Maroc

Économie nationale : l’inflation fait de la résistance

Les récentes statistiques du Haut commissariat au plan confirment un léger repli de l’inflation en mars, porté par la baisse des prix alimentaires. Mais derrière cette accalmie apparente, les tensions inflationnistes persistent. Plusieurs économistes pointent le vieillissement du panier de référence et appellent à une révision de la grille de consommation, pour que l’indice reflète mieux la réalité.

L’accalmie se confirme dans les indicateurs, mais l’inflation demeure un indicateur marqué des tensions socio-économiques. En mars 2025, l’indice des prix à la consommation (IPC) a reculé de 0,3% par rapport au mois précédent, soutenu principalement par une baisse de 0,7% des prix des produits alimentaires alors que ceux des produits non alimentaires restent inchangés.

L’inflation sous-jacente, reflet des évolutions durables hors fluctuation des prix volatils et des tarifs administrés, affiche une contraction mensuelle de 0,6% et s’établit à +1,5% sur un an. Ce signe apparent d’apaisement peine cependant à se traduire concrètement dans le quotidien des ménages.

«L’indice publié n’indique pas une baisse significative mais plutôt une stagnation. On parle de -0,3%, mais ce chiffre reste symbolique. En réalité, il traduit un statu quo», relativise l’économiste Omar Kettani.

Pour certains observateurs, cette baisse apparaît même inattendue, dans la mesure où le mois de Ramadan est traditionnellement associé à une hausse des prix.

«Ce mois s’accompagne souvent d’un renchérissement», rappelle Faouzi Mourji. Celui-ci remet par ailleurs en cause la composition du panier de référence, soulignant sa possible obsolescence. «Le panier commence peut-être à vieillir. Il faut réhabiliter la structure de la consommation et revoir la pondération accordée à chaque produit dans la dépense pour que l’indice reproduise la réalité», insiste-t-il.

Fortes disparités
Ce recul global masque d’importantes disparités internes. La diminution des prix des viandes, produits laitiers, œufs et huiles compense à peine la forte hausse des légumes (+5%) et des fruits (+1,7%). Une tendance qui révèle que certains produits essentiels continuent de peser lourd sur le budget des ménages, même lorsque les indices généraux suggèrent une amélioration.

À l’échelle territoriale, les baisses les plus prononcées ont été relevées dans les villes du Sud, notamment à Guelmim, Laâyoune et Dakhla, où les replis varient entre 1,1% et 1,8%. À l’inverse, Kénitra et Al-Hoceima enregistrent des hausses de 0,9%, reflétant des tensions locales persistantes.

En moyenne, l’inflation annuelle ressort à 1,6% en mars, sous l’effet d’une augmentation de 2,2% des produits alimentaires et de 1,1% des produits non alimentaires. Une dynamique certes modérée, mais persistante sur certains postes échappant partiellement au contrôle direct des autorités.

Anticipations
Dans ce contexte de tension sous-jacente, la politique monétaire menée par Bank Al-Maghrib revêt une importance stratégique. La récente baisse du taux directeur à 2,25% témoigne d’un assouplissement prudent, compte tenu des anticipations d’inflation qui restent ancrées autour de 2,2% à 2,4% pour les trois années à venir.

La marge de manœuvre demeure donc limitée, même si de nouveaux ajustements pourraient être envisagés en cas de fragilités accrues.

L’enjeu pour la Banque centrale consiste désormais à orchestrer une transition maîtrisée entre la normalisation monétaire post-inflation et une relance encore timide de la demande intérieure. La publication du HCP ne fait que confirmer cette ligne de crête.

L’inflation baisse, mais elle continue à faire de la résistance. Faut-il dès lors anticiper une stagnation prolongée ? Les indicateurs convergent vers une période de compression économique. Si l’inflation semble se modérer, elle demeure néanmoins présente.

Par ailleurs, la croissance reste entravée par des facteurs internationaux défavorables, des contraintes budgétaires persistantes et le manque de leviers internes décisifs. Sans un virage stratégique affirmé, le risque serait alors celui d’un enlisement discret mais durable.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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