Morocco today forum : une édition pour faire résonner la voix des femmes
C’est un fait, l’émancipation économique des femmes se heurte à d’innombrables obstacles socio-économiques, et la crise sanitaire a freiné davantage leur combat. Ainsi, la pandémie aurait fait perdre 36 ans à l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde. Malgré tout, plusieurs avancées collectives, visant à conférer à l’autonomisation des femmes une place centrale dans la société, ont été enregistrées. La tenue de la 5e édition de Morocco today forum en fait partie.
Face aux défis personnels, familiaux et structurels, les femmes peinent à s’autonomiser. Cette édition, qui se tient sous le thème «Femme, acteur incontournable du développement du Maroc», se veut une occasion de lever le voile sur les obstacles qui entravent le développement de la condition de la femme marocaine. Elle entend également expliquer comment les leviers conceptuels, notamment le cadre législatif, les infrastructures, les politiques publiques, les technologies et la communication et sensibilisation, permettraient de donner à la femme marocaine la place qui lui revient de droit, et d’en faire un véritable pilier du développement du pays. N’ayant pas pu assister comme prévu à l’évènement, Aziz Akhannouch, le Chef du gouvernement, a adressé, néanmoins, un message en visioconférence, relatant les nombreux caps franchis par le Maroc dans la valorisation de la place de la femme dans la société.
Il a également fait part des progrès réalisés quant à l’inclusion de la femme citant, à titre d’exemple, le nombre actuel des députées, qui s’élève à 96 contre 81 en 2016. Il en va de même pour la composition du gouvernement qui compte à présent six ministres femmes contre une seule en 2016. Akhannouch a, par ailleurs, fait part de l’initiative gouvernementale visant la mise en place de plusieurs mesures qui contribueront à l’augmentation du taux de participation des femmes, dont la création d’un Comité national pour l’égalité des genres.
Hors de question que la femme soit privée de ses droits
L’autonomisation économique des femmes et leur accès au monde du travail constituent un facteur clé pour la relance économique. C’est le message que Awatif Hayar, ministre de la Solidarité, de l’insertion sociale et de la famille, a rappelé, indiquant que le gouvernement a pour objectif de donner un coup de boost à l’autonomisation des femmes en la portant à 30%, et ce, en conformité avec les recommandations du Nouveau modèle de développement.
Elle a également fait état de la mise en place d’une cellule pour la prise en charge des femmes victimes de violence. Il convient de noter qu’en 2020, 16.590 affaires de violences faites aux femmes ont été enregistrées au Maroc, selon un bilan des services de la gendarmerie royale. Militante dans l’âme, Hayar a vivement défendu la cause féminine en insistant sur l’implication et la mobilisation globale de tous les acteurs, qui doivent avoir une compréhension et une connaissance approfondies de la situation actuelle.
«Aujourd’hui, il est hors de question que la femme soit privée des droits légitimes que lui confère la loi», a-t-elle martelé. Même son de cloche pour Nabila Rmili, maire de Casablanca, qui a souligné la nécessité urgente de dresser une feuille de route novatrice inclusive.
«Aujourd’hui, on a un taux d’activité de 20%. C’est inadmissible d’avoir un chiffre pareil», a-t-elle déploré. Et d’ajouter que les Casablancaises devraient pouvoir circuler dans les rues de la ville en toute sécurité, de nuit comme de jour. C’est en ce sens que plusieurs actions ont été menées, parmi lesquelles la réhabilitation des crèches et le développement de moyens de transports sûrs et fiables. Comme il a été procédé à l’installation de caméras de surveillance et à l’équipement des moyens de transport d’un réseau wifi, ainsi qu’à l’instauration d’un espace dédié aux femmes enceintes. Elle a aussi appelé à recruter davantage de femmes conductrices en appelant en conclusion «tout homme à soutenir toutes les femmes autour de lui».
La «gent masculine» a également participé à ce débat. Younes Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, a ainsi évoqué son intérêt pour l’expérience vécue par certaines femmes au quotidien, et que les indicateurs de politique publique n’arrivent pas à capter. Il faut, selon lui, œuvrer à améliorer leurs conditions de travail, en vue de parvenir à un équilibre économique sur le marché de l’emploi. «Une véritable réforme structurelle est nécessaire, mais non de manière «accessoirisée», comme cela a été le cas pendant longtemps», a-t-il souligné.
S’intéressant aux mécanismes de suivi, Ghita Lahlou, PDG de Saham outsourcing fund, estime que le problème ne réside pas dans la connaissance de la solution mais de la capacité à la mettre en œuvre. Beaucoup de femmes n’ont pas connaissance de leurs droits, et ne cherchent pas à les connaître. Celles qui luttent sont les femmes divorcées, ayant des enfants ou des charges et des conditions qui les poussent à lutter. Selon elle, il n’y a pas de problème au niveau de l’éducation, citant, notamment, le taux de diplomation, qui est majoritairement en faveur des femmes.
C’est au niveau du marché de l’emploi qu’il y a un hic. Les femmes se marient et abandonnent leur carrière, quittent leur poste après avoir été agressées, ou refusent des promotions parce qu’il y aura la «contrainte» d’une éventuelle mobilité. La recommandation de Lahlou pour remédier à ces inconvénients réside dans un leadership qui puisse fédérer tout ce dispositif. Toutes les parties prenantes doivent s’y atteler en étant capables de parler d’une seule voix et d’avancer avec les femmes.
Organisé par le Groupe Le Matin, le MTF offre une plateforme de débats, d’échanges, de partage d’expériences et d’analyses avec les acteurs et parties prenantes qui agissent pour la promotion de la condition de la femme. L’objectif final étant d’identifier des quick-wins et des recommandations, rassemblés dans «La Déclaration du MTF» (Morocco today forum), pour permettre à la femme de devenir une actrice principale du développement inclusif au Maroc.
Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO