Sale temps pour Med Paper
Le conflit persiste entre Med Paper et les importateurs et distributeurs de papier. Ces derniers n’écartent pas la possibilité d’une nouvelle requête à déposer contre l’industriel, dont la santé financière continue de se fissurer.
Les importateurs et distributeurs de papier en bobines ou en rames grincent des dents depuis l’entrée en vigueur, en janvier dernier, du droit additionnel de 25% à l’importation de ces produits, et cela sur les 4 années à venir. Dans leur collimateur, Med Paper, papetier national à l’origine de cette mesure. Après qu’il en a fait la demande officielle en 2015, les ministères de l’Économie et des finances et celui de l’Industrie ont signé la décision instaurant des mesures de sauvegarde contre les importations massives de papier. Une décision qui n’a pas manqué de froisser l’Association marocaine des importateurs de papiers et cartons (ADPAC), qui ne décolère pas depuis sa prise de parole publique, voilà quelques mois, pour dénoncer ce qu’elle estime être attribuable à des «abus» de la part du géant du secteur. Une source interne a confié aux Inspirations ÉCO que «l’ADPAC n’a pas dit son dernier mot. Nous nous battrons jusqu’au bout pour défendre nos droits, et ce n’est pas un droit d’importation qui nous fera reculer».
Apparemment convaincus de leurs positions, les importateurs de papier et carton n’accusent ni la conjoncture, ni la rétraction des activités, mais le mode de management de Med Paper. «Cet industriel (Med Paper) n’hésite pas à demander l’aide de l’État alors que c’est son approche qui est à revoir. Plusieurs de ses produits sont purement inadaptés au marché. Nous en savons quelque chose puisque nous, les importateurs/distributeurs, répondons directement aux demandes des clients. Et ce qu’ils commandent n’a rien à voir avec ce que Med Paper produit !», s’indigne notre source, qui nous confie qu’une nouvelle action sera probablement déposée auprès des ministères de tutelle afin d’obtenir l’annulation de ce droit additionnel qui renchérit son offre de 25% et qui finira par nuire à toute la filière. Med Paper, injoignable au moment de mettre sous presse, n’a pas changé de position depuis sa dernière sortie médiatique, qui avait justement pour but de répondre aux accusations formulées par l’ADPAC.
Dans une réaction officielle, le management de Med Paper a déclaré que sa part de marché était passée de 52% à 2% seulement du fait de l’importation massive de papier. À l’évidence, l’industriel va mal. Et de plus en plus mal vu ses résultats annuels : en 2016, Med Paper a publié un profit warning après avoir observé une baisse de -18%, à 83,3 MDH. Il a également été observé un repli de 42,2% des charges d’exploitation, à 110,6 MDH, représentant dorénavant 133% des revenus contre 188% en 2015.
Dans ces conditions, le résultat d’exploitation allège son déficit de 15,28%, à – 22,2 MDH. Intégrant un résultat financier de – 9,9 MDH et un résultat non courant de 3,3 MDH, le résultat net aggrave ses pertes, passant de – 20,2 MDH à -29,1 MDH. Au volant bilanciel, le fonds de roulement s’aggrave passant de – 53,3 MDH en 2015, à -76 MDH à fin 2016, tandis que le besoin en fonds de roulement s’améliore de 21%, à 68,8 MDH sur la période. Pourtant, le management de Med Paper n’en démord pas : «nos produits sont adaptés et jamais un client ne s’est plaint de la qualité de notre papier», a indiqué Mohsine Sefrioui, PDG de Med Paper, dans un communiqué diffusé, il y a près d’une année, en réaction aux accusations formulées par l’ADPAC à l’encontre de l’entreprise. L’ADPAC, pour sa part, précise que le but de ces contestations ne vise pas l’étouffement du papetier national, mais versent plutôt en faveur d’une réorganisation du secteur.
Cette réorganisation, l’ADPAC la veut efficace et optimisée, axée sur les forces de chacune des parties prenantes. Pour Med Paper, ceci se traduirait par l’abandon des activités dans lesquelles la société a du mal à percer, et se focaliserait sur les produits dits «particuliers», difficiles à garantir même à l’import. Une espèce de spécialisation de niches qui redynamiserait le secteur et qui complèterait l’offre existante. Pour les importateurs, il s’agit d’une mission de sauvetage d’un sous-secteur, celui de l’impression, qui emploie 100.000 personnes au minimum.