Culture

DJ Nicola Cruz, l’explorateur de sons

Nicola Cruz. DJ producteur

Il a inauguré la scène principale de la 5ème édition de l’Oasis Festival, vendredi 13 septembre. Une responsabilité assumée haut la main. DJ discret mais virtuose, c’est le musicien chasseur de sons, à l’affût de sonorités nouvelles et surprenantes. Son set au Festival de Marrakech frisait le parfait. Rencontre avec un chasseur moderne de sons venus d’ailleurs et d’une autre époque.

Face à ses platines, chaque son a son importance. Cool et détendu dans la vie, à la fois mystique et aérien, il a l’air de venir d’un ailleurs. Nicola Cruz semble être cet ovni de la scène électronique qui propose des sets aussi colorés que sombres, aussi joyeux que mélancoliques, aussi futuristes qu’ancestraux. Il a ce don d’embarquer toute une audience avec lui en lui proposant des rythmes son Equateur natal ou de son Amérique Latine de cœur, tout en étant résolument citoyen du monde. Nicola Cruz faisait partie de cette line- up brillante de la 5ème édition du Festival Oasis (13 au 15 septembre), et il a fait voyager les festivaliers.

La flûte enchantée de Nicola
Le musicien et producteur de sons magiques, Nicola Cruz, s’inspire de sons presque cosmiques, voire intemporels. Son dada : la flûte. Son deuxième album porte d’ailleurs le nom de la flûte andine qui sublime ses sets «Siku». Mais pas seulement. C’est sa première fois au Maroc et il est déjà tombé sous le charme des sons marocains, et arabes du ney à la flûte marocaine. «J’ai un goût très éclectique en musique et ma musique est très influencé par cette partie du monde. Jouer au Maroc, en terre d’Afrique, dans une culture riche en musique et en rythmes est une inspiration en soi» confie celui qui est né en France où il a vécu trois ans seulement avant de retourner à Quito. « Mes parents étudiaient à Limoges , je suis né là bas et on y resté 3 ans seulement , et ensuite nous sommes retournés en Equateur. Du coup, toutes mes influences sont purement équatoriennes, même s’il y avait un peu de culture française à la maison forcément. Mais j’ai surtout bercé dans la culture et la musique folklorique de Quito. Elle est présente partout, aux quatre coins de la ville. J’ai toujours été exposé à ça, donc c’est surtout une influence inconsciente». Il découvre la musique tout naturellement, jeune et puise dans plusieurs influences. La musique latine dans les rues, à la maison, le hip hop, la pop de son enfance ou à la télévision, tout vient nourrir un Nicola Cruz curieux de tout. Il s’essaye à la batterie à la recherche de rythmes et de sensations avant de trouver son bonheur dans les percussions. Il découvre tout naturellement la musique électronique jeune et y trouve une certaine liberté de faire, d’explorer, d’essayer. Le conservatoire au Mexique, est violent. Il trouve cela trop contraignant. Trop de règles alors que la musique est liberté. «La musique électronique est née de l’expérimentation. Elle part de cette recherche, essayé, réessayé, créer, effacé, recréer. Tester, laisser s’exprimer des émotions. C’est ce que je ressens. Aller en profondeur, au plus profond des choses. C’est ce que j’aime dans la musique. C’est à la fois réfléchi et improvisé. C’est surprenant. La musique me surprend toujours, elle m’emmène là où je n’imaginais pas aller». Pourtant, il donne l’impression qu’il sait toujours où il va ou du moins, où il emmène son audience, toujours hypnotisé par ses sets passionnés. Le concert à Marrakech frisait le parfait, le set coloré et plein de nuances, proposait un voyage crescendo à travers des notes riches. «Mes sets sont souvent réfléchis selon l’heure à laquelle je joue, où je joue, devant quel public. C’est important de s’adapter, de trouver la connexion avec l’audience qu’on a en fasse» confie celui qui , du haut de ses deux albums, aussi différents que complémentaires , a donné à la musique live une place de choix. «J’appréhende le travail avec des musiciens comme un travail en groupe, je me sens comme faisant partie intégrante du groupe. Pas juste comme un soliste qui fait appel à des musiciens de temps en temps pour ajouter des sons live. J’essaie de ne pas être égoïste, ne pas rester seul. J’aime collaborer, partager des idées nouvelles avec tous ces musiciens que j’ai la chance de rencontrer lors de mes voyages. Et puis j’ai des musiciens à Quito qui sont une constante pour moi. Qui sont ma base».

