Culture

Livres. Le SIEL, une curiosité marocaine

Le Salon international de l’édition et du livre (SIEL) célèbre cette année sa 25e édition. Reportage dans les allées de cette «exception» culturelle marocaine.

Où peut-on croiser un poète satirique, un cheikh salafiste, un journaliste converti à la littérature, un philosophe marocain inclassable et un éditeur du Machrek proposant des traductions bâclées à bas prix ? Il suffit de se rendre au SIEL du 6 au 16 février à Casablanca. Le SIEL est un grand rassemblement annuel des Marocains. Le livre n’est que le prétexte. Même en semaine, des écoliers, des amoureux du livre ou des resquilleurs se rendent à cette «foire» en masse. À l’entrée poussiéreuse du salon, vous pouvez être interpellés par la présence de vendeurs de logements immobiliers faussement appelés «sociaux», un appel au don de sang et/ou la présence de resquilleurs voulant franchir le cordon de sécurité. Le SIEL comme manifestation culturelle majeur au Maroc résume l’ambivalence de la présence du livre dans notre espace social. Le SIEL est un succès populaire. Pourtant, vingt cinq ans après le lancement de ce salon, la circulation du livre demeure faible au Maroc. Le financement de cette fragile industrie dépend, essentiellement, de fonds publics. Et pourtant, ne boudons pas le plaisir de célébrer cet objet exquis qu’est le livre durant sa fête annuelle et populaire.

Chacun son programme
Imane, étudiante à l’Université Hassan II est une habituée du SIEL. «J’y venais en tant qu’élève avec les premiers de la classe», se remémore-t-elle, avec fierté. Elle y retourne aujourd’hui à la quête d’un livre demandé pour sa formation universitaire. «Je viens d’apprendre que le stock du livre a été épuisé», regrette-t-elle. Ce public d’étudiants, de chercheurs et d’initiés participent à l’activité économique du salon. Omar poursuit une formation en études islamiques à la faculté. Il est déjà à sa 3e visite au SIEL. «Je suis à la recherche d’ouvrages de référence dans le domaine de la chariâ», explique-t-il. Les éditeurs spécialisés dans la littérature et les études islamiques ont toujours constitué un large pan des exposants du salon. Les organisateurs ont été souvent critiqués pour la place qu’ils accordent à ces éditeurs. Le ministère se résout à réduire l’espace qui est accordé à cette catégorie d’éditeurs. Abderrahim est un instituteur à la retraite. C’est un inconditionnel du livre. «Rien ne remplace pour moi le plaisir de la lecture sur papier. La lecture sur internet ne me séduit pas. Je continue d’apprécier la lecture à l’ancienne, un crayon à la main», décrit-il. Son ami et collègue Abdelouahed n’est pas un passionné du livre. Ce qui ne l’empêche pas de soulever la sempiternelle question de l’intérêt populaire pour le salon et de la faible pratique de la lecture au Maroc. «Est-ce un paradoxe ?», s’interroge-t-il. Le rapport annuel sur l’état de l’édition et du livre au Maroc édité par la Fondation du roi Abdul Aziz Al-Saoud pour les études islamiques et les sciences humaines nous rappelle ce constat chaque année. En 2017-2018, 4.154 documents ont été édités dans tout le pays. 30% des ouvrages sont édités par des organismes publics (HCP, CCME, IRCAM, Affaires islamiques, etc.). Le poids de ces éditeurs publics se vérifie au SIEL. Ces institutions tiennent des stands de choix et contribuent à animer ce salon. Le financement public arrive à maintenir à flot les éditeurs marocains. En 2017-2018, 75,5% des livres édités au Maroc ont bénéficié d’une subvention publique du ministère de la Culture. Le soutien à l’édition du livre à caractère culturel couvre, à hauteur de 50%, les frais de son impression permettant ainsi de baisser son prix de vente à 50%, après contrat signé avec l’éditeur marocain. Cet «écosystème» permet aux livres et à ses acteurs, auteurs et éditeurs, de perpétuer cette pratique culturelle minoritaire, certes, mais vitale pour la vie d’un pays. L’engouement autour de la victoire de l’enfant Meriem Amjoun (9 ans) dans le challenge de lecture arabe. Un succès dans une compétition qui a connu une participation de 10 millions d’enfants venant de 44 pays. L’exploit de Meriem a été célébré lors du SIEL. Elle est le symbole de cette nouvelle génération férue de lecture. 


El Ouazzani : “Nous avons refusé 500 éditeurs cette année”

Hassan El Ouazzani est directeur du livre, des bibliothèques et des archives au ministère de la Culture. Il présente un premier bilan du SIEL : «Nous sommes en train de vivre une édition réussie à plusieurs niveaux. Le nombre d’exposants, de pays participants et d’offres éditoriales composées de 128.000 titres témoignent de la place du SIEL». Côté engouement populaire, cette édition devrait dépasser les 600.000 visiteurs. «Durant le premier dimanche, 58.000 visiteurs se sont rendus au SIEL», se félicite El Ouazzani. Ce succès pousse les organisateurs à limiter le nombre d’exposants. «Nous avons refusé 500 éditeurs cette année pour des raisons professionnelles et pour préserver la qualité du salon».


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