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Succursales bancaires : l’activité “relais” suspendue aux pourparlers franco-marocains

La réunion prévue courant juillet entre Bank Al-Maghrib et le Trésor français devrait définir les contours d’un accord qui, une fois validé, servira de cadre de référence lors des négociations ultérieures avec les autres États européens dont l’Espagne, les Pays-Bas, la Belgique ou encore l’Italie concernant les succursales marocaines opérant dans ces pays.

La rencontre prévue courant juillet entre Bank Al-Maghrib (BAM) et le Trésor français aura des allures de sommet diplomatique. Et pour cause, ce rendez-vous doit permettre de trouver un compromis pour obtenir l’aval de la Commission européenne concernant le statut des succursales bancaires marocaines opérant en Europe.

Derrière ce dialogue bilatéral, l’enjeu est de préserver l’activité dite de «relais» des banques, ce précieux trait d’union financier reliant les Marocains résidant à l’étranger (MRE) à leur pays d’origine. À en croire le wali de BAM, qui s’est exprimé lors de la seconde réunion trimestrielle, une fois l’accord franco-marocain finalisé, les discussions seront étendues aux autres États concernés : Espagne, Pays-Bas, Belgique et Italie, notamment.

Bruxelles ratisse large
Tout a commencé pour rappel par l’initiative européenne visant les établissements financiers britanniques, devenus de facto «extracommunautaires» depuis le Brexit. En voulant empêcher ces banques de profiter indûment du passeport européen, Bruxelles a balayé large. Trop large peut-être, au point de mettre involontairement les banques marocaines dans sa ligne de mire. Une extension inattendue qui a immédiatement alerté Bank Al-Maghrib.

Devant le conseil de la Banque centrale, le gouverneur Abdellatif Jouahri ne dissimule pas son inquiétude : «Je ne vous avais pas caché lors de notre précédente réunion que nous sommes préoccupés».

Les tentacules du paysage bancaire s’étendent en Europe, selon le dernier rapport de supervision bancaire de Bank Al-Maghrib, sur pas moins de 51 filiales et 23 succursales réparties sur 36 pays, principalement la France, l’Espagne et l’Italie. À elles seules, ces antennes contribuent à drainer une partie substantielle des quelque 121 milliards de dirhams de transferts attendus à l’horizon 2026, une manne importante pour les équilibres financiers du Royaume.

Face à la menace que représenterait une restriction réglementaire, BAM n’a pas attendu pour réagir. Une task force, regroupant la Banque centrale, les ministères des Affaires étrangères et des Finances ainsi que les grandes banques concernées, s’est immédiatement mise en ordre de marche. Multipliant les contacts avec la direction FISMA à Bruxelles – l’organe chargé du dossier à la Commission européenne –, cette équipe cherche à obtenir une reconnaissance des spécificités de l’activité bancaire marocaine sur le sol européen.

Assurer la continuité des activités transfrontalières
La France s’est imposée naturellement comme interlocutrice privilégiée. Non seulement parce qu’elle concentre l’essentiel des MRE, mais aussi parce qu’elle comprend l’importance économique de ce flux financier transméditerranéen.

«Nous avons commencé avec le Trésor français, qui était notre priorité», souligne Jouahri, rassuré par un «bon assouplissement de la position française» et une «meilleure compréhension des intérêts en jeu».

Cette rencontre de juillet devra ainsi définir précisément les contours d’un accord qui, une fois validé par la Commission européenne, servira de cadre de référence lors des négociations ultérieures avec les autres États européens concernés. Il s’agit pour Bank Al-Maghrib, selon les mots employés par Jouahri, de «ramener les choses à leur antériorité», autrement dit d’assurer la continuité des activités transfrontalières.

Pour autant, l’incertitude actuelle n’est pas sans conséquences sur les prévisions économiques. Bank Al-Maghrib a d’ores et déjà intégré ce contexte réglementaire incertain dans ses projections à moyen terme.

Ainsi, elle anticipe pour 2025 un léger repli de 3,3% des transferts des MRE avant un rebond espéré de 5,1% en 2026, sous réserve que l’accord envisagé soit effectivement conclu. Ces flux étant déterminants pour l’équilibre courant du pays, une telle baisse se traduirait mécaniquement par une pression accrue sur la balance des paiements, dont le déficit est attendu autour de 2,2% du PIB en 2025 avant un retour à 2% en 2026.

Le wali de BAM est conscient que les négociations actuelles demeurent fragiles, les subtilités juridiques étant multiples. S’il note avec optimisme la position constructive adoptée par la France, il rappelle néanmoins la difficulté intrinsèque du dossier : «Nous devons trouver les formulations nécessaires pour éviter toute divergence ultérieure sur l’interprétation de l’activité relais». En attendant de passer ce cap, BAM ne relâche pas sa vigilance.

Pour Jouahri, l’objectif demeure clair : garantir la pérennité de ce canal bancaire vital pour l’économie nationale. «En espérant, conclut-il, que d’ici 2026, toutes les procédures et explications nécessaires seront définitivement réglées.»

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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