Culture

Le confinement, une occasion pour plonger dans la documentaires mania

Le documentaire a le vent en poupe ces dernières années. En effet, de nombreux cinéastes préfèrent s’exprimer à travers le réel. Zoom sur cinq documentaires qui ont marqué ces trois dernières années, disponibles en streaming. Une occasion idéale pour plonger dans un pan de l’histoire, dans une histoire politique ou dans la magie des biopics.

«Le silence des autres»
(2019)

Documentaire qui remet les idées en place. 1977. Deux ans après la mort de Franco dans l’urgence de la transition démocratique, l’Espagne vote la loi d’amnistie générale qui libère les prisonniers politiques mais interdit également le jugement des crimes franquistes. Les exactions commises sous la dictature et jusque dans les années 1980 (disparitions, exécutions sommaires, vols de bébés, torture) sont alors passés sous silence mais depuis quelques années, des citoyens espagnols, rescapés du franquisme, saisissent la justice à 10.000 kilomètres des crimes commis, en Argentine, pour rompre ce «pacte de l’oubli» et faire condamner les coupables. En tant qu’Espagnole, Almudena Carracedo ressentait une douleur qui s’accumulait en elle au fil des années lorsqu’elle voyait que la question de la mémoire historique restait bloquée à ce point dans son pays. La réalisatrice explique : «Il n’y a pas de victimes directes de la dictature dans ma famille mais mes parents se sont battus comme tant d’autres contre le régime franquiste. J’avais de la peine quand j’imaginais la vie de tous ces gens qui n’ont pas eu de jeunesse, qui ont donné leur vie pour qu’on puisse vivre en démocratie». À la différence de l’Espagne, dans la plupart des pays européens, les crimes contre l’humanité ne sont pas restés impunis. Pour Robert Bahar, la différence en Espagne par rapport à la plupart des pays européens est que Franco a gagné la guerre civile et qu’ensuite il est resté 40 ans au pouvoir.

Le Procès contre Mandela et les autres
(2018)

Ce documentaire poignant montre que l’histoire de la lutte contre l’apartheid ne retient qu’un seul homme: Nelson Mandela. Mais il n’est pas le seul. Il aurait eu 102 ans cette année. Il s’est révélé au monde lors d’un procès historique en 1963 et 1964. Sur le banc des accusés, huit de ses camarades de lutte risquaient aussi la peine de mort. Face à un procureur zélé, ils décident ensemble de transformer leur procès en tribune contre l’apartheid. Les archives sonores des audiences, récemment exhumées, permettent de revivre ce bras de fer. Si elles constituent un vrai trésor, ces archives sont restées longtemps enfouies. Les réalisateurs Nicolas Champeaux et Gilles Porte expliquent que le procès avait été enregistré sur un support vinyle analogique, les dictabelts: un vinyle souple qu’on peut plier, qu’on enroule autour d’un cylindre et que l’on lit avec un diamant comme pour un tourne-disque. «La British Library avait tenté de les numériser en 2000 en s’attaquant au discours de Mandela, mais l’expérience n’avait pas été concluante. Alors, les archives sont retournées sous la poussière en Afrique du Sud jusqu’à ce que des Français leur fassent part de l’invention de l’archéophone: une machine qui permet justement de numériser les dictabelts sans les détériorer. Et c’est ainsi qu’un accord de coopération s’est naturellement mis en place entre la France et l’Afrique du Sud», confient les réalisateurs. Le Procès contre Mandela et les autres a été présenté en Séance spéciale au Festival de Cannes 2018 et a reçu le prix du public au Festival de Durban 2018. Nicolas Champeaux n’avait jamais réalisé. C’est pour cette raison qu’il a approché William Jéhannin, un ami, qui est devenu son producteur. En réécoutant les témoignages des accusés lors du procès, puis lors des entretiens avec eux cinquante-sept ans plus tard, le rôle de Nelson Mandela semble moins déterminant que ce que la Grande histoire veut nous faire croire. Un documentaire passionnant.

«Amazing Grace»
(2018)

Retour sur une période d’une diva qui a marqué son temps. En janvier 1972, Aretha Franklin enregistre un album live dans une église intimiste du quartier de Watts à Los Angeles. Le disque de ce concert mythique, «Amazing Grace», devient l’album de gospel le plus vendu de tous les temps, consacrant le succès de la reine de la soul. Si ce concert a été totalement filmé, les images n’ont jamais été dévoilées… jusqu’à aujourd’hui. Découvrez le film inédit d’un concert exceptionnel et l’incroyable grâce d’une Aretha Franklin bouleversante. Sydney Pollack était novice dans la réalisation de documentaires musicaux, filmant notamment sans faire de clap, servant à synchroniser le son et l’image au montage. Par conséquent, les 20 heures de rushes n’ont pas pu être exploitables malgré l’intervention d’experts. Finalement, après la sortie de l’album «Amazing Grace» en juin 1972, le film a été mis dans un tiroir, le travail de synchro étant trop titanesque à réaliser. Pollack n’a jamais renoncé à sortir le film mais chaque nouveau projet l’empêchait de se remettre sur la restauration du documentaire. Avant sa mort en 2008, le cinéaste confie le projet à Alan Elliott, producteur et passionné de musique. Près de 50 ans plus tard, ce concert unique en son genre est enfin visible par tous. On peut apercevoir Mick Jagger et son batteur, Charlie Watts, présents parmi la foule dans l’église. Ce n’était sûrement pas une coïncidence, les deux membres des Rolling Stones s’apprêtant à enregistrer leur album «Exile on Main Street», ouvertement influencé par le Gospel.