La révélation du Petit Nicola
Nicolas Cruz est l’apprenti d’un autre Nicolas à la réputation qui ne se fait plus : Nicolas Jarr. Encouragé par ce dernier, le DJ équatorien sort son premier album «Prender el Alma», «un projet syncrétique entre traditions sud-américaines et productions électroniques contemporaines» enregistré depuis un entrepôt dans les montagnes des Landes. Avec cet album, Nicola Cruz rentre dans la cour des grands. Il impose son style et sa touche même s’il avoue ne pas avoir trouvé ce qu’il cherchait encore. «J’ai trouvé ma musique et là où je voulais l’emmener avec le temps je suppose. J’ai toujours exploré plusieurs sonorités, plusieurs tempos, j’ai fais beaucoup de recherches. Je me suis inspiré de la techno, de la house. Je suis retourné en Équateur, après avoir vécu au Mexique et il y a surement cette influence du retour aux sources, cette reconnexion avec les racines qui a influencé ma musique. Et cela se développe encore, je n’ai pas encore trouvé ce que je cherchai encore !», confie celui qui propose une transe tribale intelligente qui puise dans les musiques métissées et les contrastes en général. «J’essaie d’absorber ce que je peux» avoue t-il. En absorbant, il se construit, passe de choses plus expérimentales , des sons sans début ni fin à des morceaux réfléchis et structurés. «Avant je donnais naissance à des longues plages de plus de dix minutes en les modifiant à l’extrême pour que ça ressemble à une batterie, ou un violon. J’ai beaucoup de tout ça. Mais ce n’était pas des chansons, contrairement à ce que je fais aujourd’hui. Aujourd’hui j’ai des morceaux , il y a un début et une fin. C’est plus naturel».

Voyage mystique
La force du musicien réside dans sa musique certes mais Nicola Cruz , il a les chiffres et les lettres. Fasciné par les traditions ancestrales, il puise dans le mystique , la numérologie comme sa chanson «Seven» ou encore dans les rites et les vieilles traditions. «J’aime garder cette dose de mystique dans ma musique ! J’aime ce côté surréaliste, qu’on n’explique pas forcément. Quand on se perd, j’aime le côté sombre et le côté lumineux. Les deux font partie de moi, et donc de ma musique». Avec son dernier album, il confirme cette recherche effréné d’un passé qu’il n’a pas connu pour le mixer à un futur qu’il rêve ou qu’il imagine avec beaucoup de bienveillance. «Un album raconte une période de la vie. C’est thérapeutique. Cela dit beaucoup. Cela ferme aussi un chapitre» avoue celui qui écrit en permanance. Nicola Cruz semble réinventé la World Musique, un terme qu’il dit ne pas aimer forcément puisqu’elle enferme dans une catégorie presque bâtarde. Alors que sa musique à lui ne semble pas pouvoir s’enfermer. La musique en général, selon lui, devrait être libre et difficile à décrire ou à catégoriser. Aujourd’hui , le chasseur de sons est toujours en recherche. Au Maroc il écoute les musiciens locaux, il est fasciné par Fela Kuti et reste à l’affût de nouveautés d’ici et d’ailleurs. Il ne se limite jamais. Surtout pas en musique. Et encore moins dans la vie. «Je suis ouvert au changement, j’en ai pas peur ! Je suis DJ aujourd’hui, je peux faire de la biologie navale dans quelques mois ou devenir quelqu’un d’autre».


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