Le Brésil sort-il vraiment de la récession ?

Assouplissement monétaire, ventes aux enchères… tous les moyens sont bons pour renflouer les caisses vides de l’Etat. Des mesures qui semblent porter leur fruit dès cette année, puisque les indicateurs commencent à basculer au vert. La première économie d’Amérique latine a même enregistré une légère croissance durant deux trimestres consécutifs.
La banque centrale du Brésil a ralenti mercredi le rythme de son assouplissement monétaire, mais a signalé qu’elle restait susceptible de ramener ses taux d’intérêt à des plus bas record le mois prochain, dans une tentative de soutenir la reprise balbutiante tout en gardant le contrôle de l’inflation. Les neuf membres du comité de politique monétaire de la banque, appelé Copom, ont abaissé le taux de référence Selic de 75 points de base, à 7,50%, après quatre baisses consécutives de 100 points de base chacune. Une décision à laquelle s’attendaient nombreux économistes. Il faut dire que le Brésil -qui avait initié cette politique monétaire il y a pratiquement une année- est revenu de loin.
En effet, à la même période de l’année dernière, le taux directeur s’élevait à 14%, soit un des niveaux les plus importants de la planète. Cette démarche d’assouplissement représente ainsi une tentative de relance de l’activité économique au Brésil alors que le pays vit la pire récession jamais connue. Tous les moyens sont bons pour redresser la barre. D’ailleurs, afin de remplir les caisses vides, le gouvernement brésilien a organisé ce vendredi des enchères de blocs pétroliers offshore pré-salifères en présence des majors et dont il espère tirer un maximum de profit. En somme, huit blocs ont été proposés lors de deux séries d’enchères qui devraient rapporter à l’Etat 7,75 milliards de réais (2,09 milliards d’euros) de « bonus à la signature », puis beaucoup plus ensuite avec les accords de partage de production, selon l’agence nationale du pétrole brésilienne. Au final, ce sont 16 compagnies pétrolières qui ont participé aux adjudications, dont les majors ExxonMobil et Shell. Le produit des enchères devra ainsi apporter une bouffée d’oxygène à Brasilia, qui a lancé un vaste programme de mesures d’austérité (en plus du gel des dépenses publiques et les coupes dans les aides aux plus pauvres) et de privatisations afin de remettre l’économie sur les rails, après deux années de récession historique. Les blocs du «pré-sal» (gisements enfouis sous une épaisse couche de sel) ont un énorme potentiel, tout en posant d’immenses défis sur le plan technologique pour des forages dans les profondeurs de l’Atlantique à un moment où le marché pétrolier mondial est déprimé. Mais le nouveau président brésilien, Michel Temer, a réécrit les règles pour rendre les enchères plus attrayantes. Il a mis fin à l’obligation qui était faite jusqu’à présent aux compagnies étrangères de laisser Petrobras — compagnie étatique qui émerge à peine d’un gigantesque scandale de corruption — être l’opérateur et détenir au moins 30 % dans les blocs de pré-salifères. Cette disposition ouvre plus grand la porte pour les compagnies étrangères au Brésil. Les vainqueurs des enchères seront les plus offrantes pour le gouvernement dans le cadre des accords de partage de production. D’ailleurs, Un consortium conduit par Royal Dutch Shell et Total viennent de remporter le droit d’explorer un bloc pré-salifère jugé prometteur au Brésil. Les deux compagnies pétrolières se sont ensuite engagées à fournir au gouvernement 11,53% de la production après coûts. Cette opération intervient quatre ans après les dernières enchères de pré-salifères.
Au total, le gouvernement espère obtenir plus de 80 milliards de dollars (environ 68 milliards d’euros) lors des ventes échelonnées jusque fin 2019. L’on peut dire qu’avec ces mesures, le Brésil réussi à sortir la tête de l’eau. Au terme du second trimestre, le PIB a enregistré une croissance de 0,2% après une progression de 1% au premier trimestre (contre une chute de 3,8% en 2015 ou encore de 3,6% en 2016). En début d’année la reprise a été alimentée par de bonnes récoltes et des exportations dynamiques. Cette fois c’est la consommation des ménages qui redémarre. Une bonne nouvelle pour les analystes qui s’attendent à une croissance de 0,4% cette année. Certes la croissance reste faible mais ils tablent sur 2% dès 2018.Une reprise économique qui pourrait se trouver, pourtant menacée par les scandales de corruption touchant sa classe politique. Le pays est entré dans une nouvelle période d’instabilité politique qui pourrait menacer l’amélioration conjoncturelle.
Le taux de chômage en baisse
Autre bonne nouvelle pour le président Michel Temer qui a du faire face -dès son arrivée- à un des pires scénarios économiques dans l’histoire du Brésil. La baisse du taux de chômage se poursuit pour atteindre 12,4% au troisième trimestre, contre 13% au deuxième, une nouvelle fois sous l’impulsion des emplois créés dans l’économie informelle, selon les chiffres officiels publiés ce mercredi. Il s’agit du sixième recul consécutif du chômage -en trimestres glissants- avec une baisse de 0,2 point par rapport à la période juin-août. Il y a un an, sur la période mai-juillet 2016, le taux de chômage était de 11,6%. Il a atteint son pic au premier trimestre de cette année, à 13,7%. En juillet dernier, le Sénat a adopté une vaste et controversée réforme du code du travail, une des mesures d’austérité appliquée par le gouvernement afin de rassurer les investisseurs, après deux années consécutives de récession.