«On l’appelait Roda»
(2018)

Avec beaucoup de grâce et d’émotion, ce documentaire met en lumière une personnalité de l’ombre, celui qui a écrit des chansons pour les grands chanteurs français : Étienne Roda-Gil. Le documentaire rend hommage à la créativité de ce «poète industriel» comme il aimait à se nommer et à l’incroyable visionnaire et témoin de son temps grâce aux entretiens menés par Charlotte Silvera, brutalement interrompus par la disparition de Roda-Gil le 28 mai 2004 mais d’autres ont pris le relais : compositeurs, interprètes et proches de Roda pour évoquer la place considérable qu’il a tenu dans la chanson française et le chemin lumineux qu’ils ont parcouru ensemble. Selon Allo Ciné, pour la réalisatrice Charlotte Silvera, il était important de laisser une trace du travail d’Étienne Roda-Gil qui se cache derrière de nombreux tubes mais dont le nom reste pourtant inconnu auprès d’une partie du grand public : «On le danse, on le chante pourtant, sans savoir que c’est lui, Roda», confie la réalisatrice de celui qui a écrit «Joe, le taxi» c’est lui !, «Le lac majeur», non !? ou encore de nombreuses chansons pour Julien Clerc. «Aucune de ses chansons n’est le fruit d’un compromis, même lorsqu’elles sont écrites pour des vedettes de showbiz. Elles sont liées par l’exil, par la quête de la liberté et de l’amour, elles tissent une histoire poétique que je montre par ce film. Ce sont près de 25 chansons que je donne à entendre pour raviver notre mémoire collective», explique la réalisatrice.

«I am not your negro»
(2017)

C’est un des plus grands chefs d’œuvres de la décennie. À travers les propos et les écrits de l’écrivain noir américain James Baldwin, Raoul Peck propose un film qui revisite les luttes sociales et politiques des Afro-Américains au cours de ces dernières décennies. Le documentaire utilise principalement des images d’archives à la fois publiques et privées, des extraits de classiques hollywoodiens, de documentaires, d’interviews filmées, de programmes télé populaires, de débats télévisés ou publics et des images contemporaines. Un montage kaléidoscopique, frénétique et poétique (un medley) dans un style propre à James Baldwin. Ainsi, Raoul Peck a voulu son film essentiellement visuel et musical : les images servent de ponctuation aux mots et à la musique et vice-versa. «En revenant sur la traditionnelle iconographie «noire» avec ses clichés, les non-dits, les erreurs fondamentales d’interprétation voire à certains moments la pruderie paternaliste, nous voulons redéfinir sa signification et son impact. C’est pourquoi nous avons non seulement changé le cadrage de ces images mais leur usage traditionnel et leur «montage» également», a confié le réalisateur à Allo ciné. Raoul Peck a commencé à lire les écrits de James Baldwin en sortant de l’adolescence alors qu’il cherchait des explications aux contradictions auxquelles il était confronté dans sa vie de nomade l’ayant fait voyager du Congo en France, en Allemagne et enfin aux États-Unis après avoir fui Haïti. «Avec Aimé Césaire, Jacques Stephen Alexis, Richard Wright, Gabriel Garcia Marquez et Alejo Carpentier, James Baldwin était l’un des auteurs de mon corpus personnel. Ils écrivaient sur un monde que je connaissais bien, dans lequel je n’étais pas réduit à une note en bas de page. Ce qu’ils racontaient me parlait d’une histoire, d’une structure et de rapports entre les hommes que je voyais autour de moi», rappelle le metteur en scène à la même source. «I am not your negro» a remporté de nombreux prix dont le Prix du meilleur documentaire à Philadelphie, le Prix du public à Toronto et Berlin (ainsi que la Mention spéciale du jury œcuménique), et était candidat aux Oscars 2017 dans la catégorie Meilleur documentaire.

«Whitney»
(2018)

Un destin tragique pour une vie pleine de gloire. La diva à la voix inimitable a sombré au fil des années et a été rattrapée par ses démons. Pourtant tout lui souriait, icône de toute une génération, elle avait vendu 200 millions d’albums. Elle détient le record du plus grand nombre de numéros 1 consécutifs. Sa chanson «I will always love you» est le single le plus vendu par une chanteuse. Derrière les records, les rumeurs, les scandales, les secrets et la gloire, voici la vraie Whitney. Kevin Macdonald, le réalisateur de «Whitney» est réputé dans le monde du documentaire. Il a notamment remporté un Oscar en 2000 pour «Un jour en septembre», un film qui retrace la prise d’otages lors des Jeux Olympiques de Munich en 1972. Le cinéaste a également dressé le portrait de Bob Marley dans «Marley» et celui de l’artiste contemporain Cai Guo-Qiang dans «L’échelle céleste». Il doit aussi sa renommée à des œuvres de fiction. Citons «Le dernier roi d’Écosse» et «L’aigle de la neuvième légion». Le film était montré en séance de minuit pendant le Festival de Cannes 2018. Il en est ressorti des révélations inédites. Trois ans après le documentaire choc «Amy» (sur Amy Winehouse) réalisé par Asif Kapadia, le Festival de Cannes accueillait à nouveau un documentaire musical, en séance de minuit, consacré à une chanteuse à la destinée tragique, Whitney Houston. Derrière la lumière et la gloire, le documentaire s’emploie à montrer «la vraie Whitney».



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