Comment le Maroc défend sa candidature
L’assemblée générale de la CAF, tenue vendredi à Casablanca, a été l’occasion de présenter la candidature marocaine pour l’organisation de la Coupe du monde 2026.
Fouzi Lakjaâ, président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), avait déjà annoncé la couleur. «Nous aurons le privilège d’avoir parmi nous l’ensemble de la famille du football africain en février, à l’occasion de la 40e AG de la CAF», avait-il annoncé, lors du dernier point de la presse du Comité de candidature Maroc 2026. Pour le comité, la séquence couvrant les mois de janvier et février avec le déroulé «CHAN, réunions du comité exécutif de la CAF et l’AG de la même instance» devait baliser le terrain pour s’assurer du soutien à la candidature marocaine par une large majorité des 53 pays membres de la CAF. Et le Maroc a mis les petits plats dans les grands pour séduire «la famille africaine» du foot.
Du Togo à l’Afrique du Sud
Le 2 février à l’hôtel Hyatt Casablanca, Ahmed Ahmed, président de la CAF, endosse définitivement le costume de nouvel homme fort du foot africain. Pour sa première AG, les 29 points ont été votés à l’unanimité. Cependant, les deux enjeux de cette AG ne figurent pas sur l’ordre du jour. Le premier est le maintien -ou non- du Cameroun comme pays organisateur de la CAN 2019. Le deuxième enjeu concerne la position de la CAF et de ses membres par rapport à la candidature Maroc 2026. Parmi les fédérations de football proches du Maroc, les positions sont déjà affichées. «La candidature du Maroc est une bonne chose et confirme les efforts déployés par ce pays dans le domaine. Nous soutiendrons le royaume pour que l’Afrique abrite cette compétition», déclare le colonel Kossi Akpovi, président de la Fédération togolaise de football. Même son de cloche du côté de Wallace Karia, président de la Fédération tanzanienne de football.«Nous soutenons à 100% la candidature marocaine», lance-t-il sans hésiter à la question des Inspirations ÉCO. À l’opposé, quelques fédérations préfèrent taire toute position sur le sujet, l’Algérie et l’Afrique du Sud en tête de liste. «Cette candidature est une bonne nouvelle pour le Maghreb. Pour l’instant, nous attendons de voir les éléments du dossier marocain pour pouvoir en juger la teneur», répond Bachir Ould Zemirli, vice-président de la Fédération algérienne de football. Ce wait & see est repris mot à mot par l’Afrique du Sud. Danny Jordan, l’influent président de la fédération sud-africaine, adopte la même position et botte en touche: «Il faut qu’on étudie le dossier marocain». Rappelons qu’il a été un redoutable concurrent du Maroc lors de la candidature pour la Coupe du monde 2010. «Le Maroc part, théoriquement, favori sur cet échiquier africain», promet Lakjaa. Said Belkhayat, membre de la CAF, joue la prudence en matière de pronostics. Avec son expérience au sein des arcanes de la CAF, Belkhayat rappelle qu’Issa Hayatou, candidat pour la présidence de la FIFA en 2002, avait obtenu 23 voix africaines sur les 54 possibles. «Les choses ont changé, le Maroc mène un travail de fond sur le continent», estime Belkhayat, optimiste. Durant cette campagne, le Maroc, à l’instar du trio États-Unis-Canada-Mexique, aura à compter avec la haute surveillance de la FIFA.
Annulation surprise du discours de Lakjaâ
Gianni Infantino, président de la FIFA, était l’invité de cette AG. L’Italo-suisse prépare sa réélection pour 2019. Le patron de la FIFA est-il intervenu pour annuler un discours de Lakjaâ, présentant la candidature marocaine? Rappelons les faits. Ahmed Ahmed annonce dans son discours à l’AG de la CAF que le président de la FRMF interviendra au point 26 sur «les raisons et les fondements de cette candidature», détaille le président de la CAF. Ahmed prend des pincettes pour ne pas froisser les pays opposés à la candidature marocaine: «Vous êtes souverains dans votre position, et le président de la CAF n’a pas à se substituer à vous». Mais à la surprise générale, le discours de Lakjaâ est annulé, Ahmed lève l’AG sans donner la parole à Lakjaâ. Que s’est-il passé entre-temps? Comme l’a constaté Les Inspirations ÉCO, Infantino et sa secrétaire générale, Fatma Samoura, ont quitté la salle en pleine AG accompagnés de Lakjaâ. Les trois personnalités reviennent quelques minutes plus tard. Le Maroc se contentera du passage de Rachid Talbi Alami défendant les chances du Maroc. Lors du point de presse suivant l’AG, Ahmed a dû s’expliquer sur ce camouflet. «Cette décision est due aux réformes opérées au sein de la FIFA. Il y a désormais des exigences éthiques. En respect à ces procédures, nous n’avons pas annoncé officiellement la candidature marocaine», se défend-t-il. «Le Maroc a profité de cette AG pour prendre contact avec les délégués des pays africains», rassure une source fédérale loin des projecteurs et des discours publics.
Gianni Infantino
président de la FIFA
Par le passé, il y a eu des interrogations au sujet des procédures d’octroi de l’organisation de cette compétition. Aujourd’hui, nous avons mis en place des procédures transparentes et saines. La FIFA va faire respecter cet engagement, et je demande à tous que cette procédure puisse être conforme à cet engagement. Il y va de notre crédibilité».
Ahmed Ahmed
président de la FIFA
Il y a une contradiction [dans la position de la FIFA, ndlr]. Le vote est à main levée, comment voulez-vous que le pays qui vote ne manifeste pas sa position? Tout le monde va savoir qui a voté pour qui lors du congrès. Pour cette raison, je ne suis pas neutre et j’annoncerai prochainement les formes de soutien au Maroc.».