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Réglementation de change : La nouvelle instruction générale fin prête

L’annonce du lancement de la flexibilité du dirham est reportée pour des raisons obscures mais reste à l’ordre du jour. Le projet d’instruction générale des opérations de change est fin prêt et n’attend que le feu vert du ministre de l’Économie et des finances. Le point sur les principales nouvelles mesures encadrant les opérations de couverture contre le risque de change.

La nouvelle réglementation de change est fin prête et n’attend que le feu vert du ministre des Finances, Mohamed Boussaïd. C’est ce qu’a affirmé Driss Bencheikh, le secrétaire général de l’Office des Changes lors d’un débat sur la flexibilité du dirham, organisé jeudi dernier à Casablanca à l’initiative de l’Ordre des experts comptables. Le contenu de cette nouvelle mise à jour réglementaire devrait être rendu public lors du point de presse conjoint du ministre de l’Économie et des finances et du wali de Bank Al-Maghrib, réservé à l’annonce du lancement officiel de la flexibilité du dirham. Prévu initialement jeudi 29 juin, le rendez-vous a finalement été reporté sine die pour, dit-on, opérer quelques derniers «réglages». Comme si toutes ces années de préparation du nouveau régime n’auraient pas suffi pour s’assurer que tout était prêt avant de fixer une date pour lancer la machine de la flexibilité. Face à une salle archicomble d’experts comptables, le SG de l’Office des Changes a donné un avant goût du résultat de cette vaste opération de toilettage opérée sur le dispositif encadrant les opérations de transfert et de rapatriement de devises. On apprend ainsi que la nouvelle version de l’Instruction générale se compose de 212 articles étalés sur 236 pages, contre 807 articles sur 425 pages dans l’ancienne version sortie en 2013. «La nouvelle prend la forme d’un code accessible et facile à exploiter, distinguant entre les opérations courantes et celles en capital. Elle a été codifiée selon la nomenclature et les normes du FMI», souligne Driss Bencheikh. Elle devrait faciliter la vie aux opérateurs quand il s’agit de se prémunir contre la volatilité des cours de change, surtout avec l’élargissement imminent de la bande de fluctuation du dirham suite à la mise en application du nouveau régime flexible.

Ainsi au lieu d’adosser la couverture, opération par opération, comme le stipule l’instruction de 2013, celle de 2017 (encore au stade de projet) installe le principe de l’adossement cette fois-ci à l’activité de la personne bénéficiaire de la couverture, à l’exclusion de toute opération spéculative. À chaque fois que l’Office de change sera amené à effectuer un contrôle sur pièce ou sur place, insiste Bencheikh, l’essentiel est de vérifier si la couverture correspond à des opérations réelles et effectives et non pas à un acte purement spéculatif. Autre nouveauté, contrairement à la situation actuelle où la compensation des positions débitrices et créditrices est interdite, les opérations de couverture pourront désormais donner lieu à une compensation.

Aussi, la couverture contre les risques de fluctuation des prix des produits de première nécessité, jusqu’ici limitée aux produits exportés et importés, sera élargie aux produits «importés et stockés». Les banques seront également autorisées à proposer à leurs clients une combinaison d’instruments dans le cadre d’une même opération de couverture, une pratique jusqu’ici interdite par l’Office des changes. Enfin, contrairement à la réglementation de 2013 limitant l’accès des opérations de couverture aux seules personnes résidentes, la nouvelle instruction prévoit de l’étendre aux non résidents, quand il s’agit notamment de couvrir le risque de change lié aux transferts de revenus, des produits de cessions, de liquidations des investissements et des remboursements d’avances en compte courant d’associés.

Des «tunnels d’options» encore sombres
Les instruments de couverture contre le risque de change existent au Maroc depuis la mise en place du marché de change au milieu des années 90. Le dirham a toujours été volatil, bien avant l’arrivée de la flexibilité (la parité DH/ dollar est passée de 7 à 10 en l’espace de dix ans). L’élargissement de la bande de fluctuation du dirham, soit la principale nouveauté apportée par le régime de la flexibilité, devra accentuer le niveau de volatilité des cours de change au Maroc. Abdelmalek Mouatadid, directeur de la salle de marché à la Banque Populaire (BP), invite les importateurs et les exportateurs, notamment les PME, à intégrer la variable «change» dans leur mode de gestion en interne. Pour cela, l’opérateur économique doit d’abord maîtriser son processus opérationnel en identifiant l’instant à partir duquel naît le risque de change (commande, facturation, livraison).

