Rabat-Salé-Kénitra : un tissu entrepreneurial en mutation après la pandémie

Avec 51.546 entreprises actives générant 359 milliards de dirhams de chiffre d’affaires, la région Rabat-Salé-Kénitra révèle un écosystème entrepreneurial en recomposition. L’analyse 2023 menée par l’OMTPME met en lumière des dynamiques territoriales contrastées et une reprise économique différenciée selon les secteurs d’activité.
La région Rabat-Salé-Kénitra présente un paysage entrepreneurial complexe marqué par une reprise économique différenciée selon les territoires et les secteurs d’activité. Avec 51.546 entreprises personnes morales actives en 2023, cette région concentre une part significative du tissu productif national, tout en révélant des dynamiques contrastées lors de la période post-pandémique.
Une géographie économique polarisée autour de Rabat
La concentration géographique des activités économiques demeure l’une des caractéristiques structurelles de la région. La préfecture de Rabat maintient son statut de pôle économique dominant, hébergeant 43,4% des entreprises actives et générant 69,5% du chiffre d’affaires régional cumulé, soit 359 milliards de dirhams (MMDH) en 2023.
Cette prédominance s’accompagne toutefois d’une légère déconcentration au profit d’autres territoires. La province de Kénitra émerge comme un territoire dynamique, sa part dans les créations d’entreprises progressant de 17,7% à 25,3% entre 2017 et 2023.
Le chiffre d’affaires des entreprises implantées à Kénitra affiche une croissance annuelle moyenne de 19% dans la période post-Covid, contre 8,4% avant la crise. Cette performance illustre une redistribution progressive de l’activité économique régionale, sans pour autant remettre en cause la centralité de Rabat.
Des secteurs d’activité en recomposition
L’analyse sectorielle révèle une transformation graduelle de la structure économique régionale. Le commerce, secteur traditionnellement dominant, voit sa part relative diminuer de 27% à 26% du nombre d’entreprises, tandis que le secteur de la construction recule de 25,8% à 23,3%.
Cette évolution s’accompagne d’une montée en puissance du secteur des transports et entreposage. En termes de création de valeur ajoutée, l’année 2023 marque un tournant avec un montant total de 75.098 MDH, enregistrant une croissance de 21,2%.
Le secteur de l’information et communication représente désormais 18,5% de la valeur ajoutée globale, suivi des activités spécialisées, scientifiques et techniques (16,8%) et de la construction (16%). Cette diversification sectorielle témoigne d’une montée en gamme progressive de l’économie régionale.
L’emploi : moteur de la reprise économique
Le marché de l’emploi régional affiche une dynamique positive avec 700.088 emplois déclarés à la CNSS en 2023, soit une progression annuelle moyenne de 6,7% sur la période étudiée.
Cette croissance s’accélère dans la période post-Covid avec un rythme moyen de 5,2% contre 4,8% avant la pandémie. La structure de l’emploi révèle néanmoins des disparités significatives. 76,8% des employés perçoivent un salaire inférieur à 4.000 dirhams, et 58,8% touchent une rémunération n’excédant pas le SMIG.
Ces données témoignent de la prévalence des emplois à temps partiel et des défis liés à la qualité de l’emploi dans la région. L’emploi féminin représente 40% de l’effectif total, avec des disparités territoriales marquées. La province de Kénitra se distingue par une parité quasi-parfaite avec 50% d’emplois occupés par des femmes, contrastant avec celle de Sidi Kacem où cette proportion n’atteint que 23%.
L’entrepreneuriat féminin : un potentiel à développer
L’entrepreneuriat féminin constitue un enjeu de développement économique pour la région. Avec 7.674 entreprises dirigées par des femmes sur 46.124 analysées, soit 16,6% du total, la région dépasse légèrement la moyenne nationale de 15%.
Cette performance masque toutefois des disparités sectorielles importantes. Les femmes entrepreneures se concentrent principalement dans la santé humaine et action sociale (44,5%), les autres activités de service (44,5%) et l’enseignement (32,4%).
En matière d’accès au financement, les entreprises dirigées par des femmes ne bénéficient que de 6,8% de l’encours total des crédits, révélant un défi majeur pour le développement de l’entrepreneuriat féminin dans la région.
Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO