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Stabilité des taux : la politique monétaire de BAM reste accommodante

À l’issue de sa réunion de septembre, Bank Al-Maghrib a maintenu son taux directeur à 2,25%. Ce statu quo, deuxième consécutif, traduit une stratégie de prudence face aux incertitudes internationales, tout en laissant entrevoir une nouvelle baisse possible d’ici la fin de l’année. Inflation maîtrisée, croissance robuste et conditions financières favorables offrent à l’institution une marge de manœuvre que les marchés surveillent de près.

Bank Al-Maghrib (BAM) a choisi, lors de sa réunion de septembre 2025, de maintenir son taux directeur inchangé à 2,25%. Cette décision, en ligne avec le consensus des investisseurs, marque le deuxième statu quo consécutif après une première baisse de 25 points de base intervenue en mars dernier.

Depuis juin 2024, l’institution a réduit son taux directeur d’un cumul de 75 points de base, inaugurant un cycle accommodant destiné à relancer l’activité.

Comme le souligne Attijari Global Research (AGR) dans son rapport, «la banque centrale conserve une marge de manœuvre pour accompagner davantage l’économie nationale, mais préfère temporiser dans l’attente d’une meilleure visibilité internationale».

L’un des principaux arguments de cette pause monétaire réside dans l’évolution des prix. L’inflation s’est établie à seulement +0,3% en août 2025, très en deçà de l’objectif de stabilité fixé à 2%. L’inflation sous-jacente s’inscrit elle aussi dans une dynamique baissière, tombant à 0,7%.

Dans ce contexte de désinflation marquée, les taux d’intérêt réels demeurent positifs, ce qui offre à BAM une latitude pour maintenir une politique de soutien à l’économie. Selon AGR, cette évolution traduit «un reflux des tensions inflationnistes qui améliore la visibilité des investisseurs et réduit leurs exigences de rentabilité».

Une croissance en rebond
La décision de statu quo se comprend aussi au regard de la trajectoire de croissance. Après 3,8% en 2024, le PIB devrait rebondir à 4,6% en 2025, porté par les investissements publics dans les infrastructures et par une bonne campagne agricole évaluée à 41 Mqx grâce aux précipitations favorables. Cette dynamique est appelée à se prolonger en 2026 avec une croissance attendue de 4,4%, sous l’effet d’une amélioration de la campagne agricole et du maintien d’un niveau élevé d’investissement.

AGR rappelle que «la situation économique solide du Maroc ne nécessite pas d’action immédiate de la part de la banque centrale».

Si BAM choisit de temporiser, c’est aussi parce que l’environnement international demeure instable. L’économie mondiale est traversée par des tensions géopolitiques en Europe et au Moyen-Orient, une politique commerciale américaine marquée par la volatilité et un ralentissement de la croissance des principaux partenaires du Maroc.

Aux États-Unis, la Réserve fédérale a entamé un nouveau cycle d’assouplissement monétaire, après avoir abaissé son taux directeur à une fourchette de 4 à 4,25%, alors que l’économie américaine enregistre un net ralentissement de l’emploi. En zone euro, la Banque centrale européenne a déjà procédé à huit baisses consécutives de taux depuis 2024, ramenant son taux de dépôt à 2%. Face à ce double mouvement, BAM préfère attendre avant d’enclencher un nouvel ajustement, tout en conservant une orientation accommodante.

Des perspectives de nouvelles baisses
AGR estime néanmoins que la banque centrale «dispose encore d’une marge de manœuvre pour procéder à une nouvelle baisse de son taux directeur lors du dernier comité de politique monétaire de l’année 2025». Cette anticipation repose sur la conviction que l’inflation restera en dessous du seuil de 2% à moyen terme, tandis que la croissance conservera un rythme soutenu grâce aux grands chantiers d’investissement.

Dans ce scénario, BAM pourrait accentuer son soutien à l’économie nationale afin de stimuler la demande intérieure et l’emploi, deux leviers jugés prioritaires dans la conjoncture actuelle. La pause monétaire de BAM n’a pas freiné l’ajustement des marchés obligataires. Les conditions de financement du Trésor sont restées favorables, portées par la détente des taux sur le marché secondaire.

La courbe des taux a poursuivi son aplatissement au troisième trimestre 2025, reflétant les anticipations d’une trajectoire monétaire plus souple dans les prochains trimestres. Les maturités courtes ont poursuivi leur repli, en ligne avec les attentes de baisse du taux directeur, tandis que les taux longs se stabilisent en raison de la nécessité de financer les besoins structurels du Trésor.

Pour AGR, cette dynamique est alimentée à la fois par «la décrue des pressions inflationnistes» et par «une gestion prudente de l’offre en bons du Trésor, équilibrée entre ressources intérieures et extérieures».

Crédit bancaire et liquidité
Le statu quo monétaire s’accompagne d’une politique active en faveur du financement de l’économie. Bank Al-Maghrib continue de satisfaire l’ensemble des besoins en liquidité des banques, notamment à travers ses opérations principales. Le programme de soutien ciblé aux très petites et moyennes entreprises (TPME) reste au cœur de ce dispositif, contribuant à une dynamique positive du crédit.

AGR prévoit une progression du crédit bancaire de +5,9% en 2025 comme en 2026. Les taux débiteurs intègrent déjà la baisse cumulée de 75 points de base opérée par BAM depuis juin 2024, avec un repli de 59 points de base. La circulation fiduciaire reste élevée, mais les réserves de change atteignent des niveaux records, au-delà de 410 milliards de dirhams en 2025, et devraient frôler 435 milliards en 2026.

En définitive, la politique monétaire se caractérise par un équilibre subtil entre prudence et soutien. Prudence, car l’incertitude internationale impose de conserver des marges de manœuvre. Soutien, car l’inflation faible et la solidité de la croissance offrent à BAM l’espace nécessaire pour accompagner l’économie si les conditions se détériorent.

Comme le conclut AGR, «le statu quo de septembre 2025 ne signifie pas un arrêt du cycle accommodant, mais une pause stratégique en attendant que les signaux extérieurs s’éclaircissent».

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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