Les Cahiers des ÉCO

Crédit Bureau : Le Maroc se place sur l’échiquier international

Élargir le périmètre du Credit Bureau aux fournisseurs de données non financières (notamment les opérateurs télécoms, les régies eau/électricité), permettra d’établir une meilleure évaluation du profil risque des personnes bancarisées et non-bancarisées prétendant à un emprunt. Un dispositif qui permettra également au Maroc de gagner quelques places au Doing Business et attirer ainsi davantage d’investisseurs. Détails.

Bank Al-Maghrib travaille, actuellement, en étroite collaboration avec le ministère de l’Économie et des finances pour faire évoluer très rapidement le cadre légal et réglementaire des Crédits Bureau. Et ce, «afin d’élargir son périmètre à d’autres fournisseurs de données non-financières, notamment les opérateurs télécoms, les régies eau/électricité», avait annoncé le wali de Bank Al-Maghrib, lors du séminaire régional organisé conjointement, jeudi dernier, par la Société financière internationale -membre du Groupe de la Banque mondiale- et la Banque centrale, sous le thème «Utilisation de la Centrale des risques pour les fonctions institutionnelles de la Banque centrale». Une démarche qui permettra, selon le wali, une meilleure accessibilité au crédit pour les personnes non-bancarisées, comme l’a démontré l’expérience des pays pionniers dans ce domaine. Élargir le périmètre du Crédit Bureau à d’autres fournisseurs de données servira ainsi à une meilleure évaluation du profil de risque des personnes bancarisées ou non-bancarisées, souhaitant contracter un crédit. Un projet de loi serait même en cours de préparation.

Bank Al-Maghrib s’est ainsi inspiré des meilleures pratiques internationales pour exploiter des données provenant de multiples sources afin de surveiller, ente autres, le risque systémique du pays tout en répondant à l’évolution de la réglementation financière imposée par les nouvelles normes internationales. En effet, la gestion des risques occupe une place centrale dans le processus de détermination de la solvabilité des clients. Il faut dire que dans de nombreux pays, l’information est devenue une denrée à forte valeur ajoutée et le secteur financier (notamment les banques, sociétés de financement, associations de microcrédit) a, semble-t-il, intégré cette «variable»… Si les pays anglo-saxons ont opté par exemple pour un modèle se basant sur des centrales d’informations qui développent tout un business autour du partage des données d’intérêt général, le modèle européen privilégie, quant à lui, une logique de protection sous-couvert de protection des données individuelles. Le Maroc, à son niveau, a choisi d’externaliser cette activité en passant par un gestionnaire délégué. Le modus operandi consiste à ce que les données relatives au crédit clients soient fournies, dans un premier temps, par les institutions financières (établissement de crédit, sociétés de financement…) à Bank Al-Maghrib. Elle transmet, à son tour, ces données au Crédit Bureau qui compilera les antécédents de chaque client en vue d’établir, un rapport de solvabilité, et de retransmettre l’ensemble des données décortiquées à la Banque centrale. Des informations qui seront exploitées par la suite par l’établissement financier concerné, et ce, afin d’optimiser le risque relatif à un prêt donné. Bank Al-Maghrib avait, ainsi accordé le premier agrément en 2007, à la société Experian Services Maroc qui se chargeait de la centralisation et le traitement des données et dont l’information recueillie permettait d’avoir une idée sur l’endettement et les défauts de paiement de ses clients. Sa base de données comptait alors environ 5 millions de clients dont 200.000 entreprises et 10 millions de contrats (soit 93% de l’encours global des crédits distribués). Les deux nouveaux entrants (Dun & Bradstreet Crédit Bureau Maroc et Creditinfo) qui remplacent l’entreprise précédente, se sont engagés à proposer, en plus de l’usuel rapport de solvabilité, des services à valeur ajoutée, tels que le scoring ou encore la gestion du portefeuille. L’objectif étant d’élargir l’accès au crédit et réduire les créances en souffrance.

Pour ce faire, la Banque centrale espère centraliser un maximum d’informations sur les emprunteurs en espérant que le Crédit Bureau contribue fortement à protéger les droits des emprunteurs, à réduire les défauts de paiement, à accroître le taux d’accès au financement bancaire, pour qu’in fine, le coût des crédits puisse éventuellement se placer sur une courbe baissière. De ce fait, les informations contenues dans le rapport de solvabilité, communiqué par les Credit Bureau, renseignent sur les contrats en cours, les garanties, les informations négatives, le nombre de requêtes précédentes, l’historique d’ordres de paiement, les habitudes de remboursement… Un condensé de données qui révèle les opportunités que peuvent offrir les nouvelles technologies de l’information en termes d’échange, de collecte et de stockage de données, ainsi qu’en matière de cybersécurité et de protection des données personnelles. D’ailleurs tout un écosystème s’est constitué durant ces dernières années, encouragé par la loi n°09-08 relative à «la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel». Ce cadre réglementaire permet ainsi d’instaurer un climat de confiance entre les organismes publics et privés et leurs partenaires (clients, prospects, usagers ou actionnaires). La loi a été, entre autres, l’occasion de créer la CNDP (Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel) qui se charge de la supervision des différents organes ayant accès aux donnés personnelles. L’accès aux données pour les entités non-financières est tributaire de leur contribution au système de partage (les opérateurs télécoms peuvent également s’en servir pour mieux cerner la solvabilité des clients souhaitant migrer d’un contrat prépayé vers un contrat postpayé). L’introduction de nouveaux services, ainsi que l’ouverture de l’activité du Crédit Bureau aux données non-financières auraient pour effet d’améliorer le classement du Maroc dans le rapport «Doing Business». Entre 2009 et 2017, le Maroc a gagné 30 positions, passant du 131e rang au 101e en ce qui concerne le thème «Obtention de prêts». Du côté de l’«Étendue de l’information sur le crédit», le Maroc a gagné 6 points entre 2008 et 2017, passant de 1 à 7, soit pratiquement la même note que celle accordée aux pays de l’OCDE. Il faut dire qu’avant la création de la CNDP, le Maroc était classé parmi les pays ne disposant pas de cadre juridique régissant la protection des données personnelles, chose qui influençait négativement sur les investissements étrangers. 


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