations des effets de la crise du Covid-19 déclenchée en 2020, à travers l’étude du comportement de l’utilisation de la main-d’œuvre féminine durant cette année. En outre, et sur la base de ladite décomposition, plusieurs simulations ont été effectuées, fondées sur cinq scénarios, afin d’approcher les gains économiques potentiels que pourrait induire l’accroissement du taux d’activité des femmes selon la trajectoire préconisée par le NMD.

Le premier scénario a reposé sur une hypothèse d’accroissement du taux d’activité des femmes pour atteindre 45% en 2035, tout en maintenant inchangé le poids des autres composantes du PIB par habitant. S’agissant du second, il a combiné le premier scénario et une hausse de la productivité totale des facteurs (PTF) de 0,5% par an à l’horizon 2035.

Pour sa part, le troisième scénario dit «tendanciel» a reconduit les tendances moyennes observées durant la période 2011-2019. En ce qui concerne les deux derniers scénarios, le quatrième a inclus le troisième avec une hausse du taux d’activité des femmes de 45% en 2035 alors que le cinquième a intégré le quatrième scénario avec une hausse de la PTF de 0,5% par an à la même échéance de 2035.

Niveau de vie : des possibilités positives et réelles d’inflexion

Il est à noter que les trois derniers scénarios partagent plusieurs points. Ils s’appuient tous les trois sur les projections réalisées par le Centre d’études et de recherches démographiques (CERED) relevant du HCP et relatives à l’évolution par sexe de la population totale et de la population de 15 ans et plus. Aussi, les différentes projections de la croissance retiennent une intensité capitalistique évoluant à son rythme tendanciel passé alors que l’évolution de l’emploi résulte de l’estimation de l’élasticité du taux d’activité par rapport au poids de l’emploi dans la population d’âge actif.

Globalement, les résultats obtenus laissent entrevoir des possibilités réelles d’inflexion positive du niveau de vie au Maroc. Ils indiquent que, même en gardant inchangée la structure du PIBH par rapport à son niveau de l’année 2019, l’accroissement du taux d’activité des femmes peut s’établir à 45% à l’horizon 2035, selon le premier scénario qui pourrait générer une hausse additionnelle moyenne du PIBH de 1,7 point de croissance durant la période 2022- 2035.

L’effet cumulé de cette hausse et de l’accroissement des gains de PTF, en se basant sur le second, générerait une croissance additionnelle moyenne de 2,2 points. De surcroît, en se basant sur le troisième scénario fondé sur la poursuite des tendances passées, il en ressort que l’amélioration induite du niveau de vie de la population n’est pas significative, soit un accroissement attendu du PIBH de 2,2% par an entre 2022 et 2035, contre +2,4% par an entre 2011 et 2019.

Quant au quatrième scénario qui illustre des gains supplémentaires associés au renforcement du taux d’insertion des femmes dans le marché du travail, il fait état d’un rythme d’accroissement du PIBH davantage vigoureux par rapport au niveau tendanciel pour s’établir à plus de 4,6% par an à l’horizon 2035.

Ce rythme de progression permettrait une multiplication du PIBH par deux. Pour ce qui est du cinquième scénario, il atteste d’une amélioration du niveau de vie de la population à un rythme bien supérieur et ce, sous l’effet cumulé du relèvement des taux d’activité des femmes et des gains de productivité.

Cette progression pourrait s’établir à 5% en rythme annuel durant la période 2022-2035, induisant ainsi une multiplication par 2,1 du PIBH, ce qui représenterait un gain substantiel du niveau de vie à l’échelle nationale, et correspondrait à une plus-value de 2,8 points par rapport au scénario tendanciel basé sur le troisième scenario.

Inclusion des femmes : la feuille de route proposée par le NMD

La concrétisation des objectifs et des cibles fixés par le NMD en matière de promotion de l’égalité de genre et de l’accès renforcé des femmes aux opportunités économiques pourrait, ainsi, contribuer à un gain en termes de croissance du PIBH qui pourrait atteindre jusqu’à 5% par an entre 2022 et 2035. Le processus entamé par le Maroc, depuis 2002, en faveur de l’intégration systématique de la dimension genre dans les politiques publiques, y compris sectorielles, est amené à se consolider davantage, selon l’étude.

En effet, elle a été identifiée par le rapport sur le NMD comme étant la voie à même de contribuer à maximiser les retombées économiques et sociales de ces politiques et à en faire un levier d’accélération du développement inclusif auquel aspire notre pays.

La feuille de route déclinée dans ledit rapport a dédié un projet à part à l’autonomisation économique des femmes. Ce projet est structuré en trois composantes fortement interdépendantes. Il s’agit de l’accessibilité des femmes aux opportunités économiques à travers la révision de certains dispositifs réglementaires et législatifs et leur adaptation aux impératifs de la promotion de l’emploi des femmes.

À cela s’ajoutent l’instauration de mesures fiscales incitatives en faveur d’entreprises qui se conforment aux objectifs de la parité dans l’emploi et l’alignement des cahiers de charges d’aménagement et de gestion des zones industrielles. Les objectifs recherchés visent la promotion de l’emploi et de l’entrepreneuriat féminin ainsi que la sensibilisation des femmes à l’éducation financière, à la culture managériale et au renforcement de leurs capacités en matière de montage des projets.

Pour la seconde composante, elle est liée au renforcement des capacités des femmes en matière de formation et d’éducation à travers le recours à des plateformes d’éducation en ligne, ciblant en priorité les femmes à faible niveau d’instruction.

Il est question aussi de renforcer les capacités des femmes concernant les problématiques de formation et d’éducation, autant en milieu urbain que rural, tout en déployant des dispositifs incitatifs en faveur des salariées non diplômées et en initiant des campagnes de sensibilisation mettant l’accent autant sur l’importance de la scolarisation des filles que sur l’importance de la formation professionnelle.

Pour la troisième composante, elle concerne la tolérance zéro à l’égard des violences faites aux femmes à travers la réforme du Code pénal, qui se fait toujours attendre, et l’amendement de la loi 103-13 relative à la lutte contre les violences faites aux femmes.

Sont prévus, en outre l’élargissement de son champ d’application aux différentes formes de harcèlement et l’organisation de campagnes de sensibilisation à l’échelle nationale pour décrier les différentes formes de violences à l’encontre des femmes.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO



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