Culture

Diane Kruger, magistrale dans «In the Fade» !

Il a fallu un Fatih Akin derrière les caméras pour offrir à la plus internationale des actrices allemandes, Diane Kruger, un rôle à la hauteur de son talent. Dans «In the Fade», elle est une  mère qui perd sa famille dans un attentat à la bombe. Le jury du festival de Cannes lui a remis le prix d’interprétation féminine.

Le rideau est tombé, dimanche dernier sur la 70ème édition du festival du cinéma de Cannes. Diane Kruger repart avec le Prix du meilleur rôle féminin. Et cela elle le doit non seulement à son talent mais aussi au réalisateur Fatih Akin qui lui a offert un rôle à la mesure de son talent dans «In the Fade». Fatih Akin raconte l’histoire de Katja, une femme dont la vie bascule après avoir perdu fils (Rocco) et mari (Nuri) lors d’un attentat à la bombe. Encore un film réussi pour le réalisateur allemand d’origine turque, grand habitué des prix de festival avec un Ours d’or pour «Head On», prix du scénario à Cannes pour «De l’autre côté» et Grand Prix du jury à la Mostra de Venise, pour «Soul Kitchen», qui signe un film sur l’immigration, son grand sujet de prédilection.

Après avoir traité le génocide arménien dans «The Cut» en 2015, le réalisateur revient au contemporain avec un film d’actualité dont le cadre reste la communauté turque d’Allemagne. «Je me suis inspiré des attentats commis par le groupuscule NSU (Nationalsozialistischer Untergrund, ou «nazisme clandestin») contre les immigrés en Allemagne dans les années 2000-2007», confiait le réalisateur lors d’une conférence de presse tenue pendant le festival de Cannes, qui s’est clôturé le week-end dernier. «Vous avez déjà assisté à des jugements de ces gens-là ? Lors de mes recherches, j’ai assisté à des audiences aux tribunaux, c’est glacial. J’ai fait beaucoup de recherches dans les dossiers de police aussi», continue le réalisateur qui commence le film avec une scène, caméra à l’épaule, en prison où l’excellent Numan Acar, qu’on a trop peu vu et qui est l’époux dans le film de Diane Kruger, s’apprête à dire oui à sa deuxième moitié. Une scène pour planter le décor de la culpabilité facile de cette future victime. «Ce sont les Kurdes qui ont été pointés du doigt, en premier, lors de l’affaire des attentats de NSU. Ils n’ont pas pensé à des blancs ou encore moins à des nazis en premier lieu. Il valait mieux, pour l’histoire, que Nuri ait un casier judiciaire, que les soupçons contre lui soient légitimes. J’ai quelques relations chez les dealers, j’en connais un qui s’est marié en prison, cette semaine me permettait de dire beaucoup de choses de façon très compacte», derrière continue le réalisateur qui a tout de suite pensé à Diane Kruger pour le rôle. Il voulait une actrice allemande «blonde, aux yeux bleus ». Il l’avait rencontrée en 2012 à Cannes et l’actrice avait avoué qu’elle souhaitait travailler avec lui. «C’est un bonheur d’être dirigée par un réalisateur qui a accompagné ma jeunesse avec ses films. Il a un univers magique, je le suivrais au bout du monde s’il me le demandait», confie une Diane Kruger convaincante dans le rôle d’une femme déchirée, perdue après la perte des deux hommes de sa vie. «Comment survivre à une telle perte ? J’ai eu très peur de jouer ce rôle tellement décalé de ce que j’ai déjà fait. C’est un sujet d’actualité, on vit dans un monde où il y a un attentat tous les jours, presque, et on entend parler de nombreux morts, mais on n’entend pas les histoires de ceux qui restent», continue l’actrice allemande, qui avoue avoir beaucoup travaillé sur elle pour ce rôle intense et d’une dimension psychologique profonde. Le personnage de Katja passe par plusieurs étapes que le réalisateur a choisies de présenter en trois blocs : au début, on commence par la famille, un thème cher à Fatih Akin qui est très fidèle en famille et en amitié et qui travaille généralement avec les mêmes personnes. On voit une Diane Kruger folle et épanouie, libre, aimée et aimante qui sera, bien entendu, dévastée par le chagrin. La seconde étape est la justice où le personnage de Katja essaie de faire son deuil en voyant les deux nazis coupables de son drame derrière les barreaux.

La justice ne fera pas son travail et les laissera en liberté pour faute de preuves. Commence donc l’étape de la vengeance que le réalisateur associe à la mer, très présente dans ses films. «La mer fait référence à la mort souvent dans mes films», confiera Fatih Akin qui propose une fin pour le moins dérangeante. Encore un film libre et intense dont la bande son est signée Josh Homme, de Queen of the Stone Egde d’un des réalisateurs les plus incandescents de sa génération. 



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