Marea Stamper. “En étant musicienne, je n’ai pas eu d’assurance maladie jusqu’à mes 37 ans !”

Elle est l’une des meilleures et ses sonorités sont uniques. The black Madonna revient à l’Oasis après avoir donné un concert mémorable en 2016. Elle a partagé la scène avec son confrère Derrick Carter ce dimanche soir en clôture du festival Oasis. Interview exclusive avec la vierge noire de la musique électronique.
C’est votre deuxième fois à Marrakech. Quel souvenir gardez-vous de l’édition 2016 et comment vous sentez-vous à l’idée de revenir jouer ici ?
La première fois a tellement été incroyable que j’ai tout de suite eu envie de revenir à Marrakech et Festival Oasis ! J’ai tellement bien été reçu, le show était génial, le public incroyable. Je savais que je voulais revenir et j’ai vraiment été ravie qu’on me propose de revenir encore cette année. Et de partager la scène avec Derrick est encore mieux ! C’est un ami mais surtout un DJ que j’admire beaucoup. J’adore jouer avec lui et réitérer l’expérience à Marrakech est magique, c’est le meilleur endroit pour, je crois ! (Rires).
Est-ce qu’il y a une préparation particulière lorsqu’on partage la scène avec un confrère ?
Quand tu choisis le bon musicien, le bon DJ avec qui partager la scène, ce n’est pas un problème. Tu peux être challengée à essayer des choses que tu n’as jamais essayé en côtoyant un autre musicien. C’est très enrichissant, on a même l’impression de s’immiscer dans le cerveau de l’autre, dans l’univers de l’autre ! Mais il faut une connexion au préalable, un respect.
Vous voyagez à travers le monde. Est-ce que vous vous vous adaptez à chaque public ou est-ce que c’est le même public partout ?
La préparation est la même et je me prépare déjà à m’adapter facilement à mon public et aux différents pays où je mixe. On ne sait jamais à quoi s’attendre lorsqu’on arrive quelque part. Je m’adapte plus à l’énergie, je ne jouerai pas de la même manière le premier jour d’un festival où tout le monde est frais que le dernier où tout le monde est fatigué. Je m’adapte à l’énergie de la foule qui est en face de moi…
Votre son est unique et vous semblez ne pas avoir peur de mixer des sons pop maintream à de la techno pure. Saviez-vous quel genre de DJ vous vouliez devenir dès le départ ?
Je pense que oui, mais cela prend beaucoup de temps pour y arriver. Ce dont j’étais sûre, c’est de vouloir être une Djette. J’ai commencé au lycée, j’ai 40 ans aujourd’hui. J’ai mis beaucoup de temps à apprendre, à avoir les compétences et la technique pour faire les choses que je voulais faire. J’ai eu des années de frustration et d’impatience où je voulais essayer de nouvelles choses mais j’en étais pas capable encore, je n’avais pas encore la base. C’est un long process mais je me sens plus zen, plus fluide. Aujourd’hui, je n’ai pas peur d’essayer de nouvelles choses, d’aller vers l’inconnu.
C’est peut-être une confiance que vous avez acquise avec une famille de mélomanes et de musiciens, non ?
Oui, c’est vrai ! Mon père est musicien, ma mère et mon beau père méritent de la reconnaissance aussi. Ils ne sont pas musiciens mais ce sont de vrais mélomanes, des collectionneurs de vinyles même.
Avez-vous une idée définie de ce que vous voulez faire ou misez-vous sur l’improvisation ?
En tant que DJ, je suis beaucoup dans l’improvisation mais en tant que productrice et compositrice j’ai une idée assez définie de là où je veux aller. J’essaie des choses, beaucoup de mauvaises choses à jeter à la poubelle ! (Rires). Certaines idées sont bonnes à prendre d’autre pas…
Quand vous êtes loin de chez vous, est-ce que votre regard sur l’Amérique change ?
Oui ! Absolument. Ça me manque et en même temps, cela me fait du bien d’être loin parfois. J’habite à Londres aujourd’hui où les soins médicaux sont gratuits. Ce qui n’est vraiment pas le cas aux États-Unis ! En tant que musicienne, je n’avais pas d’assurance maladie jusque l’âge de 37 ans ! Je ne peux pas croire que l’on vive comme cela au États-Unis. J’ai vécu mon enfance au Kentucky et ma vie de femme à Chicago, mes maisons me manquent chaque fois que j’entends un accent ! (Rires) mais il y a vraiment trop d’injustices en Amérique…
C’est pour cette raison que vous avez dit : «Si je n’étais pas devenue DJ, je serai politicienne !» ?
Oui ! (Rires). Je ne sais pas comment déconnecter ces deux parties de mon cerveau. Cela fait partie de moi. Et plus on voyage, plus on voit des choses et la vie différemment. On commence à devenir à citoyen du monde et l’on se sent concerné par ce qui se passe dans le monde ! Cette partie du Djing fait de moi une politicienne en quelque sorte parce que je me sens impliqué. Mon père est persuadé que je finirai politicienne ! Mais je suis sûre que non. Je suis tellement pas diplomate. La musique fait passer tellement plus de messages !