Régionalisation avancée : déconcentration et décentralisation, les indispensables pour réussir
Dans cet entretien, Mbarka Bouaida, présidente de l’Association des régions du Maroc, revient sur les défis auxquels le chantier de régionalisation avancée fait face après plus de huit ans de mise en œuvre. Elle aborde également la question de l’implémentation effective de la déconcentration et de la décentralisation administratives, condition sine qua non pour l’aboutissement d’une régionalisation avancée effective.
Le Comité de pilotage stratégique de la mise en œuvre de la régionalisation avancée s’est tenu à Rabat. Quelles en est le bilan ?
Il faut tout d’abord rappeler que le Comité de pilotage stratégique (CPS) comprend les ministres signataires du Cadre d’orientation des compétences de la région (COCR), les walis de régions et les présidents des Conseils de régions. Ce comité, qui se réunit périodiquement, a été institué en décembre 2019 lors du premier colloque sur la régionalisation avancée.
Ses missions sont principalement l’opérationnalisation des compétences des régions et de veiller sur la convergence entre les actions du gouvernement et celles des Conseils régionaux. C’est dans ce sens que la réunion de ce dernier comité a été l’occasion de procéder à une évaluation du bilan de la régionalisation avancée. Celle-ci a permis d’instaurer un cadre institutionnel plus adapté aux spécificités et aux besoins des différentes régions du Royaume avec une plus grande participation des acteurs locaux dans la gestion des affaires publiques.
Il a été souligné également que les différentes régions ont pu bénéficier d’un appui de l’État très marqué pour la mise en place de leurs Programmes de développement régionaux. Ceux-ci, qui sont actuellement en phase d’exécution, portent sur des projets structurants touchant la promotion de l’investissement et de l’emploi. D’autres sujets ont été abordés tels que la question de l’eau, les barrages collinaires, les réseaux routiers ou encore l’emploi et la formation professionnelle.
Globalement, tous les participants s’accordent sur le fait que le processus de la régionalisation avance très bien. Par ailleurs, une feuille de route a été arrêtée lors de cette séance et des réunions interinstitutionnels seront programmées prochainement pour faire avancer le chantier royal de la régionalisation avancée.
Actuellement, après environ une décennie de mise en œuvre, le chemin pour le déploiement de la régionalisation reste parsemé d’embûches. Quels sont les obstacles auxquels il est encore confronté ?
Il faut noter en premier lieu que notre modèle de régionalisation avancée est relativement jeune, soit huit ans de pratique. C’est très peu par rapport aux pays qui nous ont devancés dans le domaine de la décentralisation. Mais malgré cela, le Maroc, sous les directives de SM le Roi Mohammed VI, est appelé à passer à la vitesse supérieure dans la concrétisation effective et efficiente de ce chantier.
Cependant, on ne peut passer sous silence les difficultés et défis rencontrés dans la mise en œuvre de la régionalisation avancée. Parmi ceux-ci, figurent, notamment, la nécessité de renforcer les capacités des acteurs locaux, d’améliorer la coordination entre les différents niveaux de gouvernement, de garantir une répartition équitable des ressources entre les régions, et de mettre à disposition les ressources humaines et financières nécessaires pour permettre aux régions d’exercer efficacement leurs compétences.
Quel regard portez-vous sur l’implémentation effective du processus de déconcentration et décentralisation administratives, qui est une condition sine qua non pour l’aboutissement d’une régionalisation avancée effective. Quid aussi du transfert de compétences qui est également un élément central ?
Ce qui il faut retenir, c’est que déconcentration et décentralisation vont de pair. C’est la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont mis en place une Charte nationale de la déconcentration pour venir en complément et support à la loi 111-14 sur les régions.
Aujourd’hui, il y a une feuille de route pour décliner les actions de mise en œuvre de cette charte, avec une commission interministérielle désignée à cet effet. En somme, une déconcentration et une décentralisation administratives bien mises en œuvre sont indispensables pour assurer le succès de la régionalisation avancée et pour promouvoir un développement équilibré et inclusif sur l’ensemble du territoire.
Les deuxièmes Assises nationales de la régionalisation avancée sont prévues en décembre 2024. Une occasion de dresser le bilan de ce chantier. Quels sont les principaux enjeux de cet évènement, après celui d’Agadir, en 2019 ?
Lors de cette réunion du Comité stratégique, il a été décidé de tenir le deuxième Colloque national de la régionalisation avancée en décembre 2024. Ce colloque sera une étape importante dans la consolidation et l’évolution de ce chantier royal pour le développement territorial du pays. Après le précédent rendez-vous à Agadir en 2019, ces Assises offrent une occasion unique de dresser un bilan approfondi et de définir les orientations stratégiques pour l’avenir de la régionalisation avancée.
Ainsi, le deuxième Colloque national sur la régionalisation avancée représentera un moment fort pour relever les défis, mesurer l’impact des politiques publiques au niveau régional et identifier les bonnes pratiques à partager et à généraliser entre les Conseils régionaux. Une commission scientifique et logistique sera mise en place avec la DGCT et l’ARM, pour les préparatifs de ce Colloque.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO