Houyame Rahmani : “J’ai trouvé mon fil d’Ariane, ma voie dans le labyrinthe”

Houyame Rahmani
Plasticienne
Jusqu’au 22 septembre, la galerie ArtSpace présente l’exposition «Un point c’est tout», de Houyame Rahmani. Ses compositions filaires font le lien entre l’ordre du génie civil et le chaos organisé du cerveau humain.
Le fil d’Ariane, comment est venue cette idée ?
Le fil d’Ariane a été ma première exposition. Depuis toute enfant, j’étais sûre et certaine que j’étais artiste. Je faisais du bricolage. À la maison, nous étions quatre : ma mère, mon frère, mon père et moi. J’ai suivi mon père, pour le côté bricolage et tout ce qui va avec. J’ai passé un bac en électricité, un BTS en construction de bâtiments, une licence en assainissement et traitement du milieu urbain et industriel.
Enfin, j’ai terminé par un master en neurosciences. Mon frère, lui, est plutôt du côté de ma mère, il est make-up artist, s’occupe de beauté, etc. On se complète. Mais lorsque j’ai découvert ces techniques artistiques avec le fil, j’ai trouvé mon fil d’Ariane. C’était ma voie, mon guide dans le labyrinthe.
Les pièces exposées aujourd’hui sont extrêmement géométriques. On pense immédiatement aux zelliges fassis ou andalous. Comment êtes-vous passés de l’un à l’autre ?
À chaque exposition, j’essaie de changer de thème. Pour le fil d’Ariane, j’avais commencé avec les phénomènes microcosmiques. Puis je me suis intéressée aux phénomènes naturels, l’arc-en-ciel et beaucoup d’autres choses.
Au fur et mesure, ma technicité a augmenté et évolué. Je produis plus aisément. Je ne suis pas que mon calcul. Je peux, par exemple, improviser au moment de la création, changer la couleur… Ces progrès m’ont permis de créer une collection géométrique. Je l’ai d’abord imaginée et je voulais en même temps combiner tous mes cursus dans une même œuvre. Étudier l’électricité comportait beaucoup de calculs.
Pour le dessin industriel, j’ai utilisé nombre de logiciels. Avec l’assainissement, c’est le dimensionnement qui importait… J’ai vécu dans des calculs. Et j’adore ça !
Vous calculez la résistance des fils, la résistance du bois… ?
Lorsque j’ai commencé, je créais des figures le soir, et le matin je découvrais que le bois avait flanché. Le fil, dans la nuit, essaie de trouver son aise. Il est un petit peu serré par ici, il est un petit peu léger par là… et il essaie de trouver son homéostasie. Et le lendemain, le pauvre, il a fait un long chemin, un long travail toute la nuit. Il faut donc calculer la tension du fil, sa résistance et celle des autres matériaux. Mon père m’a appris les techniques. Je trouve toujours plaisir à travailler avec lui dans l’atelier. Il est le professeur qui m’a initiée au travail du bois. Je prépare le bois. Je le ponce. Je le peins. Je fais mes cadres…
Il y a donc du calcul dans la spiritualité ?
Bien sûr ! Qu’est-ce que la géométrie sacrée ? C’est la terre, le calcul et le sacré. La spiritualité, tout simplement !
Murtada Calamy / Les Inspirations ÉCO