Ce moment peut être lié à la saison agricole pour les exportateurs de produits agricoles, au lancement des appels d’offres pour les céréaliers importateurs, comme il se peut que ce moment peut s’étaler sur toute l’année quand il s’agit d’importer des hydrocarbures. «L’analyse du risque diffère d’un secteur à l’autre. Les opérateurs sont appelés à prendre les mesures nécessaires pour maîtriser ce risque», souligne Mouatadid. Armées de traders qui suivent en temps réel l’évolution des marchés de change à l’international, les banques marocaines proposent une panoplie de produits adaptés aux besoins spécifiques des opérateurs économiques. Le plus basique, appelé «Natural Hedge» est celui arrimé à la composition du panier de cotation du dirham : les entreprises peuvent ainsi demander aux fournisseurs des factures libellées à hauteur de 60% en euros et à 40% en dollars (toute perte sur une devise sera récupérée sur l’autre). Le directeur de la salle de marché de la BP encourage les opérateurs à utiliser les comptes convertibles en devises. Sachant que les exportateurs peuvent loger jusqu’à 70% de leur chiffre d’affaires à l’export dans un compte convertible en devises. «Ces montants peuvent servir à payer le cas échéant des importations, des frais de participation dans des foires à l’étranger, sans avoir besoin de transiter par le dirham, ce qui permet d’éviter le risque de change tout en économisant les frais de commission adossée à toute opération d’achat ou vente de devise sur le marché de change», explique Mouatadid. Il est possible de bénéficier de couvertures à terme permettant d’acheter ou de vendre des devises à une date prédéterminée et à un cours fixé par avance.

Les banques fournissent à ce titre une panoplie de produits dits «options», notamment ceux dits «tunnel» permettant de sécuriser un cours maximum d’achat et de bénéficier de l’évolution du cours en cas de baisse, parfois sans avoir à payer des primes aux banques. Les importateurs de céréales font souvent appel à cette technique proposée d’ailleurs par le secteur bancaire. Seulement voilà, lors d’une récente rencontre avec les services de l’Office des Changes, les membres de la Fédération nationale des négociants en céréales et légumineuses (FNCL) disent être «surpris d’apprendre que cette technique serait interdite par la réglementation marocaine». Le directeur de la FNCL, Hanine Tazi, a soulevé cette contradiction lors de la table ronde de l’Ordre des experts comptables, mais la question est restée sans réponse!


La flexibilité ne fera pas de grands changements !

«La mise en place de la flexibilité du dirham ne se soldera pas par de grands changements, ne serait-ce que lors de la première phase», estime Abdelmalek Mouatadid, directeur de la salle de marché de la Banque Populaire. En effet, le panier de cotation restera le même et Bank Al-Maghrib (BAM) continuera d’intervenir pour réguler le marché au sein d’une bande de fluctuation dont la largeur, actuellement limité à 6/1000, sera étendue. C’est surtout la hauteur de la nouvelle bande qui reste à ce jour inconnue. S’agissant du mode d’intervention de la Banque centrale, contrairement au schéma actuel où BAM sert le marché en devises pendant toute la séance, de 8h30 à 15h30 en affichant trois cotations, l’institut d’émission sera désormais appelée à limiter son intervention à deux cotations, un cours d’ouverture vers 8h30 suivi d’un cours fixing en début d’après-midi, ce dernier sera défini à l’issue d’une séance d’adjudication à laquelle les banques vont soumissionner. Le seul risque de débordement craint il y a quelques semaines par les opérateurs et les banques, soit le scénario d’une dévaluation précédant la flexibilité, a été rejeté et démenti par le wali de la Banque centrale lors de la conférence de presse du 20 juin dernier


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