Maroc

TIR-Visas Schengen : les transporteurs en sursis ?

Il semble que le lobbying intense déployé par les exportateurs marocains, suite au durcissement des procédures d’octroi de visas français aux chauffeurs nationaux de camions TIR, a porté ses fruits. Mais pour combien de temps encore ?

«C’est vraiment un grand ouf de soulagement», a réagi, tout sourire, Abdelilah Hifdi, président de la Fédération du transport et de la logistique, relevant de la Confédération générale des entreprises du Maroc (FTL-CGEM), dans un entretien téléphonique avec Les Inspirations ÉCO. «Nous avons été agréablement surpris de la tournure des événements», a-t-il ajouté, avant de saluer le sérieux avec lequel le dossier a été pris en main par les différentes parties prenantes. Tout est parti d’une réunion de travail avec Franck Reister, ministre français délégué auprès du Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l’attractivité, et Chakib Alj, Président de la confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), le 22 novembre dernier, au siège de la Confédération, à Casablanca. Lors de cette rencontre, intervenue dans un contexte difficile, marqué par «une «prise en otage» des exportations marocaines, notamment les denrées périssables», le patronat marocain avait beaucoup insisté sur les nombreuses difficultés rencontrées en matière de procédures d’obtention de visas par les entreprises marocaines et, plus particulièrement, les acteurs et opérateurs du transport international routier (TIR).

La France lâche du lest mais sous conditions
Une séance de travail a été organisée à Rabat, jeudi 2 décembre, à laquelle ont participé, du côté français, Hélène Le Gal, ambassadrice de France au Maroc, les consuls généraux de France à Rabat et à Casablanca ainsi que la conseillère économique de l’ambassade et, du côté marocain, une délégation de la CGEM, composée de Samia Terhzaz, Abdelilah Hifdi, Rachid Tahri, Driss Bernoussi et Badr Alioua. Réunion qui s’est déroulée, selon la formule consacrée, dans un esprit de compréhension et de coopération constructive. Ce qui a permis à la partie marocaine d’exposer, en détail, les difficultés rencontrées par les entreprises nationales TIR, en matière d’obtention de visas, plus particulièrement en ce qui concerne les délais d’attente. De son côté, la partie française a souligné, chiffres à l’appui, que le nombre annuel de visas, délivrés par les consulats généraux de Rabat et Casablanca, a enregistré une progression continue durant les quatre dernières années. La rencontre s’est conclue sur une note positive, et la «FTL-CGEM est en mesure de rassurer les opérateurs de transport quant à la question des visas, en soulignant, qu’à l’avenir, il sera possible de l’obtenir chaque fois que le demandeur dispose d’un dossier solide, régulier et pratique».

Dans le même temps, la FTL-CGEM insiste auprès des entreprises de transport pour qu’elles veillent en permanence au respect des «règles du jeu». En effet, si du côté français, on a décidé de lâcher du lest, il a malgré tout été fait état de dossiers caractérisés par «des pratiques non transparentes», nécessitant des délais d’instruction plus longs. «Afin de dépasser ces pratiques et réduire les délais d’attente, souligne la FTL-CGEM, il a été convenu de la mise en place d’une procédure spécifique et claire, sur la base d’un cahier des charges qui sera élaboré selon une approche participative, permettant, à la fois, de faciliter le dépôt des demandes de visas et leur obtention, et de faire face aux différentes pratiques, contraires à l’éthique, que la FTL-CGEM dénonce constamment et condamne fermement. Il faut dire que les exportateurs marocains n’ont pas le choix et l’enjeu est de taille, étant donné que le blocage coïncide avec la campagne d’exportation des agrumes et primeurs, et au vu de la conjoncture mondiale actuelle.

Le pavillon étranger monopolise 95% du transport TIR du Maroc
Pour rappel, cette campagne se caractérise par la surchauffe du fret maritime, qui s’est traduite par la rareté des navires, des espaces et des conteneurs réfrigérés utilisés pour l’exportation de ce type de produits, comme l’a signalé l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX), en octobre dernier. Il faut rappeler que le pavillon étranger monopolise 95% du transport TIR du Maroc. À signaler que les camions européens bénéficient, quant à eux, d’une grande fluidité aux frontières marocaines, sans exigence de visas, au moment où les chauffeurs marocains sont bloqués, avec pour conséquence, de lourdes pertes liées à l’immobilisation de leurs véhicules. En réalité, cette tracasserie administrative cache mal la volonté de certains pays du vieux continent à entraver le positionnement du secteur marocain du transport et de la logistique, lequel, au cours de ses dix dernières années, s’est considérablement développé. Pour aller en Allemagne, par exemple, «il nous faut entre quatre et cinq autorisations de transit. C’est énorme !», dénonce un exportateur, exaspéré. La guerre des camions entre l’Europe et le Maroc aura bel et bien wlieu !

Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO



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