PLF 2021 : la feuille de route de l’Exécutif
La priorité sera accordée aux projets en cours d’achèvement. Des modes alternatifs conçus dans le cadre de partenariats avec les opérateurs privés seront aussi mis en œuvre par le PLF 2021. Décryptage.
La finalisation des principales rubriques du projet de Budget 2021 est imminente, à l’approche du délai fixé aux ministères pour finaliser leurs prévisions. Dans ce cadre, ce sont les mesures portant sur les dépenses d’investissements qui accaparent l’attention de l’Exécutif. Les différents départements ont, en effet, bouclé les dotations qui seront réservées à l’investissement public, ainsi que celles d’équipement qui seront débloquées par le prochain Budget. La feuille de route du gouvernement, en cette étape d’élaboration de la loi de Finances 2021, insiste sur le fait que les administrations et les établissements publics devront d’abord assainir le foncier qui sera réservé aux projets «et laisser de côté tout projet n’ayant pas régularisé le foncier nécessaire à sa concrétisation». Les dépenses d’investissement devront aussi se limiter aux projets dont les procédures d’expropriation pour cause d’utilité publique ont bien été respectées. L’État devra procéder à «la réduction des subventions accordées aux établissements publics et consacrer ces dotations aux projets en cours d’achèvement». «Ces subventions seront conditionnées par la capacité des établissements publics à mobiliser des ressources propres», insiste-t-on dans la feuille de route de l’Exécutif.
La principale nouveauté attendue réside dans le recours «à des modes innovants dans le cadre du partenariat public-privé. La fixation des dotations d’investissement dépendra de l’engagement du secteur concerné à activer les nouveaux mécanismes de financement», indique la même source. En plus des établissements publics, les services d’État gérés de manière autonome (SEGMA) ainsi que les comptes spéciaux du Trésor devront être soumis aux mêmes normes en matière de réduction des dépenses. Concernant les établissements publics qui bénéficient du concours financier de l’État, une nouvelle exigence devra désormais être imposée : que ces structures préparent leurs prévisions sur la base d’une nomenclature budgétaire présentant de manière claire les projets bénéficiant des dotations prévues par le PLF 2021. Cette exigence est doublée de la nécessité de tenir une comptabilité spéciale axée sur les ressources et dépenses, ainsi que d’une autre comptabilité pour l’ensemble de ses opérations.
Le gouvernement veut respecter la LOF
Les préparatifs pour le projet de Budget 2021 coïncident avec la 4e année d’application de la loi organique des Finances (LOF), qui insiste sur le principe d’efficience des dépenses publiques d’investissement. Le nouveau cadre de la programmation triennale du Budget impose en effet une logique rigoureuse pour les prévisions de dépenses, qui renforce le droit de regard des deux Chambres du Parlement lors du débat annuel autour dudit projet de Budget. L’actualisation annuelle de la programmation budgétaire devra pour sa part conférer aux ordonnateurs plus de visibilité dans la gestion et préciser le périmètre de la programmation triennale qui couvre les ressources et les charges du Budget général, des SEGMA et des comptes spéciaux du Trésor. D’un autre côté, l’État devra poursuivre la tenue d’une comptabilité générale basée sur les normes comptables marocaines pour le secteur public. Ceci permettra de déterminer le patrimoine de l’État et sa situation financière, ce qui va contribuer au renforcement de la discipline budgétaire. Plusieurs mesures seront déployées dans le cadre du PLF 2021, notamment l’adoption de la nouvelle nomenclature autour des programmes, et l’adoption de la démarche de performance qui consiste à responsabiliser les gestionnaires en les exhortant à préparer annuellement un projet de performance avant la fin du mois de juin.
PPP, des programmes régionaux pluriannuels
La mise en œuvre de la nouvelle loi sur le partenariat public-privé (PPP) est à l’ordre du jour du projet de Budget. En effet, le nouveau dispositif entré en vigueur opère un changement crucial au niveau des obligations contractuelles des collectivités territoriales, mais aussi en termes d’avantages escomptés pour les régions et les communes. L’État et les régions préparent actuellement le premier contrat pluriannuel devant les engager sur les trois prochaines années, avec en ligne de mire un ciblage des projets jugés prioritaires. Un audit préalable sera réalisé, portant sur les conditions de préparation des contrats et les périodes d’exécution. Un décret d’application de la loi sur le PPP, qui devra fixer le seuil d’investissement obligeant au recours à une étude d’impact, est en cours de finalisation. Les parties du contrat de partenariat public-privé devront définir conjointement la durée, les objectifs de performance, le partage des risques, la cession, la sous-traitance, ainsi que le contrôle des obligations du partenaire privé pour une durée du contrat qui variera de 5 à 30 ans. Dans le même registre, et pour recourir à une procédure exceptionnelle, le représentant de l’État doit formuler une demande expresse pour les projets jugés stratégiques, avec un décret d’application attendu pour réglementer le mécanisme du marché conclu de gré à gré. L’une des principales exigences est «l’évaluation préalable des besoins par la personne morale de droit public, qui devra faire l’objet d’une évaluation prenant en considération la complexité du projet et son coût tout au long du contrat», indique la feuille de route tracée par l’Exécutif.
Le pessimisme plane sur les indicateurs prévisionnels phares du projet
Les principaux indicateurs qui serviront de base à l’élaboration du projet de Budget, essentiellement ceux en relation avec les partenaires traditionnels du Maroc, ne sont pas rassurants. La sécheresse enregistrée pour la 2e année consécutive aggrave la situation, avec un taux de croissance qui sera ramené de 3,5% à –5%. Le déficit commercial a augmenté de 13%, en dépit de la baisse des exportations, sans oublier que les crédits bancaires ont gagné 20 MMDH durant les cinq premiers mois de 2020, avec une prédominance des fonds alloués par Damane Oxygène. Une baisse de 11% des transferts des MRE a été enregistrée à fin juin 2020, tandis que les IDE ont baissé de plus de 20% au titre des six premiers mois de l’année. L’intégration du secteur informel focalise l’essentiel des mesures qui seront préconisées dans le Budget de l’année prochaine. L’économie informelle, qui représente plus de 20% du PIB et pourvoit plus de 2,4 millions d’emplois -sans compter le secteur primaire- a été très impactée par la Covid-19. Le nombre de personnes ayant bénéficié de l’aide directe du Fonds spécial Covid-19 avoisine les 5,5 millions de personnes ; celles-ci sont les principales concernées par les mesures incitatives qui seront prévues par le projet de Budget 2021, à travers l’élargissement de la protection sociale et la facilitation des procédures administratives. L’Exécutif a également décidé que les dotations restantes du fonds spécial permettront d’accompagner les secteurs sociaux, avec un cadre plus clair pour la déclaration des salariés auprès de la CNSS.
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco