Justice : les plans de réforme s’adaptent à la crise sanitaire
Les mesures préconisées pour maintenir la cadence normale de fonctionnement des juridictions forment l’ossature du plan d’action du département de la Justice. Le guide de la gestion administrative des juridictions impose l’élaboration de plans de reprise normale des audiences.
L’impact de la Covid-19 sur le fonctionnement des différentes catégories de juridictions occupe une place centrale dans le plan d’action du gouvernement. L’implication du département de la Justice dans le volet administratif est nécessaire sachant que les justiciables émettent des craintes quant à la dispense normale des services rendus aux usagers, ainsi qu’au maintien de la cadence normale de tenue des audiences. Après la nouvelle répartition des fonctionnaires dans les différents services, des comités internes ont été créés au sein de chaque tribunal pour superviser l’application des mesures préventives et veiller à la continuité des services rendus. Concernant les chantiers en cours, le guide élaboré par le département impose «de fixer les priorités en fonction du degré d’importance des projets et de tenir compte du fait que la nouvelle répartition des effectifs n’impacte pas le fonctionnement normal du service concerné». Pour limiter le recours au documents papier et les déplacements au siège des tribunaux, la tutelle prévoit la digitalisation de plusieurs services.
Les données du plan stratégique
Il faut dire que le recouvrement des taxes judiciaires et des amendes ainsi que la dématérialisation des procédures au niveau des guichets figurent parmi les urgences du moment, en vue d’assurer aux jugements rendus leur force exécutoire. Une expérience pilote entamée en juin dernier au niveau du Tribunal de commerce de Rabat vise à assurer le paiement électronique des recettes dues aux juridictions. «Cette expérience sera généralisée petit à petit au niveau des tribunaux selon un plan précis, en parfaite coordination avec les responsables judiciaires et administratifs et le Centre monétique interbancaire», indique le plan d’action pour l’année 2021. À partir de ce mois de septembre, ajoute la même source, l’ensemble des tribunaux doivent obligatoirement retrouver leur cadence normale de fonctionnement. Outre le suivi du déroulement des procès, les services numériques actuellement disponibles assurent l’accès à la plateforme des caisses des tribunaux, sans oublier les services liés à l’obtention de plusieurs types de documents. À l’ordre du jour, on trouve la facilitation de l’accès des plaideurs à la jurisprudence, y compris celle de la Cour constitutionnelle, ainsi qu’aux avis du Conseil supérieur de l’autorité judiciaire. Parmi les limites constatées figurent l’insuffisance du nombre d’huissiers, la faiblesse de leur formation ainsi que des obstacles relatifs au Code de la procédure civile en vigueur. Pour rappel, la dernière étude réalisée sur les délais de jugement montre que ceux-ci varient de 166 jours pour les juridictions commerciales à 330 jours pour celles d’appels. Concernant le domaine pénal, pour améliorer les sources d’information du ministère, de nouvelles applications informatiques ont été élaborées, permettant d’arrêter des statistiques fiables au niveau des tribunaux. Un programme de liquidation des affaires sera aussi mis en place à travers le renforcement des ressources humaines et des moyens logistiques.
Les priorités de 2021
Il s’agit de renforcer la coordination entre les missions administratives dont s’occupe le département de tutelle et celles confiées au Conseil supérieur de l’autorité judiciaire. L’instance conjointe chargée de la coordination en matière d’administration judiciaire devra par conséquent assurer ses fonctions afin de renforcer l’indépendance de la justice. Composée de 14 membres, l’instance de coordination devra réaliser toutes les études de diagnostic portant sur l’administration judiciaire, «selon les données et les statistiques fournies par les tribunaux, en fonction de ses besoins en ressources humaines et matérielles pour lui permettre de mener à bien ses missions». Les juridictions du pays devront, elles, s’appuyer sur les missions de l’instance pour réaliser leurs rapports de performance, et élaborer les programmes de formation des responsables judiciaires «en fonction des propositions de l’Institut supérieur de la magistrature».
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco