Maroc

Métiers mondiaux : des chiffres à l’export qui font débat !

Les derniers chiffres de l’Office des changes viennent d’être publiés et suscitent des réactions variées d’un secteur à l’autre. Détails. 

L’industrie de l’électronique et électricité et le secteur automobile enregistrent les plus fortes augmentations des ventes à l’export, à fin février 2023. A y voir de plus près, les ventes du secteur automobile enregistrent une forte hausse à l’exportation, avec une augmentation de 40,5% par rapport à la même période en 2022, grâce à la progression des ventes dans tous les segments du secteur.

Juste après, c’est l’industrie de l’électronique et électricité qui s’est démarquée positivement avec des exportations en hausse de 36,4% par rapport à la même période en 2022, principalement grâce à l’augmentation des ventes des composants électroniques et des fils et câbles. L’industrie du textile et cuir connaît une croissance de ses exportations de 15,1%, attribuable à la hausse des exportations de vêtements confectionnés, de chaussures et des articles de bonneterie.

De leur côté, les exportations du secteur agricole et de l’industrie agro-alimentaire ont augmenté de 1,3% par rapport à la même période en 2022, tandis que les exportations du secteur des phosphates et dérivés ont diminué de 25,3%. En somme, on constate que les différents métiers mondiaux du Maroc ont connu des évolutions variées de leurs exportations à fin février 2023, avec des hausses importantes pour l’industrie de l’électronique et électricité et le secteur automobile, et des augmentations plus modérées pour l’industrie du textile et cuir, le secteur agricole et l’industrie agro-alimentaire. Les phosphates et dérivés ont, quant à eux, enregistré une baisse significative de leurs exportations.

Secteur des phosphates et dérivés : Pourquoi une baisse si significative ?
Selon l’Office des changes, les exportations du secteur des phosphates et dérivés ont atteint 10,960 milliards de DH à fin février 2023, en baisse de 25,3% par rapport à la même période en 2022. Cette baisse est principalement due au recul des ventes d’engrais naturels et chimiques (-22,3%), d’acide phosphorique (-37,8%) et de phosphates (-17,5%). Cette évolution est préoccupante pour un secteur qui représente une part importante des exportations et de la croissance économique nationale. Pour comprendre les causes de cette baisse, il convient d’analyser plusieurs facteurs. Tout d’abord, la situation sanitaire mondiale a eu un impact négatif sur la demande en engrais et en phosphates, principalement en Asie et en Europe. En outre, la hausse des prix des matières premières et la concurrence des producteurs chinois pèsent sur les exportations marocaines. Soulignons que le secteur des phosphates et dérivés est fortement dépendant de l’économie mondiale et de la demande en matières premières.

Secteur du textile : début d’année difficile et chiffres qui suscitent l’étonnement
Dans le secteur du textile et habillement, les confectionneurs marocains font face à de nombreuses difficultés, notamment des commandes sporadiques et des prix bas. Contacté par Les Inspirations ÉCO, un analyste proche de l’AMITH exprime son étonnement au vu des chiffres de l’Office des changes.

Ces derniers concernant le secteur textile et habillement marocain sont-ils représentatifs de la réalité ? C’est la question que soulève notre source proche de l’AMITH, qui met en lumière des anomalies dans la compilation des données et souligne les difficultés rencontrées par les confectionneurs.

Concernant le secteur du textile et habillement en particulier, notre source confirme que les confectionneurs ont connu un début d’année très difficile. Beaucoup de PME ont préféré arrêter leur activité en attendant qu’il y ait au moins une visibilité d’un mois. Ce fut le cas en mars où aujourd’hui toutes les capacités sont saturées avec une visibilité jusqu’à fin juin. On peut considérer que les deux premiers mois de l’année, les usines de confection étaient en mode «usine à la tâche», sollicitées pour des dépannages, commande par commande, à des prix de plus en plus bas.

«Ces prix obligent les industriels à sous-déclarer la CNSS (Caisse nationale de sécurité sociale) ou à ne pas la déclarer du tout, ce qui entraîne des risques pour les employés et des conséquences pour les entreprises en cas de contrôle. D’ailleurs, la semaine dernière, la CNSS a opéré des avis à tiers détenteurs (ATD) sur les comptes de certaines entreprises de confection qui se sont retrouvées dans l’impossibilité d’honorer les salaires de leurs employés, entraînant leur fermeture immédiate», explique notre source. La pratique n’est pas nouvelle pour l’administration. L’Avis à tiers détenteur est une procédure qui permet à l’administration de récupérer une créance (un impôt ou une taxe) en sollicitant une autre personne que le débiteur, elle-même détentrice de la somme due (généralement la banque).

Selon notre source, «cette situation pose la question du modèle économique marocain qui permet la sous-traitance d’Inditex sans aucune valeur ajoutée et qui autorise la fraude de la CNSS au profit de ce dernier dont les bénéfices ont explosé en 2022. Est-ce que le Maroc va continuer à subventionner l’activité d’Inditex en lui permettant de faire travailler des sous-traitants qui ne pourront jamais honorer les charges de la CNSS ? Depuis début mars, les confectionneurs sont sollicités, mais est-ce juste un report de l’échéance que le secteur vit depuis 2008 ? Il est indéniable que le secteur de la confection au Maroc a connu des hauts et des bas au cours de la dernière décennie. En effet, il a dû faire face à de nombreux défis, notamment la concurrence des pays asiatiques et la hausse des coûts de production. Malgré cela, le Maroc a réussi à maintenir une position de leader dans le secteur de la confection, grâce à une main-d’œuvre qualifiée et à des coûts de production relativement faibles. Cependant, comme le souligne l’analyste proche de l’AMITH, la situation actuelle pose des questions importantes quant à la durabilité du modèle économique de sous-traitance d’Inditex au Maroc. En effet, le modèle actuel de sous-traitance, qui consiste à ne pas accorder de valeur ajoutée aux confectionneurs et à leur faire supporter les coûts élevés de la CNSS, semble de plus en plus insoutenable.

95% des confectionneurs n’apportent que la valeur ajoutée de la fabrication pure et simple
Concernant les chiffres de l’Office des changes sur lesquels s’interroge l’analyste, ce dernier souligne qu’ils «intègrent le prix de la fabrication ainsi que le coût de la matière tel que mentionné dans les documents de la douane. En tenant compte de l’inflation et du surcoût des matières premières, on peut constater une surenchère dans les chiffres. Mais la réalité est que 95% des confectionneurs n’apportent que la valeur ajoutée de la fabrication pure et simple. L’Office des changes doit libérer ces chiffres pour affronter la réalité du secteur».

Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO


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