Maroc

Pêche : situation “tendue” pour la sardine

C’est une situation sclérosée que connaît la pêche pélagique et principalement celle de la sardine. La pénurie qui persiste depuis quelques mois suscite l’ire des opérateurs obligés de se rabattre sur le maquereau pour limiter les dégâts. Une raréfaction provoquée par la concentration géographique de la pêche de la sardine. Et le mutisme des autorités concernées ne fait qu’exacerber le malaise.

Le réchauffement climatique a certes apporté son lot de vicissitudes sur tous les plans, mais pour la sardine, il semble que les affres des turbulences provoquées par ce changement s’avèrent bénéfique pour le Maroc. En effet, selon une récente étude scientifique, le pays connaît une abondance de la ressource sans précédent. Les scientifiques expliquent ce phénomène par une migration inattendue des poissons vers le nord, sous l’effet du changement climatique. Et cette migration est bel et bien la conséquence du réchauffement climatique puisque les sardines et autres poissons pélagiques ont migré vers le nord le long des côtes de l’Afrique du Nord-Ouest.

Le chaos
Pourtant, à en croire les professionnels du secteur, une pénurie de la sardine persiste depuis près de quatre mois. Pour cause, un ensemble de facteurs problématiques. À ce titre, les opérateurs appellent à l’intervention des pouvoirs publics pour trouver des solutions appropriées à toutes les parties prenantes. Le fait est qu’un déséquilibre s’est produit au niveau des zones de pêche.

«Ce qu’il faut savoir, c’est que la configuration de la sardine est aussi importante pour la pêche côtière que les navires RSW (réfrigérés). Toute incidence sur la disponibilité pose problème au niveau de l’ensemble de la chaîne de valeur, dont les usines de transformation. Ce qui est le cas actuellement. Ce qui s’est produit, c’est il y a eu une sorte de rivalité géographique qui s’est créée, car entre 2021 et 2022, nous avons observé une abondance sur la zone allant de Laâyoune Nord, en passant par Sidi Ifni jusqu’à Casablanca. Au même moment, Dakhla souffrait d’une raréfaction de la ressource pélagique. Cette situation a entraîné une migration des armateurs de la région vers cette zone, ce qui a abouti à une forte concentration.», s’indigne Ali Oukacha, président de la Fédération des pêches maritimes (FPM).

Et d’ajouter que «cette concentration a contribué à la diminution de la sardine. Nous avons essayé de soulever la problématique auprès des autorités concernées, mais en vain. Au sein de l’INRH (institut national des ressources halieutiques), c’est le mutisme total». Pour l’heure, c’est le maquereau qui nous permet de sauver la mise». La FPM propose, pour désamorcer la situation, de procéder à un zoning à déterminer par les autorités concernées pour les différents opérateurs du territoire. Mais pour l’heure, l’administration semble faire fi des recommandations des professionnels et refuser de prêter une oreille attentive à leurs sollicitations. Pour Oukacha, «des forces «occultes» entravent le bon fonctionnement et la structuration du secteur de la pêche, pélagique en particulier».

Les intermédiaires spéculateurs
Dans le même registre, le président de la FPM n’a pas manqué d’évoquer les prix pratiqués sur le marché, pointant du doigt les intermédiaires qui renchérissent le marché. À titre d’exemple, le merlan vendu au consommateur à 60 dirhams le kilo est commercialisé par l’armateur à seulement 15 DH, soit un gain de 300%.

Pour la sardine, en temps normal, elle ne devrait pas excédée, 10 DH le kilo. Aujourd’hui, elle se vend à 25 DH, vu la situation. Pour rappel, la quantité de sardines pêchée au Maroc, sur l’ensemble de l’année 2023, a atteint 600.000 tonnes.

S’agissant de l’étude, l’analyse s’est basée sur 2.363 échantillons de chaluts et 170.000 kilomètres de relevés acoustiques marins effectués sur une période de 20 ans (1995-2015). L’étude a abouti à la conclusion d’une augmentation significative de la température du grand écosystème marin du courant des Canaries, qui s’étend du Maroc au Sénégal, au cours des 34 dernières années. Elle a également montré que l’aire de répartition des sardines s’est considérablement déplacée vers le nord, à un rythme de 181 kilomètres par décennie, depuis 1995.

En outre, les populations de sardines ont augmenté dans les régions subtropicales et diminué dans les régions tropicales. Les chercheurs attribuent ces changements de tendance à long terme à une augmentation de la température moyenne à la surface de la mer et à un déclin de la productivité marine dans les régions méridionales du grand écosystème marin du courant des Canaries. Des perturbations bénéfiques pour le Royaume puisqu’elles ont donc entraîné une augmentation des captures de sardines au cours des dernières années, au delà des difficultés conjoncturelles sévissant actuellement.

Ali Oukacha
Président de la FPM
«Ce qu’il faut savoir, c’est que la configuration de la sardine est aussi importante pour la pêche côtière que les navires RSW (réfrigérés). Toute incidence sur la disponibilité pose problème au niveau de l’ensemble de la chaîne de valeur, dont les usines de transformation. Ce qui est le cas actuellement. Ce qui s’est produit, c’est il y a eu une sorte de rivalité géographique qui s’est créée, car entre 2021 et 2022, nous avons observé une abondance sur la zone allant de Laâyoune Nord, en passant par Sidi Ifni jusqu’à Casablanca. Au même moment, Dakhla souffrait d’une raréfaction de la ressource pélagique. Cette situation a entraîné une migration des armateurs de la région vers cette zone, ce qui a abouti à une forte concentration.»

 

Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO

 


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