Azemmour : ces us et coutumes millénaires qui perdurent au mois de Ramadan
Azemmour, une ville ancrée dans ses traditions, ses coutumes et ses rituels singuliers, s’épanouit avec une félicité particulière durant le mois sacré de Ramadan. Imprégnée de son héritage civilisationnel et culturel, la cité d’Azemmour brille de mille feux, offrant un témoignage vivant de la diversité et de la splendeur du Maroc.
«La femme zemmourie attache une importance particulière à ce mois béni», affirme Rachida Dachri, une native de la cité millénaire d’Azzemour. Dès le mois lunaire de Rajab, les femmes commencent les préparatifs, concoctant avec minutie les ingrédients de la «Zemmitta» : blé, orge, pois chiches, fèves, amandes, et herbes aromatiques se mêlent pour créer cette délicieuse symphonie culinaire.
«Après avoir grillé ces ingrédients sur le «ferrah» (une poêle en argile) vient l’étape du broyage, méticuleusement exécutée pour donner naissance à de fines poudres. Ensuite, avec délicatesse, ces mélanges sont tamisés, puis enrichis de miel, d’huile d’olive et de beurre, avant d’être façonnés en de délicates boules, prêtes à être dégustées lors du ftour, la rupture du jeûne, explique la même source.
Journées de labeur
Les journées des femmes d’Azemmour sont rythmées par la préparation minutieuse des ingrédients pour embellir la table du ftour. Bien que modeste, cette table est richement garnie de petits pains spéciaux appelés «batbout», pétris avec amour durant la première moitié de la journée, et de la célèbre «harira», soupe emblématique de la ville, dont la réputation n’est plus à faire. Rares sont les repas à Azemmour à ne pas incorporer de poisson, qu’il soit frit, grillé ou cuit dans un tagine.
En effet, la ville était jadis pourvue en aloses, poisson aux qualités gustatives incomparables, qui abondait dans la rivière Oum Er-Rbia. Enfin, le café parfumé, subtilement infusé avec diverses herbes, vient parfaire ce moment sacré du Iftar. Après le repas, poursuit Mme Dachri, les membres de la famille se dirigent vers la mosquée pour accomplir la prière d’Al Ichaa et les prières surérogatoires (Tarawih), perpétuant ainsi une tradition séculaire ancrée dans la foi et le respect des rites religieux.
Le labeur des femmes se prolonge dans la soirée, pour la préparation du «S’hour», dernier repas avant le jeûne. Celui-ci est généralement composé de «batbout», servis avec du beurre, du miel ou de l’huile d’olive, et accompagnés de thé à la menthe, ou à l’absinthe en hiver. En reconnaissance de ces efforts, ô combien laborieux, le mari offre à son épouse, lors de «Laylat Al-Qadr» (la Nuit du destin), une belle collection de présents, comprenant notamment des babouches et un «hayek» (large cape) de bonne facture. Les tables zemmouries se distinguent peu durant le mois de Ramadan, où trône invariablement la «Harira», soupe préparée avec des fèves, du coriandre, du persil et du céleri, mais aussi et surtout du «smen» (beurre salé), conservé à domicile depuis un à deux ans.
Amina Ayyash, autre résidente de la ville, affirme que celle-ci est rarement remplacée par d’autres soupes. Il était également des coutumes des Zemmouris, se rappelle-t-elle, de réserver un repas complet au «M’ssid», l’école coranique du quartier, outre l’habitude de partager leur ftour avec les visiteurs étrangers, en témoignage les liens de solidarité caractéristiques du mois sacré.
Le Nafar, l’étoile des nuits ramadanesques
Les traditions perdurent tout au long du mois, avec notamment la célébration des enfants qui jeûnent pour la première fois, et qui reçoivent, en récompense, des cadeaux pour les encourager et les motiver dans leur pratique religieuse. Les nuits de Ramadan sont animées par le «nafar», qui sillonne les quartiers pour annoncer l’heure du «S’hour».
En signe de gratitude pour son rôle, les familles lui offrent des dons généreux en sucre, en argent, en nourriture et autres. «Laylat Al-Qadr», quant à elle, revêt une importance particulière, marquée par la préparation du couscous et la célébration des jeunes fillettes, qui sont parées de vêtements traditionnels et de dessins au henné sur leurs mains. En dépit des avancées technologiques et des changements sociaux, les traditions d’Azemmour perdurent avec une nostalgie palpable, témoins vivants d’un passé glorieux et d’une identité préservée. Ces us et coutumes séculaires, véritables trésors de la culture marocaine, continuent d’enchanter et d’unir les habitants d’Azemmour dans un élan de fierté et de respect pour leur héritage.
Sami Nemli Avec Agence / Les Inspirations ÉCO