Profession comptable : Les indépendants ne veulent pas d’examen
L’OPCA plaide pour un amendement de la loi encadrant la profession comptable, dans le sens d’une intégration plus souple des 2.200 indépendants au rang de comptables agréés.
La profession comptable est en pleine mutation. La mise en pratique de la nouvelle loi 127-12 suscite des remous et se heurte à la résistance des comptables indépendants (CI) pourtant majoritaires au sein de la corporation.
En effet, selon le nouveau dispositif, les CI bénéficient d’un délai de grâce de dix ans pour aller chercher l’agrément qui leur permet de continuer à exercer. Or, pour obtenir le sésame et pouvoir rejoindre les 1.581 professionnels, déjà inscrits au tableau de l’Organisation professionnelle des comptables agréés (OPCA), ils doivent désormais réussir l’examen d’aptitude professionnelle, instauré par la nouvelle réglementation. Une condition qui ne semble pas plaire du tout aux CI. Ces derniers sont en colère et le font savoir à travers des sit-in organisés dans plusieurs villes.
Le dernier en date était prévu mardi 2 mai devant le Parlement, à l’initiative du Syndicat indépendant des professionnels de la comptabilité. Le rassemblement n’a finalement pas eu lieu. «Il a juste été reporté à la semaine prochaine», confirme Nabil Anaki, secrétaire général dudit syndicat.
Les CI sont organisés en une vingtaine d’associations et syndicats éparpillés sur l’ensemble du territoire, quoique placés eux-aussi sous l’égide de l’OPCA. Leur mobilisation contre le nouvel examen obligatoire les a poussés à réfléchir à l’idée d’un collectif de coordination, en cours de constitution, lequel fera office d’interlocuteur unique appelé à faire entendre la voix des CI. Ils sont au nombre de 2.200, d’après les résultats provisoires d’une commission chargée d’arrêter la liste de ces professionnels dits indépendants, pilotée par la Direction des entreprises publiques et de la privatisation (DEPP) au ministère de l’Économie et des finances (la normalisation comptable fait partie des missions confiées à la DEPP).
Niet catégorique
Pourquoi les CI refusent-ils de passer l’examen d’aptitude professionnelle ? Pour eux, il n’est pas question de subir le concours, car leurs cabinets, disent-ils, existaient bien avant la promulgation de la nouvelle loi. Les CI, dont le nombre dépasse celui des agréés voire même l’effectif des experts comptables, disposent d’un identifiant fiscal et sont, en majorité, inscrits au rôle de la taxe professionnelle. Ils veulent un traitement identique à celui réservé à leurs collègues déjà agréés et, partant, une inscription automatique au tableau de l’OPCA, sans avoir à passer un quelconque test. Leur cause a pris ces derniers jours un nouveau tournant, suite à la sortie inattendue de l’OPCA.
À l’issue de son dernier Conseil national, l’OPCA a fait part de son soutien aux CI qui, selon elle, exercent les mêmes activités que les comptables agréés et font ainsi partie du même champ professionnel. «Les comptables indépendants doivent être intégrés via un processus plus souple. Cela passe par un amendement de la loi et du décret», plaide Mohamadi El Yacoubi, président de l’OPCA. Des réunions sont prévues au cours de ce mois de mai entre, d’une part, la commission dudit conseil chargée de ce dossier et, d’autre part, les CI en vue de définir les prochaines actions requises dans ce sens. L’avis des comptables ne fait pas l’unanimité parmi les professionnels des chiffres, notamment chez les experts. «Partout dans le monde, l’accès à la profession se fait après examen. En revanche, pour améliorer les chances de réussite, il y a lieu de prévoir une formation facultative organisée par l’Ordre des experts comptables (OEC) ou bien par l’OPCA», propose Issam El Maguiri, président de l’OEC (trois représentants de l’OEC sont membres de la Commission chargée des examens). El Maguiri tient aussi à rappeler que l’examen est le résultat d’une large concertation lors de la préparation de la nouvelle loi, ayant associé les départements ministériels concernés, les comptables agréés, les experts comptables, les fiduciaires, etc.
Le président de l’OPCA, lui, pense que la formation pourrait intervenir après leur inscription parmi les comptables agréés. «Tout écart éventuel, entre profils et postes, peut être comblé par la mise en place d’une ingénierie et d’un plan de formation continue adapté aux CI», estime El Yacoubi. Pour l’heure, rien n’est encore décidé. La Commission des examens, dont la présidence revient à la directrice générale de l’ISCAE, n’a encore pas été constituée. Quant au ministère des Finances, tant que le décret n’a pas été amendé, il ne peut que veiller au strict respect de la loi, à la limite de ses prérogatives et de son domaine d’intervention (il n’est représenté que par un seul membre au sein de ladite commission). Pas plus tard qu’il y a une semaine, le directeur des impôts avait donné ses instructions pour exiger une attestation de l’OPCA aux nouveaux comptables qui désirent s’inscrire pour la première fois au rôle de la taxe professionnelle !