«Triple AAA» : Une initiative concrète pour le continent

L’initiative pour l’Adaptation de l’agriculture africaine promeut et favorise la mise en place de projets concrets pour améliorer la gestion des sols, la maîtrise de l’eau agricole, la gestion des risques climatiques et les capacités et solutions de financement.
Lancée en amont de la COP22, organisée au Maroc, l’initiative pour l’Adaptation de l’agriculture africaine (AAA) vise à réduire la vulnérabilité de l’Afrique et de son agriculture aux changements climatiques. Elle promeut et favorise la mise en place de projets concrets pour améliorer la gestion des sols, la maîtrise de l’eau agricole, la gestion des risques climatiques et les capacités et solutions de financement. L’initiative constitue une réponse clé, non seulement aux changements climatiques, mais également à l’insécurité alimentaire. Son objectif est de mettre l’Adaptation de l’agriculture africaine au cœur des débats et des négociations climatiques et de capter une partie substantielle des fonds climat.
Dans le domaine de la gestion des sols, l’initiative pour l’Adaptation de l’agriculture africaine aux changements climatiques promeut et soutient trois grandes familles de solutions pour améliorer la gestion des sols : la fertilité des sols et la fertilisation des cultures ; l’arboriculture et l’agro-foresterie et les innovations agro-écologiques et la séquestration du carbone. Par exemple, comme solutions et préconisations pour les innovations agro-écologiques et la séquestration du carbone, l’initiative triple AAA recommande six pistes d’amélioration : la mise en place d’une agriculture de conservation basée sur le travail mécanique minimal du sol (pas de labour ni de semis direct), la couverture permanente du sol par un mulch de matière organique riche en carbone (paille et/ou autres résidus de récolte), les rotations et les associations culturales (incluant les légumineuses fixatrices d’azote) ; la mise en place de cultures intercalaires (entre les rangées d’arbres) ; le développement du compostage, de l’incorporation des résidus de cultures ; le développement de la micro-agriculture bio-intensive ; la mise en jachère ; le développement durable des oasis et le développement durable des zones agro-pastorales. Ces solutions visent à améliorer les sols africains qui sont fragilisés, parfois épuisés et marqués par une pluviosité insuffisante, des sécheresses fréquentes, une pression démographique, une surexploitation, des pratiques agricoles inappropriées, une insuffisance de l’utilisation des engrais, sans oublier des phénomènes notables comme l’érosion, la dégradation chimique (perte de nutriments, salinisation, acidification, etc.) et la dégradation physique (compaction des sols, ensablement, etc.). Des phénomènes qui sont aggravés par les effets du changement climatique. Concernant la maîtrise de l’eau agricole, l’Afrique est le continent qui souffre le plus de pénurie d’eau agricole. Environ 66% de ses territoires se situent en zones arides ou semi-arides et souffrent du manque d’eau.
Le continent a tendance à s’assécher encore davantage à cause du changement climatique : augmentation de la température et réduction des précipitations, avec des événements extrêmes plus fréquents et plus longs. Même les régions suffisamment pourvues en eau pâtissent du manque d’infrastructures de mobilisation, de stockage et de distribution pour l’irrigation des terres. En Afrique, la part de la superficie cultivable irriguée n’est que de 5%, alors que le potentiel irrigable est de 25%. L’irrigation du continent africain pourra se développer à travers une approche globale et une action concertée et volontariste. Aussi, les solutions préconisées par l’initiative pour l’Adaptation de l’agriculture africaine aux changements climatiques dans le domaine de la maîtrise de l’eau sont orientées résultats/production. Elles recherchent la complémentarité entre aménagements de mobilisation de l’eau, aménagements hydro-agricoles, aménagement des parcelles, exploitation et renforcement des institutions et mise en valeur. Le tout sans exclusion du volet dimension des domaines d’aménagement pour l’irrigation (grands périmètres, périmètres collectifs ou villageois, petite irrigation privée, aménagement des bas-fonds).
Dans ce cadre, cinq thèmes d’actions prioritaires sont identifiés, à savoir : le renforcement de la mobilisation du potentiel hydrique à travers la réhabilitation des ouvrages existants pour optimiser leurs capacités et la construction de nouveaux ouvrages structurants ; le développement volontariste de l’irrigation complémentaire entre l’irrigation à grande échelle par l’aménagement des grandes plaines, l’agriculture de bas-fonds et de décrue, et la petite irrigation villageoise et l’irrigation individuelle ; la poursuite du renforcement de la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) notamment pour la gestion des eaux transfrontalières ; la modernisation et la promotion des systèmes d’irrigation et de production plus économes en eau et plus productifs et puis l’accompagnement volontariste du développement de l’irrigation par le renforcement des capacités. Sur le volet gestion des risques climatiques, il faut savoir que l’Afrique est le continent le plus touché par les effets du changement climatique. Les aléas météorologiques : vagues de sécheresse, fortes variations de températures, violentes précipitations, mettent en péril l’agriculture et la sécurité alimentaire. L’Afrique est aussi l’une des régions au monde les moins bien préparées à ces risques météorologiques : les 2/3 des pays africains ont peu ou pas de capacités de gestion de ces risques.
Répartition équitable des fonds
Une bonne gestion des risques climatiques repose sur la qualité et la mutualisation des données recueillies, et sur une implication de l’ensemble des acteurs concernés. C’est pourquoi l’initiative triple AAA en a fait l’un de ses quatre axes d’intervention ; et propose trois solutions. Il s’agit de : développer des systèmes d’observation et de prévision notamment l’amélioration du réseau d’observation météorologique et climatique (densification et modernisation), l’amélioration des systèmes de prévision météorologique, le développement des systèmes agro-météorologiques de prévision des récoltes agricoles et des fourrages (traitement et analyse des données météo, agricoles et satellitaires), le développement des institutions d’observation de la terre (à partir de la télédétection spatiale, la cartographie, les SIG, le GPS et autres applications géomatiques) ; de développer l’assurance agricole indicielle, produit d’assurance basé sur des indices météo et satellitaires ; et enfin de développer des programmes de formation, académique et continue, notamment des formations en Systèmes d’information géographique, en agro-météorologie, en télédétection spatiale ; en systèmes de suivi de l’état des cultures et des fourrages, en application Web-SIG de diffusion de l’information agro-météo, etc. Enfin, en matière de renforcement des capacités et solutions de financement, cette initiative s’est fixé pour objectif d’obtenir une répartition équitable des fonds climat entre adaptation et atténuation. Elle s’engage à accompagner les projets AAA pour favoriser leur accès aux fonds climat (critères d’éligibilité et d’accréditation), et à suivre l’allocation de ces fonds. Elle a décidé de renforcer les capacités de financement des agriculteurs africains à travers la généralisation du micro-crédit aux petits agriculteurs, le développement du méso-crédit aux moyennes exploitations et le déploiement de solutions de bancarisation mobile.
L’initiative AAA à la COP22
Du 7 au 18 novembre à Marrakech, l’initiative AAA a été exposée au sein de la COP22, notamment dans l’espace d’exposition «Zone verte», tente innovation 2, Stands 401/403. L’espace AAA a notamment proposé aux participants à la COP22 une expérience immersive qui leur a permis de partager les enjeux cruciaux de l’Adaptation de l’agriculture africaine aux changements climatiques et de découvrir une sélection de solutions innovantes en phase avec l’AAA. À signaler que parallèlement à l’exposition, l’initiative AAA a fait l’objet de plusieurs conférences lors de la COP22.