Réseaux sociaux : les nouveaux terrains de jeu de la Gen Z

Les réseaux sociaux sont devenus le terrain de jeu incontournable où la génération Z exprime sa créativité et forge ses influences. Plus que de simples plateformes de partage, ces espaces virtuels sont désormais des catalyseurs puissants pour les marques, qui doivent repenser leur approche en misant sur l’authenticité et la proximité. Au cœur de cette révolution, le marketing d’influence, porté par une nouvelle vague de créateurs de contenu, se réinvente.
À l’ère du numérique, la génération Z impose un changement radical dans les stratégies de communication des marques. Hyperconnectée et avant tout créatrice de contenu, cette génération bouleverse les approches traditionnelles et redéfinit les relations entre marques, influenceurs et consommateurs.
Hassan Rouissi, président de l’Union des agences conseil en communication, décrit cette génération comme «une génération audacieuse» qui ne se contente plus d’être simple consommatrice. «Ils sont producteurs de contenu, habiles avec ça, et ils le font non seulement pour le Maroc, mais pour le monde entier. Ils n’ont aucune limite géographique». Cette capacité unique pousse les marques à réinventer leur posture. Elles doivent être challengées au plus profond d’elles-mêmes, lever toutes les barrières de brand safety.
«À l’époque où Facebook émergeait, les entreprises hésitaient encore entre y aller ou pas. Aujourd’hui, face à la diversité des plateformes et à la mobilité des jeunes utilisateurs, les marques doivent changer de manière d’opérer, s’adapter à cette génération qui ne se limite plus à Instagram ou TikTok, mais s’étend vers le streaming, le gaming, Discord, et bien d’autres territoires virtuels», explique-t-il.
C’est là tout l’enjeu. Pour concevoir des dispositifs efficaces, les marques doivent être présentes partout où se trouve la Gen Z, quitte à briser des codes. Cela étant, cette génération, paradoxalement, ne vit pas uniquement dans le digital.
Hind Khouy, directrice Marketing chez inwi, insiste sur le concept de «figital». «Ils sont digitaux, mais en termes de consommation, ils continuent leur expérience sur le physique. Ils peuvent commencer une expérience sur le digital, puis la poursuivre sur un canal physique». Ce double mouvement oblige les marques à penser la multicanalité. Ou mieux encore, l’omnicanalité.
La fin du Hero Moment
Sur ce point, Yassine Ziad, directeur Innovation & Digital banking à Crédit du Maroc, rappelle l’importance de la fluidité entre les canaux.
«Je démarre sur un canal, je peux finaliser mon parcours où je veux et quand je veux», résume-t-il.
Il cite aussi l’exemple des publicités intégrées dans Netflix, montrant comment le modèle évolue pour capter l’attention autrement, toujours dans l’objectif de créer des expériences plus engageantes. Côté contenu, la publicité traditionnelle est dépassée. Hassan Rouissi souligne un changement de paradigme radical avec la télé connectée (CTV) qui séduit fortement la Gen Z.
«Cette génération ne vit plus le Hero Moment, la grande campagne annuelle avec un film phare. Les marques doivent créer du contenu toute l’année, morceler leur message pour maintenir une présence constante et engageante», souligne l’expert.
Ce nouveau rythme impose un travail permanent aux équipes marketing et agences, mais c’est aussi une formidable opportunité pour renforcer la proximité avec les jeunes. Ce contexte ouvre grand la porte au marketing d’influence, dont la dynamique est loin d’être à saturation, contrairement à certaines idées reçues.
«Pour avoir mené beaucoup d’opérations avec des influenceurs, je pense qu’au contraire le secteur va s’ouvrir à plus d’opportunités. La Gen Z et la génération suivante auront toujours des influenceurs comme référence», confie Rouissi.
La différence est que la notion d’influenceur sera sans doute altérée, car la capacité de production de contenu de la Gen Z est exceptionnelle. Avec l’émergence de l’intelligence artificielle, la création de contenus photo et vidéo est accélérée et facilitée, donnant à chaque individu le potentiel de devenir influenceur à son échelle. «Toute personne dans cette génération a pour ambition de devenir influenceur et d’influencer son entourage». Ce qui oblige les marques à revoir leur mode d’opération.
La Gen Z a compris que les influenceurs font du revenu à travers les collaborations avec les marques. L’authenticité sur leurs propres espaces sociaux prime. Ici, l’importance des micro-influenceurs est mise en avant, car ils possèdent souvent une audience plus ciblée et engagée sur des niches spécifiques (voir encadré).
Ce qui est sûr, c’est que la décision d’achat de la Gen Z s’appuie sur un triangle de contenu, celui de la marque, celui des influenceurs, mais surtout celui généré par les utilisateurs eux-mêmes. Ce triptyque nourrit une confiance et une authenticité indispensables pour conquérir ces consommateurs hyper-connectés.
Hassan Rouissi
Président de l’Union des agences conseil en communication
«La génération Z est audacieuse, productrice de contenu sans limites géographiques. Les marques doivent lever les barrières de brand safety pour écouter et s’adapter à cette génération. Le Hero Moment est mort, les marques doivent créer du contenu toute l’année, partout, pour rester pertinentes.»
Hind Khouy
Directrice Marketing inwi
«La Gen Z est digitale mais elle vit aussi pleinement l’expérience physique, c’est ce que nous appelons le figital. Il ne suffit pas d’être efficient sur le digital, il faut être parfait sur tous les canaux pour accompagner cette génération.»
Yassine Ziad
Directeur Innovation & Digital banking à Crédit du Maroc
«L’omnicanalité permet au client de démarrer un parcours où il veut et de le finir quand il veut, sur le canal de son choix.
Siham Malek
Directrice générale du cabinet Integrate (affilié à Kantar)
«La Gen Z consomme des marques recommandées par leurs semblables sur les réseaux sociaux, pas forcément par les grandes stars. Les micro-influenceurs ont souvent un impact plus fort auprès de cette génération que les grands influenceurs.»
Micro-influenceurs : le levier incontournable
Le marketing d’influence ne montre aucun signe de saturation. Au contraire, la prolifération des micro-influenceurs, ces créateurs avec des audiences plus modestes mais très engagées et spécialisées, représente une opportunité précieuse pour les marques.
Comme le relève Siham Malek, directrice générale du cabinet Integrate, la Génération Z privilégie désormais les recommandations de micro-influenceurs qui lui ressemblent et qui partagent leurs valeurs et centres d’intérêt spécifiques, plutôt que les grandes célébrités. Une étude récente révèle que 80% de cette génération se fient aux micro-influenceurs pour leurs choix de consommation.
Yassine Ziad, directeur Innovation & Digital banking à Crédit du Maroc, ajoute que la démocratisation des outils numériques et de l’intelligence artificielle permet à quasiment toute personne équipée d’un smartphone de devenir influenceur à sa propre échelle.
Cette multiplication des voix crée un écosystème d’influence plus large et diversifié, obligeant les marques à penser en termes d’omnicanalité et de contenus continus, fragmentés sur plusieurs plateformes et supports, pour accompagner un parcours client fluide et sincère.
Hassan Rouissi, lui, insiste sur l’évolution du rôle des influenceurs : la Génération Z a pleinement conscience que les collaborations avec les marques sont un business, et l’authenticité réside dans la transparence et la co-construction du message.
Ainsi, les micro-influenceurs ne sont plus de simples relais, mais de véritables partenaires dans la communication des marques, capables de générer un impact profond au sein de leurs niches.
Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO